Le Covid-19 sauve Israël de l’impasse politique

NdlR : l’accord Netanyahou – Gantz pour former un gouvernement d’union nationale évite au pays un 4ème scrutin sur fond de crise sanitaire et de futur choc économique à suivre. C’est cher payé, mais il aura fallu un Covid-19 pour que ces hommes se ressaisissent. Gantz sera 1er ministre dans 18 mois selon les termes de cet accord, président de la Knesset et Ministre des Affaires Etrangères. Le parti Kahkol Lavan a explosé en plein vol…

Gantz se dit « en paix » avec sa décision, seul choix face à la crise sanitaire : « Il n’y a pas d’autre alternative », a écrit Gantz, qui explique sa décision – fustigée par ses anciens alliés de Kakhol lavan – en raison de la crise sanitaire

Benny Gantz à Ramat Gan, le 9 mars 2020. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)

Benny Gantz, dirigeant du parti Hosen LeYisrael – jusqu’alors membre de la coalition centriste Kakhol lavan –, a défendu vendredi sa tonitruante décision de rejoindre un gouvernement d’unité avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, affirmant qu’il était « en paix » avec son choix, même s’il rompait l’alliance Kakhol lavan, qu’il dirigeait.

« Je suis plus en paix aujourd’hui que jamais », a-t-il écrit dans un message partagé sur Facebook.

« Je suis en paix parce que j’ai fait ce dont ma nation a besoin », a-t-il écrit, ajoutant qu’il comprenait la douleur et la colère de certains de ses partisans, qui considèrent cette décision comme une trahison.

« C’est une époque inhabituelle. Israël est en état d’urgence. Des centaines de milliers de familles se retranchent chez elles. Il y a un réel sentiment d’urgence face à une menace sanitaire qui emporte des vies et menace de dévaster l’économie », a écrit Gantz.

« C’est le moment pour les dirigeants de choisir ce qui est juste, et de mettre de côté les problèmes et litiges personnels persistants », a-t-il expliqué, se justifiant de cette décision contrevenant à sa promesse électorale de ne jamais servir sous Netanyahu, qui fait face à trois affaires de corruption.

Gantz a déclaré que, avec l’ancien chef d’état-major Gabi Ashkenazi, il avait conclu que la seule alternative serait autrement une quatrième élection – une option non envisageable durant la crise sanitaire.

Gantz a réitéré ses éloges à l’égard de ses anciens partenaires de Kakhol lavan, Yair Lapid et Moshe Yaalon, les qualifiant de « patriotes » et d’hommes de « principes », mais il leur a reproché de refuser de reconnaître qu’il n’y avait pas d’autre moyen d’aller de l’avant.

 

Jeudi soir, les désormais anciens partenaires de Gantz au sein de l’alliance Kakhol lavan ont fustigé sa décision. Lapid, dirigeant du parti Yesh Atid, a estimé lors d’une conférence de presse avec Yaalon, dirigeant de Telem, que Gantz avait « rampé » vers une coalition « d’extrémistes et d’extorqueurs ». Il a déclaré que l’ancien responsable militaire avait trahi les électeurs de Kakhol lavan, volé leurs votes pour les remettre à Netanyahu. Selon Lapid, Gantz n’entre pas, malgré ses affirmations, dans un gouvernement d’unité, mais s’était simplement « rendu » à Netanyahu.

Yaalon s’est joint à sa parole, affirmant que Gantz rejoignait un gouvernement qui « représente tout ce à quoi nous nous opposons » dans une décision « pour le moins décevante ».

Gantz a accusé vendredi Lapid et Yaalon de malhonnêteté avec les électeurs.

« S’il y a des gens qui veulent encore faire pression pour que des familles qui ont perdu leurs moyens de subsistance et qui s’inquiètent de leur santé soient renvoyées aux urnes – qu’ils aient le courage de le dire clairement et ouvertement », a écrit Gantz. « Vous le savez très bien : il n’y a pas d’autre alternative, il n’y a pas d’autre alternative, et s’il y en avait une, nous l’aurions empruntée. »

Alors même que Kakhol lavan se retrouve divisé en trois partis, des tensions ont éclos au sein même de ces factions, suggérant que de nouvelles divisions pourraient survenir.

Le député Yoaz Hendel de Telem a semblé soutenir Gantz, tweetant : « Le leadership se mesure dans les moments de crise : le bien du pays avant les intérêts politiques. C’est le choix de Benny Gantz. »

Cependant, Gadeer Kamal-Mreeh, la première femme druze élue à la Knesset, a promis de ne pas rejoindre Gantz.

« Le leadership et l’honnêteté se mesurent en temps de crise. Un leader ne trahit pas ses principes et ses électeurs », a-t-elle écrit. « Je suis entrée en politique pour remplacer le gouvernement raciste qui a émis la loi sur l’État-nation, et non pour y être associée. »

« Je ne servirai pas une seule journée sous l’homme corrompu de [la rue] Balfour », a-t-elle dit, faisant référence à l’adresse de la résidence du Premier ministre.

Gantz a dit regretter la décision de ses partenaires de se séparer de lui, mais a déclaré qu’il n’avait pas d’autre choix.

« Je ne serai pas celui qui n’a pas fait l’effort d’empêcher une dégradation continue de l’état de droit pour au moins un an de plus. Je ne serai pas celui qui n’a pas tenté d’éviter une quatrième élection. Je ne serai pas celui qui a refusé catégoriquement d’intervenir dans une situation d’urgence », a-t-il déclaré.

Le parti Kakhol lavan a été formé en 2019, avec trois factions constituantes : Yesh Atid de Lapid, qui, ayant déjà participé à plusieurs élections, a fourni une majeure partie de l’infrastructure du parti ; Hosen LeYisrael de Gantz ; et Telem de Yaalon – les deux derniers étant de nouveaux venus sur la scène politique israélienne.

« Mes collègues et moi ne ménagerons aucun effort afin de former un gouvernement national d’urgence. Nous allons affronter la crise sanitaire. Nous sortirons le pays du traumatisme économique qu’il traverse et nous essaierons de guérir les blessures causées par la haine, qui nous déchirent de l’intérieur », a déclaré Gantz.

« Tout le monde parle de promesses électorales, mais il y a une promesse à laquelle je ne dérogerai jamais : Israël passe avant tout », a-t-il déclaré.

 

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Lapid : Gantz a détourné les votes et les a donnés à Netanyahu en cadeau

Des sources proches de Yair Lapid ont déclaré à la Douzième chaîne d’information que Benny Gantz « a signé son acte de décès politique »

Yair Lapid lors d'une conférence de presse à Tel Aviv, le 26 mars 2020. (Capture d'écran)

Yair Lapid lors d’une conférence de presse à Tel Aviv, le 26 mars 2020. (Capture d’écran)

Yair Lapid a donné jeudi soir une conférence de presse aux côtés de Moshe Yaalon après que Benny Gantz est devenu président de la Knesset, dans un revirement inattendu.

« Benny Gantz a décidé aujourd’hui de dissoudre Kakhol lavan et de rejoindre le gouvernement de Netanyahu. C’est une décision décevante », a déclaré M. Lapid.

« Ce qui se forme aujourd’hui n’est pas un gouvernement d’unité ou un gouvernement d’urgence. C’est un gouvernement Netanyahu bis. Benny Gantz s’est rendu sans combattre et a rampé dans le gouvernement de Netanyahu. Il a rejoint le bloc Haredi-extrémiste ».

Lapid a ajouté : « Nous avons fait campagne ensemble parce que Benny Gantz m’a regardé dans les yeux et m’a dit qu’il ne siègerait jamais dans ce mauvais gouvernement. Je l’ai cru. Avec nous, plus d’un million d’électeurs Kakhol lavan ont défilé de rues en rues et de ponts en ponts… Ils se sentent trahis aujourd’hui, et à juste titre. Leurs votes ont été volés et offerts en cadeau à Netanyahu. »

Yair Lapid s’est engagé à « soutenir toute décision qui aidera le système de soins de santé et contribuera à remettre l’économie sur les rails ».

Il a promis : « Nous surveillerons ce gouvernement. Nous avons des objectifs. Nous avons de l’expérience. Nous avons une responsabilité nationale. Comme toujours, nous travaillerons pour la nation d’Israël et le peuple d’Israël. »

Il a reconnu qu’“Israël a maintenant une mission nationale : Lutter ensemble contre le coronavirus. La crise du coronavirus est l’une des plus graves de l’histoire de notre pays. Nous travaillerons sans relâche pour aider les citoyens d’Israël à traverser cette crise. Depuis l’opposition également. Parce que c’est ce qui est important à l’heure actuelle”.

Mais la crise, a-t-il ajouté, « ne nous donne pas le droit ou la permission d’abandonner nos valeurs. Nous avons promis de ne pas siéger avec un Premier ministre ayant trois inculpations pénales. Nous avons promis de ne pas siéger dans une coalition d’extrémistes et de racketteurs. Nous avons dit que nous ne permettrions à personne de saper la démocratie israélienne. Et cette semaine où les attaques contre le système judiciaire ont été les plus graves, un prix est décerné à ceux qui désobéissent à la loi. Un prix à la criminalité. Vous ne pouvez pas ramper dans un gouvernement comme celui-là et nous dire que vous l’avez fait pour le bien du pays ».

Des sources proches de Yair Lapid ont par ailleurs déclaré à la Douzième chaîne d’information que Benny Gantz « a signé son acte de décès politique ».

Moshe Yaalon, chef de Telem qui va s’associer à Yesh Atid, a dit que la décision de Benny Gantz d’entrer dans un gouvernement qui « symbolise tout ce à quoi nous nous opposons » est « incompréhensible et décevante ». Il a promis de soutenir tous les efforts menés pour combattre la pandémie de coronavirus.

 

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Coup de tonnerre en Israël, Gantz ouvre la voie au maintien de Netanyahu

Élu par 74 voix contre 18, obtenant notamment les voix des députés du Likud, l nouveau président de la Knesset a perdu des appuis dans son propre camp

Benny Gantz s'exprime au cours d'un débat à la Knesset sur les escalades récentes de violence à Gaza, le 10 février 2020 (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Benny Gantz s’exprime au cours d’un débat à la Knesset sur les escalades récentes de violence à Gaza, le 10 février 2020 (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Dans un retournement aussi spectaculaire qu’inattendu, Benny Gantz a été élu président du Parlement israélien jeudi dans le cadre d’un potentiel accord de partage du pouvoir avec son rival Benjamin Netanyahu pour mettre fin à la pire crise politique de l’histoire d’Israël.

Jeudi après-midi à Jérusalem, le petit monde politique attendait l’élection d’un nouveau président du Parlement, au lendemain de la démission de Yuli Edelstein, un proche du Premier ministre sortant Benjamin Netanyahu, chef du parti de droite Likud.

Benny Gantz, N.1 du parti centriste Kakhol lavan, qui a été désigné le 16 mars pour former le nouveau gouvernement après les dernières élections du 2 mars, devait présenter la candidature d’un de ses députés pour ce poste, Meir Cohen de la faction Yesh Atid de Yair Lapid.

Mais dans un coup de théâtre, il a présenté sa propre candidature, la seule d’ailleurs pour ce poste.

Il a été aussitôt élu par 74 voix contre 18, obtenant notamment les voix des députés du Likud, mais perdant des appuis dans son propre camp, des membres de Kakhol lavan ayant refusé de cautionner ce rapprochement avec le parti de M. Netanyahu.

Et juste après son élection, M. Gantz a appelé à un « gouvernement d’union et d’urgence » pour gérer la crise du nouveau coronavirus.

Depuis plus d’un an, M. Gantz, ex-chef de l’armée, ne lorgnait pas le poste de président du Parlement mais celui de Premier ministre.

Il a ainsi été chargé par le président Reuven Rivlin de former le gouvernement dans la foulée des troisièmes législatives en moins d’un an face à M. Netanyahu.

Ce dernier avait obtenu son meilleur score à la tête du Likud – 36 sièges sur les 120 de la Knesset -, mais sans toutefois parvenir à rallier une majorité.

M. Gantz avait été désigné car il avait obtenu le soutien d’un plus grand nombre de députés que son rival pour tenter de former un gouvernement, alors que le pays est dirigé par des cabinets transitoires depuis plus de 15 mois.

Le but de la manoeuvre est « de former un gouvernement avec Netanyahu », a indiqué à l’AFP un cadre de la coalition Kakhol lavan, qui était par ailleurs jeudi sur le point d’implosion.

Peu après l’annonce de Gantz, les ténors du parti Yaïr Lapid et Moshe Yaalon ont indiqué quitter le navire.

Pendant ce temps, les équipes de MM. Gantz et Netanyahu mènent des pourparlers dans l’espoir d’accoucher d’un gouvernement d’union et aussi « d’urgence », l’Etat hébreu faisant face à la pandémie du nouveau coronavirus.

Mais déjà des alliés de M. Netanyahu ont salué la décision de l’ancien chef de l’armée qui semblait avoir rendu les armes.

« Je félicite Benny Gantz pour sa décision courageuse d’intégrer un gouvernement d’unité mené par Benjamin Netanyahu. Il s’agit de la bonne décision à prendre pour Israël en cette période d’urgence » sanitaire, a commenté le ministre de la Défense Naftali Bennett.

Israël combat la pandémie dont l’un des effets secondaires a d’ailleurs été le report sine die du procès de Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption, malversations et abus de confiance dans trois affaires.

Jusqu’à présent plus de 2 660 cas, dont huit morts, ont été confirmés en Israël. Les autorités ont renforcé les restrictions en interdisant aux citoyens de sortir de chez eux hormis pour des raisons essentielles comme acheter des vivres, des médicaments, recevoir des soins de santé, ou dans certains cas travailler.

« De nouvelles mesures d’urgence ont été mises en place limitant nos déplacements, et notre liberté, comme jamais auparavant, mais pour notre bien-être à tous », a souligné mercredi M. Rivlin.

Benjamin Netanyahu, plus pérenne des chefs de gouvernement de l’histoire du pays, s’était alarmé d’une crise sanitaire qui pourrait perdurer.

 

 

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