Israël : à nouveau dans l’impasse politique

L’opposition va présenter un projet de loi visant à disqualifier Netanyahu. Gantz exhorte à soutenir l’initiative suite à l’impasse budgétaire et le risque d’élections ; Lapid: « Tout ce qui intéresse » le Premier ministre, ce sont ses accusations pénales

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu le 11 mars 2020 (à gauche) ; le leader de Yesh Atid-Telem Yair Lapid, en décembre 2019. (Miriam Alster/FLASH90)Les partis d’opposition se sont engagés à présenter cette semaine un projet de loi qui empêcherait un membre de la Knesset mis en accusation de former un gouvernement, ce qui empêcherait le Premier ministre Benjamin Netanyahu de tenter de former une nouvelle coalition si une autre élection avait lieu prochainement.

Cette décision, annoncée samedi et dimanche, est intervenue alors que la réunion hebdomadaire du cabinet a été annulée en raison d’un profond désaccord entre le parti Likud de Netanyau et Kakhol lavan du ministre de la Défense Benny Gantz sur le budget de l’État, qui risque de renvoyer le pays aux urnes.

« Le fait qu’il n’y ait pas eu de réunion du cabinet aujourd’hui et que nous galopions vers des élections parce que le Premier ministre a des accusations [contre lui] et que c’est tout ce qui l’occupe est une honte totale », a déclaré dimanche le chef de l’opposition Yair Lapid, qui dirige le parti Yesh Atid-Telem, dans un communiqué.

Il a déclaré que le projet de loi visant à disqualifier Netanyahu serait voté mercredi.

Faisant référence à la crise économique provoquée par la pandémie, il a ajouté : « Les gens n’ont rien à manger, les entreprises ferment. La situation ne peut pas continuer ainsi. »

La veille, le député Nitzan Horowitz, chef du parti de gauche Meretz, avait également déclaré qu’il déposerait un tel projet de loi.

« Il n’est pas possible qu’un accusé gère un pays entier selon ses caprices et ses intérêts en matière judiciaire », a déclaré M. Horowitz. « L’actuelle Knesset a une majorité pour une telle loi, et elle peut empêcher la tenue d’une quatrième élection » (depuis avril 2019).

Netanyahu est jugé pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires criminelles. Il nie tout acte répréhensible.

 

Annulation de la réunion de cabinet : Likud et Kakhol lavan aggravent l’impasse

Les partis ne se sont pas entendus sur l’ordre du jour de la réunion hebdomadaire, marquant un nouveau creux dans la coalition qui s’effrite

Le Premier ministre  Benjamin Netanyahu (Droite) et le ministre de la Défense Benny Gantz participent à la réunion hebdomadaire du cabinet à Jérusalem le 7 juin 2020. (Photo par MENAHEM KAHANA / AFP)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (Droite) et le ministre de la Défense Benny Gantz participent à la réunion hebdomadaire du cabinet à Jérusalem le 7 juin 2020. (Photo par MENAHEM KAHANA / AFP)

La coalition au pouvoir en Israël semble s’être rapprochée de la dissolution samedi soir, alors que les deux factions Likud et Kakhol lavan ont annoncé qu’il n’y aurait pas de réunion du cabinet ce dimanche, se rejetant mutuellement la responsabilité de l’impasse.

Cette annonce extraordinaire a mis en lumière une crise de coalition croissante, les deux partis semblant s’enliser dans des spéculations effrénées sur l’imminence de nouvelles élections et l’intensification de leur querelle autour du budget d’État.

Dans le cadre de leur accord de coalition, les deux partis doivent approuver l’ordre du jour de la réunion hebdomadaire du cabinet, qui se tient généralement le dimanche. Mais en l’absence d’accord sur l’ordre du jour, la réunion a été annulée.

Dans un communiqué, le Likud a accusé Kakhol lavan de refuser d’approuver un point de l’ordre du jour concernant une proposition de programme d’aide au coronavirus de 8,5 milliards de shekels (2,125 milliards d’euros).

« La réunion du cabinet ne se tiendra pas demain en raison du refus de Kakhol lavan de mettre à l’ordre du jour un plan d’assistance économique du gouvernement, par le Premier ministre et le ministre des Finances », a déclaré le parti.

« Le plan créera environ 10 000 nouveaux emplois dans l’économie », a-t-il ajouté. « Le Likud demande à Kakhol lavan de ne pas empêcher le transfert de fonds aux citoyens d’Israël en ce moment, alors qu’il fait face à la crise du coronavirus. »

Kakhol lavan a répondu en accusant que la réunion avait été annulée « en raison de l’insistance du Likud à ne pas respecter l’accord de coalition ».

« Ce n’est pas la première fois que le Likud ne respecte pas ses engagements, et toute autre excuse est un mensonge complet pour l’opinion publique israélienne », a-t-il déclaré.

Il a décrit la proposition du plan d’assistance comme un écran de fumée, disant qu’elle n’avait pas encore été finalisée.

La principale pomme de discorde entre les partis tourne autour du budget, suscitant des spéculations fébriles sur le fait qu’Israël pourrait se diriger vers sa quatrième élection en moins de deux ans.

« L’adoption d’un budget sur deux ans signifie que [le ministre de la Défense Benny] Gantz deviendra Premier ministre [en 2021] », ont déclaré deux responsables du Likud selon les informations de la Douzième chaîne.

La chaîne a également rapporté samedi que Netanyahu avait commencé à chercher des transfuges potentiels qui lui permettraient de mettre en place un gouvernement alternatif et d’éviter les élections. Il aurait récemment rencontré la ministre de l’Immigration, Pnina Tamano-Shata, de Kakhol lavan, et aurait cité des responsables du parti de Gantz qui ont déclaré que la réunion avait pour but de l’enrôler pour qu’elle change de camp.

« Celui qui cherche à la faire entrer dans un gouvernement restreint perd son temps », a déclaré la chaîne, citant une déclaration faite en son nom.

Le chef de l’opposition Yair Lapid, dirigeant du parti Yesh Atid-Telem, a déclaré à la Treizième chaîne d’information qu’il soutiendrait le projet de loi du Meretz interdisant à un membre de la Knesset faisant l’objet d’une accusation pénale de former un gouvernement si de nouvelles élections étaient convoquées. Il a déclaré qu’il s’attendait à ce que ses anciens alliés de Kakhol lavan soutiennent cette initiative.

« Au moins une fois, ils tiendront une promesse faite aux électeurs », a dit M. Lapid à propos de Kakhol lavan.

Le gouvernement a jusqu’au 25 août pour approuver un budget, sinon il sera automatiquement dissous. Netanyahu et Gantz ont convenu d’adopter un budget jusqu’en 2021 dans le cadre de l’accord de coalition entre leurs partis, mais le Premier ministre demande un budget qui ne couvre que le reste de l’année 2020, en invoquant l’incertitude causée par la pandémie de coronavirus. Gantz, en revanche, insisté sur un budget qui s’étendrait jusqu’à l’année prochaine.

Dans une interview diffusée samedi, Gantz a tenu bon, affirmant qu’il ne laisserait pas tomber sa demande concernant un budget qui va jusqu’en 2021.

« Pour stabiliser le gouvernement, un plan est nécessaire pour 2020-2021. Pas un budget pour les vacances ou [pour un] week-end, un budget pour une année entière », a-t-il déclaré à la Douzième chaîne d’information. « Je ne céderai pas. »

Gantz et Netanyahu se sont mis d’accord sur un partage du pouvoir en mai après que trois tours consécutifs d’élections se soient révélés infructueux. L’accord a entraîné la scission de Kakhol lavan, en raison de la promesse faite par le parti durant la campagne de ne pas rejoindre un gouvernement dirigé par le Premier ministre en raison des accusations de corruption portées contre lui.

Alors que Netanyahu doit céder le poste de Premier ministre à Gantz s’il convoque de nouvelles élections avant que le chef de Kakhol lavan ne prenne la tête du gouvernement en novembre 2021, l’accord de coalition a fait une exception en cas d’échec de l’adoption du budget, ce qui laisse supposer que le chef du Likud force désormais la crise autour du budget pour éviter de devoir quitter son poste dans 15 mois.

Selon un reportage de la Douzième chaîne d’information, mardi, Netanyahu proposerait de verser des centaines de millions de shekels aux yeshivot en dehors du cadre budgétaire afin de réduire l’opposition des partis ultra-orthodoxe Shas et Yahadout HaTorah à la dissolution du gouvernement et à la convocation d’élections.

La chaîne a déclaré que les objections des ultra-orthodoxes concernant les élections étaient basées sur la crainte de retarder encore le budget – et avec lui le versement des fonds pour les yeshivot.

Le Shas et Yahadout HaTorah ont tous deux soutenu M. Netanyahu lors des élections de l’année dernière, mais ont menacé de renoncer à leur alliance avec le Premier ministre si des désaccords sur le budget conduisaient à de nouvelles élections. Jeudi, les dirigeants des deux partis ont déclaré qu’il serait « complètement fou » d’organiser de nouvelles élections alors qu’Israël est aux prises avec la pandémie de coronavirus et les retombées économiques qui l’accompagnent.

« Nous ne coopérerons à aucun effort pour anticiper les élections. L’adoption d’un budget est à l’ordre du jour », ont déclaré le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri, le ministre du Logement Yaakov Litzman et le député Moshe Gafni dans une déclaration commune.

 

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Yahadout HaTorah laisse entendre qu’il pourrait quitter la coalition

« La possibilité d’en finir définitivement avec le bloc de droite est plus proche que jamais », a déclaré une source anonyme de Yahadout HaTorah, qui rejette de nouvelles élections

Le ministre de l'Intérieur Aryeh Deri, (à gauche), s'entretient avec le ministre de la Santé Yaakov Litzman lors d'une réunion à Jérusalem, le 4 mars 2020. (Yonatan Sindel/Flash90)

Le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri, (à gauche), s’entretient avec le ministre de la Santé Yaakov Litzman lors d’une réunion à Jérusalem, le 4 mars 2020. (Yonatan Sindel/Flash90)

Dimanche matin, Yahadout HaTorah a semblé envoyer le signal le plus fort jusqu’à présent qu’il ne soutiendra pas l’effort du Premier ministre Benjamin Netanyahu pour aller vers de nouvelles élections. Des sources au sein du parti ont déclaré à plusieurs médias qu’il pourrait abandonner le Premier ministre et son bloc si un nouveau vote était convoqué – la quatrième élection en moins de deux ans.

« La possibilité d’en finir définitivement avec le bloc de droite est plus proche que jamais », a déclaré une source au site internet Walla. « Cela laissera le Likud et Netanyahu seuls sur le chemin des élections. »

Des sources de Yahadout HaTorah ont parlé anonymement à différents médias, pour passer le même message.

Une source haut placée du parti a déclaré au site internet religieux Arutz 7 : « Nous sommes montés au créneau pour lui encore et encore et encore, pendant trois campagnes électorales. À chaque fois qu’il avait besoin de nous, nous étions présents. Plus de signatures, plus de discussions de bloc, plus de réunions inutiles – tout pour s’assurer qu’il gagne. »

« Maintenant, il nous remercie bien mal pour notre soutien en cherchant à tout casser à cause de ses intérêts politiques. »

Ces propos sont intervenus alors que les spéculations grandissent concernant de nouvelles élections en raison d’une crise politique croissante au sujet de l’adoption du budget de l’État.

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Miki Zohar : Le gouvernement va droit au « divorce »

Le député et chef de la coalition Miki Zohar décrit un « gouffre » entre le Likud et Kakhol lavan, et une situation critique ; des décisions « doivent être prises » sur l’avenir commun

Le député Miki Zohar du Likud s'exprime à la Knesset, à Jérusalem, le 17 février 2020. (Yonatan Sindel/Flash90)

Le député Miki Zohar du Likud s’exprime à la Knesset, à Jérusalem, le 17 février 2020. (Yonatan Sindel/Flash90)

Le gouvernement est incapable de bien fonctionner et va s’effondrer, a déclaré dimanche le chef de la coalition, le député Miki Zohar, alors que les deux principaux partis de la coalition restent très divisés sur un certain nombre de questions.

Zohar, du parti du Likud du Premier ministre Benjamin Netanyahu, a déclaré au radiodiffuseur public Kan : « Il y a un abîme béant entre nous et Kakhol lavan sur de nombreux sujets au niveau idéologique. »

Le gouvernement d’union, formé après trois élections successives peu concluantes et finalement constitué le 17 mai, est assailli depuis par des querelles et des blocages entre le Likud de droite et le parti centriste Kakhol lavan, dirigé par Benny Gantz.

« Nous ne parvenons pas à fonctionner correctement en tant que coalition », a déclaré M. Zohar.

« C’est comme un couple qui veut divorcer et qui à tout moment » va entamer une procédure pour mettre fin au mariage, a-t-il dit. « C’est le sentiment du moment : que peu importe ce que nous faisons, cela va se terminer entre nous et Kakhol lavan. »

« Comme pour le moment la coalition n’est pas stable, la détérioration ne fera que continuer », a-t-il estimé, sans pour autant exclure la possibilité que la situation se stabilise, permettant au gouvernement de continuer à fonctionner pendant de nombreux mois.

Zohar a déclaré qu’au cours du mois dernier, il a senti la situation se détériorer et que dimanche, elle a atteint « le pire point depuis la mise en place du gouvernement ».

« Nous sommes à un moment critique où nous devons décider où nous allons », a déclaré M. Zohar. « Si la décision prise par Gantz et Netanyahu est que nous ne maintenons pas de gouvernement, nous devrons essayer de mettre en place un gouvernement alternatif ou aller vers des élections. »

Entre autres désaccords, les parties sont actuellement à couteaux tirés sur la question de savoir s’il faut adopter un budget d’un an, comme le préconise Netanyahu, ou un budget de deux ans proposé par Kakhol lavan.

Dans un climat de profonde méfiance entre les deux partis, M. Gantz s’est engagé à ne pas revenir sur sa demande de budget biennal, comme le stipule l’accord de coalition, tandis que le ministre des Finances du Likud, Israel Katz, a déclaré qu’il présenterait une proposition pour 2020 seulement.

En cherchant à revenir sur son accord de coalition avec Gantz et à n’adopter qu’un budget pour le reste de l’année en cours, Netanyahu invoque l’incertitude créée par la crise du coronavirus.

Netanyahu pourrait également soutenir l’option d’un an pour se laisser la possibilité de dissoudre le gouvernement l’année prochaine en ne votant pas un budget 2021 – la seule option qui, selon son accord complexe et alambiqué avec Gantz, lui permettra de renvoyer le pays à de nouvelles élections sans que Gantz ne devienne automatiquement Premier ministre dans l’intervalle.

La date limite actuelle est le 25 août. Si le budget n’est pas adopté d’ici là, des élections seront automatiquement organisées en novembre.

Les deux parties pourraient également se diriger vers un autre différend concernant un projet de loi controversé de l’opposition qui permettrait à la Knesset de contourner la Cour suprême. Zohar a déclaré samedi qu’il chercherait à obtenir le soutien de Netanyahu pour la législation du parti d’opposition de droite Yamina qui sera proposée cette semaine. Kakhol lavan a rapidement répondu qu’il s’opposerait au projet de loi et a appelé le Likud à faire de même.

Netanyahu et Gantz se sont également affrontés lors de la réunion du cabinet de dimanche, en raison des manifestations anti-gouvernementales à l’échelle nationale de citoyens qui demandent au Premier ministre de démissionner en raison de son procès pour corruption. Alors que Netanyahu a condamné les rassemblements comme étant anti-démocratiques, Gantz a insisté sur le fait que les gens avaient le droit de protester.

Selon un article de Haaretz paru le mois dernier, Netanyahu aurait décidé de convoquer de nouvelles élections en raison de la décision du tribunal de district de Jérusalem selon laquelle les témoins commenceront à témoigner à son procès pénal en janvier, avec des audiences qui auront lieu trois fois par semaine.

Selon l’article, M. Netanyahu craint que les requêtes adressées à la Cour suprême de justice ne lui interdisent de continuer à exercer ses fonctions de Premier ministre pendant son procès, et que le procureur général Avichai Mandelblit ne soutienne cette position, ce qui permettrait aux juges de statuer plus facilement en faveur des plaignants.

Des proches non nommés de Netanyahu auraient déclaré que le principal objectif du Premier ministre en retournant aux urnes était de reprendre le contrôle du ministère de la Justice et qu’il mènerait une campagne massive contre le système judiciaire avant les élections. L’actuel ministre de la Justice, Avi Nissenkorn de Kakhol lavan, a défendu le système judiciaire face aux affirmations sans fondement de Netanyahu et de ses alliés selon lesquelles il serait victime d’une « tentative de coup d’Etat politique ».

Netanyahu a rejeté cette information et d’autres comme étant « absurdes », mais a averti qu’un retour aux urnes se produirait effectivement si sa coalition n’adoptait pas un budget d’Etat le mois prochain.

Deux sondages réalisés par la télévision et publiés le mois dernier ont montré que le Likud de Netanyahu perdrait du terrain si des élections étaient organisées maintenant – non pas au profit de Gantz, mais du parti de droite Yamina, dirigé par Naftali Bennett, qui siège actuellement dans l’opposition.

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Les partis orthodoxes menacent de ne pas soutenir Netanyahu en cas d’élection

Les partis Yahadout HaTorah et Shas appellent le Likud et Kakhol lavan à faire des compromis concernant le vote du budget

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (au centre), le ministre de l'Intérieur Aryeh Deri (à droite) et le ministre de la Santé de l'époque Yaakov Litzman (à gauche) participent à une conférence à Lod, le 20 novembre 2016. (Kobi Gideon/GPO)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (au centre), le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri (à droite) et le ministre de la Santé de l’époque Yaakov Litzman (à gauche) participent à une conférence à Lod, le 20 novembre 2016. (Kobi Gideon/GPO)

Des hauts responsables des deux partis ultra-orthodoxes auraient menacé d’abandonner leur partenariat politique de longue date avec le parti du Likud du Premier ministre Benjamin Netanyahu si un désaccord sur le budget d’État emmenait Israël vers de nouvelles élections. En outre, un élu haredi a déclaré que son parti s’opposerait à toute mesure risquant de provoquer des élections anticipées.

Le Likud est actuellement à couteaux tirés avec le parti Kakhol lavan afin de déterminer s’il faut faire passer un budget d’un an, comme le demande le Premier ministre Benjamin Netanyahu, ou un budget sur deux ans tel que soutenu par le ministre de la Défense Benny Gantz et inclus dans l’accord de coalition signé entre les deux partis.

Un échec à adopter un budget d’ici le 25 août entraînera des élections automatiques en novembre, ce qui serait le quatrième scrutin en moins de deux ans.

Les partis Shas et Yahadout HaTorah ont appelé Netanyahu et Gantz à faire un compromis et à ne pas laisser leur conflit mener vers de nouvelles élections en pleine épidémie de coronavirus.

Renforçant la pression, des hauts responsables de Yahadout HaTorah et du Shas ont été cités mardi par la chaîne publique Kan comme ayant affirmé que si Netanyahu refusait de faire un compris, les partis refuseront de soutenir publiquement le Premier ministre comme ils l’ont fait lors des dernières élections.

Ils ne soutiendront plus Netanyahu pour le poste de Premier ministre après l’élection, lui empêchant ainsi potentiellement d’obtenir le soutien nécessaire de 61 élus.

L’élu de Yahadout HaTorah Uri Maklev a déclaré au site d’information Ynet que son parti s’opposait à toute mesure qui entraînerait des élections.

« Nous ne participerons pas à entraîner des élections », a déclaré Maklev. « Si un projet de loi est déposé pour décaler la date butoir du budget, nous n’en ferons pas partie. »

Le président du groupe du Likud Miki Zohar a balayé la menace d’un revers de la main.

« Je n’ai aucun doute que le bloc de droite sera préservé », a-t-il dit. « Je ne pense pas qu’il y ait une possibilité de coopérer avec les éléments de gauche. »

Mais Gantz a déclaré mardi dans un entretien avec le site internet Ynet que ses liens avec les partis ultra-orthodoxes étaient « excellents », ajoutant que les partis haredi voulaient un gouvernement « stable et continu ».

Gantz a déclaré que « toute personne qui ne s’en tient pas à l’accord [de coalition], qui a été signé il y tout juste trois mois, devra ensuite s’expliquer sur ce qui s’est passé. Les ultra-orthodoxes et tous les partenaires sont les garants du respect de l’accord.

« Je pense que des élections et le manque d’une stabilité économique ne sont bons pour personnes dans l’Etat d’Israël », a-t-il dit.

Lundi, le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri, qui dirige aussi le Shas, a demandé au Likud et à Kakhol lavan de trouver un compromis afin de ne pas mettre un terme à la coalition.

« Le peuple israélien ne nous pardonnera pas si nous retournons aux urnes », a-t-il dit dans un entretien avec la Douzième chaîne. « Le peuple ne comprend pas [ce conflit] et veut que nous travaillons ensemble. »

Deri, qui a aidé à rapprocher Netanyahu et Gantz dans une coalition d’unité, a déclaré qu’il continuait d’essayer à jouer un rôle de médiateur.

« Je parle à tout le monde et j’essaie de trouver différents compromis. Nous devons aller au-delà de cela. C’est un large gouvernement et nous avons travaillé très dur pour le former. Il doit se poursuivre », a-t-il dit.

Alors que les deux partis sont très méfiants l’un de l’autre, Gantz a promis qu’il ne reculerait pas sur sa demande d’un budget sur deux ans, comme c’est inscrit dans l’accord de coalition.

Cherchant à modifier l’accord de coalition avec Gantz et à passer un budget couvrant seulement le reste de l’année actuelle, Netanyahu a cité l’incertitude créée par la crise du coronavirus. Pourtant, beaucoup voient cela comme un moyen pour lui de se retirer de l’accord de partage du pouvoir qu’il a signé avec Gantz, qui doit occuper le poste de Premier ministre à la fin de l’année prochaine.

Si Deri a déclaré que le Shas ne voulait pas de nouvelles élections, il a refusé de dire qu’il soutenait un budget sur un ou deux ans.

« Nous faisons ce que nous pouvons pour trouver un compromis entre les deux visions du budget », a-t-il dit. « Tout le monde doit faire un compromis. Nous ne pouvons pas faire tomber le gouvernement là-dessus. »

Lundi également, le ministre de la Coopération régionale Ofir Akunis a prévenu que si Kakhol lavan ne soutenait par un budget d’un an comme cela est demandé par le parti du Likud, ce dernier chercherait à remplacer la coalition d’unité avec un gouvernement alternatif de 61 élus.

« Moi, et le Likud, ne voulons pas que la Knesset se dissolve, mais plutôt qu’un gouvernement alternatif soit formé au sein de la 23e Knesset », a-t-il dit, sans préciser comment parvenir à réunir à une majorité de 61 élus de la Knesset.

Le Likud « ne va pas céder » dans sa confrontation avec Kakhol lavan sur le budget, a affirmé Akunis.

« Tout le monde saura qui a entraîné Israël vers une quatrième élection » si les élections ont finalement lieu, a-t-il dit. « Gantz sera totalement responsable. »

Lundi également, Netanyahu a affirmé lors d’une réunion de son parti du Likud à la Knesset que le budget devait être adopté, ou alors le pays aurait besoin de procéder à des « coupes significatives » alors que l’économie a déjà été durement touchée par l’épidémie de coronavirus.

« Ce n’est pas le moment d’avoir des coupes », a déclaré Netanyahu. « C’est le moment de donner de l’argent aux citoyens. »

Malgré toutes les assurances d’Akunis, il semble probable que Netanyahu mise sur l’option d’un budget d’un an pour se laisser la possibilité de dissoudre le gouvernement l’année prochaine en ne validant pas le budget 2021 – la seule option, selon son accord complexe et alambiqué avec Gantz, qui est aussi Premier ministre d’alternance, lui permettant de mener le pays vers une nouvelle élection sans que Gantz ne devienne automatiquement Premier ministre dans l’intérim entre eux.

Le gouvernement d’unité, formé après trois élections successives sans résultat concluant et finalement intronisé le 17 mai, a depuis été secoué par des manœuvres de blocage entre le Likud et Kakhol lavan.

Dimanche, Zohar a déclaré à la chaîne publique Kan, « qu’il y a un fossé croissant entre nous et Kakhol lavan sur de nombreux sujets à un niveau idéologique ».

« C’est comme un couple qui veut divorcer et qu’à tout moment » les procédures pour mettre un terme au mariage peuvent commencer, a-t-il dit. « C’est le sentiment en ce moment : peu importe ce que nous faisons, cela va s’arrêter entre nous et Kakhol lavan. »

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Netanyahu joue avec son avenir politique en prenant en otage le budget israélien

Le Premier ministre a foncé tête baissée dans l’impasse budgétaire, provoquant la colère du public – ce qui pourrait lui être plus nuisible que les poursuites et sa politique

Haviv Rettig Gur
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu visite une école à Jérusalem avant l'ouverture de l'année scolaire, le 25 août 2020. (Marc Israel Sellem/Pool)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu visite une école à Jérusalem avant l’ouverture de l’année scolaire, le 25 août 2020. (Marc Israel Sellem/Pool)

Lundi, à 20h25, moins de quatre heures avant l’heure butoir de minuit pour l’adoption d’un budget ou le déclenchement d’une quatrième élection en 20 mois, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a publié une vidéo annonçant sa décision d’éviter de nouvelles élections et apportant son soutien à un projet de loi visant à prolonger le délai budgétaire jusqu’au 23 décembre.

Ce n’est pas par hasard que Netanyahu a fait cette annonce à 20h25. Le ministre de la Défense Benny Gantz avait convoqué une conférence de presse pour 20h30, et Netanyahu était impatient de prendre le dessus sur le leader de Kakhol lavan. Il s’agissait ainsi d’un acte puéril et désespéré.

Tout en déclarant qu’il agissait par souci du bien public, Netanyahu reconnaissait là implicitement sa défaite dans un jeu qu’il a joué pendant des mois contre Gantz, un jeu dans lequel il a utilisé l’immolation possible de l’économie nationale comme menace.

Cela peut sembler une lecture partisane des événements de lundi, mais les actions de Netanyahu depuis ce soir-là l’ont confirmé.

Israël est sans budget d’État depuis la fin 2019. C’est sans précédent – et terriblement dommageable. Cela signifie que les dépenses du gouvernement ne sont pas liées à ses revenus. Cela signifie que l’argent est distribué par le ministère des Finances aux agences gouvernementales au coup par coup, par décret, de telle manière qu’il est presque impossible pour la Knesset de savoir où va l’argent.

Sans l’intervention constante des fonctionnaires et des législateurs, cela signifie aussi que l’argent ne circule pas là où il est nécessaire, ce qui laisse la possibilité qu’une simple erreur d’horaires puisse retarder l’arrivée de milliards de shekels dans le système éducatif six jours avant le début de l’année scolaire – comme cela s’est produit mercredi soir.

Le fait que le gouvernement renonce volontairement à sa capacité de gérer correctement les finances publiques est déjà assez inquiétant ; le fait qu’il le fasse en pleine crise économique est tout à fait choquant. Le déficit devrait doubler d’ici la fin de l’année. Le ratio de la dette au PIB devrait passer d’environ 60 % au début de l’année – l’un des ratios les plus bas parmi les économies développées – à 77 % à la fin de l’année, effaçant ainsi les durs sacrifices de 15 années de responsabilité budgétaire. Les recettes fiscales du gouvernement devraient diminuer de 55 milliards de shekels (13,8 milliards d’euros), soit environ 15 % des 360 milliards (90,2 milliards d’euros) prévus initialement, alors même que les dépenses imprévues pour compenser les dommages économiques causées par la pandémie devraient atteindre plus de 81 milliards de shekels (20,3 milliards d’euros), selon le ministère des Finances.

En d’autres termes, des pourcentages à deux chiffres de l’économie sont dépensés et remodelés autour de la crise liée à la pandémie – sans que personne ne planifie réellement les dépenses ou même ne puisse dire à la Knesset où tout cela va.

Cela n’est pas fini. Un dernier élément de l’impasse budgétaire rend l’ensemble beaucoup, beaucoup plus grave. Il s’agit simplement de ceci : il n’existe aucune raison substantielle pour cela que quiconque puisse expliquer.

Netanyahu et Gantz ont signé un accord de coalition en mai qui stipule l’adoption d’un budget de deux ans couvrant 2020 et 2021. Depuis lors, Netanyahu a exigé un budget d’un an, et ni les ministres du Likud ni Netanyahu lui-même n’ont été en mesure de fournir des explications économiques ou politiques significatives.

Cette demande a une raison plus prosaïque : un budget d’un an seulement valable jusqu’à la fin de 2020 permet à Netanyahu d’engager un nouveau combat budgétaire au début de 2021, et d’utiliser ce second combat pour forcer de nouvelles élections, évitant ainsi la perspective exaspérante de permettre à Gantz de prendre sa place en tant que Premier ministre lorsque leur rotation aura lieu en novembre 2021 – ou même de servir de Premier ministre intérimaire, un privilège que l’accord de coalition accorde à Gantz si Netanyahu renverse le gouvernement pour une raison autre que le budget.

Autrement dit, l’accord négocié par Gantz et Netanyahu ne laisse à ce dernier qu’un seul moyen d’empêcher Gantz de prendre sa place : en jouant des jeux profondément nuisibles avec le budget de l’État. C’était une idée que Gantz ne semblait pas croire que Netanyahu aurait la hutzpa (le culot) de prendre.

Mais Netanyahu a pris cette voie, et est revenu sur son engagement budgétaire de deux ans. Et il a tenu bon non seulement depuis la formation du gouvernement en mai, mais même avec le compromis de lundi qui retarde les élections et qui ne fait que retarder l’adoption du budget jusqu’en décembre.

Disons-le : bien que Netanyahu revienne sur ses engagements, Gantz, lui aussi, refuse d’adopter un budget d’un an, en restant ferme tout au long de ces derniers mois sur sa demande que Netanyahu respecte l’accord de coalition et adopte un budget de deux ans. Gantz a avancé deux arguments : premièrement, alors que l’impasse approche de la fin de l’année, un budget unique pour 2020 a de moins en moins de sens ; deuxièmement, il est dans l’intérêt à long terme d’Israël, même au prix de plus de temps sans budget d’État cohérent, de ne pas permettre à la prise d’otage du budget par Netanyahu – ceci à des fins politiques personnelles – de porter ses fruits.

Quoi qu’il en soit, la position de Gantz contribue également à assurer qu’il pourrait effectivement être Premier ministre un jour, même pour une courte période.

Le tort et la colère

Netanyahu a porté sa demande de budget d’un an jusqu’au bord de la falaise, mettant Gantz au défi de s’en tenir à ses positions, même dans la perspective, certes certaine, d’une dissolution électorale.

Gantz n’a jamais cillé.

Ce fait pourrait avoir un rapport avec la fameuse équanimité de Gantz, le calme dont on s’est moqué si ouvertement et si souvent pendant les campagnes électorales de l’année dernière, mais qui faisait aussi partie de son style de gestion imperturbable lorsqu’il était chef d’état-major de l’armée.

Mais cela pourrait aussi être lié au fait que Netanyahu ne lui a rien laissé à perdre. Ces dernières semaines, Gantz a obtenu un nombre lamentable de 8 à 11 sièges à la Knesset. Si Gantz avait cédé, est-ce que même ces sièges lui seraient restés ? Le choix que lui a laissé Netanyahu était brutal : se plier à la volonté du chef du Likud, adopter un budget uniquement pour 2020, et se jeter dans l’oubli politique lorsque les négociations sur le budget 2021 échoueront inévitablement en mars et qu’une élection sera ensuite organisée en juin ; ou bien rester sur ses positions, exiger un budget sur deux ans, même au risque de voir la Knesset dissoute lundi et des élections dans trois mois, mais avoir une chance décente de conserver suffisamment de sièges pour revenir à la Knesset, et peut-être même dénoncer le bluff électoral de Netanyahu et en sortir plus fort.

Gantz a maintenant une longue série de victoires dans sa bataille pour tenir Netanyahu à ses engagements. Mais dans ce dernier cas, c’est Netanyahu qui a donné la victoire à Gantz.

Ce faisant, Netanyahu a également découvert à quel point il avait trébuché, et à quel point ses propres électeurs se sentaient maintenant trahis.

Netanyahu a été contraint de se retirer du précipice lundi parce qu’il devenait difficile, même parmi ses partisans, d’ignorer le fait qu’il s’était engagé dans une manœuvre politique sans se soucier de son impact sur le bien-être des Israéliens.

L’absence de budget a imposé de nouvelles réalités douloureuses aux ménages israéliens. Les familles de la classe ouvrière ont perdu la possibilité d’avoir recours au programme national de garderie subventionnée après l’école auxquelles elles avaient recours pour faire garder leurs enfants et garder leurs emplois. Les écoles ont supprimé les camps de jour pendant l’été et certains des plus grands programmes pour les jeunes à risque du pays ont contraints leurs salariés à protester devant la Knesset alors qu’ils fermaient leurs portes. Même l’armée a été confrontée à des milliards de shekels de restrictions budgétaires, et elle prévoit de licencier des officiers.

Il y a un coût politique à un tel mépris du bien-être du public.

Un sondage réalisé lundi par la Treizième chaine a demandé aux Israéliens qui ils tiendraient pour responsable si de nouvelles élections devaient avoir lieu. 59 % ont répondu Netanyahu. Seulement 20 % ont répondu Gantz.

À la question de savoir ce qui a motivé le comportement de Netanyahu, 50 % ont cité ses tentatives de fuir ses problèmes juridiques en s’installant dans le fauteuil du Premier ministre. Seuls 18 % ont choisi l’option du « bien du pays ». (Le reste : 14 % ont cité « les écarts idéologiques avec Kakhol lavan », 10 % ne savaient pas et 8 % ont donné une réponse différente de celles proposées.)

Il n’est pas possible d’atteindre de tels chiffres sans que la désaffection ne touche profondément la base électorale de Netanyahu.

Le fait qu’il ait suspendu le budget de l’État pendant des mois au service de ses manœuvres politiques a contribué à faire pivoter le soutien de la droite au parti Yamina de Naftali Bennett, qui est passé de façon étonnante de six sièges en mai à pas moins de 19 sièges dans les sondages au cours du mois dernier. Durant cette période, le Likud est passé lui dans les sondages de 40 à 27 sièges.

Même ceux qui sont restés fidèles au Likud ces dernières semaines s’agitent.

Dimanche matin, à un jour de l’échéance budgétaire, un responsable du Likud a diffusé un avis sur le groupe WhatsApp des députés Likud, leur expliquant que tout le monde devait se présenter au vote sur le retard budgétaire le lendemain. « Il s’agit [d’un amendement] à une loi fondamentale, nous devons donc l’adopter avec 61 votes », a expliqué le responsable. Les députés ont été invités à confirmer qu’ils avaient bien reçu le message.

C’est-à-dire que même si Netanyahu a mené le pays au bord du précipice, il s’est assuré d’avoir les votes nécessaires pour reculer à la dernière minute.

C’est à ce moment-là que la députée Kati Chetrit a exprimé ce que tout le monde pensait.

« Confirmé », a-t-elle écrit au responsable, ajoutant : « J’espère que tout le monde se présentera et nous épargnera ces élections inutiles. La base est très en colère contre nous ! Je sais que la situation [politique] est très difficile, mais notre situation sur le terrain est très mauvaise.” (Une capture d’écran des commentaires a été divulguée par un membre du groupe à la Douzième chaine).

Lundi soir, Netanyahu a cédé. Il ne pouvait pas prendre le risque d’une élection alors que tant d’Israéliens lui reprochaient le vote ; ils lui reprochaient, en fait, l’impasse générale.

Généreux à l’excès

Depuis son ascension, Netanyahu a essayé de montrer qu’il est un homme châtié – mais sans, même maintenant, avancer le budget dont le pays a grandement besoin. Il semble tenter de trouver un juste milieu en finançant au coup par coup les nombreux programmes manquants et les besoins de tous ceux qu’il a mis en colère, tout en évitant d’adopter un budget qui pourrait le forcer à quitter le fauteuil de Premier ministre.

Mardi, il a publié deux annonces soigneusement conçues pour répondre à la colère de ses électeurs.

« J’ai décidé avec le ministre des Finances Israël Katz et le ministre de l’Education Yoav Gallant de consacrer 300 millions de shekels au financement des subventions pour les garderies après l’école jusqu’à la fin de la prochaine année scolaire. Nous continuerons à vous aider, vous les parents, en encourageant l’emploi et en réduisant le coût de la vie, en particulier alors que nous faisons face à la crise du coronavirus. »

Aucun travail d’équipe n’a précédé cette annonce, survenue mardi à 15h. Aucun responsable du budget n’a soulevé la question à la Knesset. Netanyahu semble avoir été surpris de la gravité des sondages – de l’étendue de sa responsabilité – et d’être retourné voir son équipe pour lui demander où il s’était trompé.

Comme le Times of Israël l’a déjà souligné, la subvention pour les garderies après l’école est l’un des moyens les plus tangibles par lequel un grand nombre de familles de la classe ouvrière ont été mises à l’épreuve par l’impasse budgétaire, une mise à l’épreuve qui a commencé bien avant la pandémie.

Plus tard dans la journée de mardi, il a publié une autre déclaration : « Je m’adresse à présent au ministre des Finances pour lui demander de créer de nouveaux programmes, notamment un impôt négatif sur le revenu pour encourager et rétribuer le travail. Et nous avons d’autres programmes en cours », a-t-il promis.

Quelques sondages choquants et une humiliante défaite aux mains de Gantz ont peut-être été nécessaires pour qu’il pénètre le brouillard de cette guerre politique, mais Netanyahu a fini par remarquer ces Israéliens en difficulté, et s’est annoncé déterminé à soulager leur souffrance économique. Netanyahu avait redécouvert la classe ouvrière.

La loi de report des élections de lundi soir prévoyait 11 milliards de shekels de nouveaux financements pour les ministères afin de combler certaines des lacunes les plus douloureuses ouvertes par l’absence de budget. Quelque 3,3 milliards de shekels seront versés à l’armée, 1,7 milliard à un large éventail d’organisations caritatives et à but non lucratif, notamment les Haredim et les organisations sionistes religieuses, et des centaines de millions supplémentaires pour les yeshivot à court d’argent.

Ces fonds seront destinés à apaiser la colère contre Netanyahu dans ces communautés, et à garantir que les partis Haredim puissent continuer à le soutenir si des élections se profilaient à l’horizon – des partis qui sont de plus en plus en colère contre Netanyahu car leurs yeshivot, fortement dépendantes des subventions gouvernementales dans le meilleur des cas, sombrent dangereusement dans le rouge à cause du gel budgétaire.

Il y a deux points essentiels à souligner à propos de cette nouvelle largesse. Premièrement, Netanyahu ne montre aucun signe de vouloir adopter un budget cohérent pour l’État jusqu’en 2021 – mais répond seulement présent pour atténuer les conséquences les plus douloureuses de l’absence d’un tel budget. Il espère toujours avoir le beurre et l’argent du beurre.

Les tergiversations de Netanyahu avec le budget lui ont coûté plus politiquement – parce qu’elles ont coûté plus aux Israéliens ordinaires en termes réels – que toutes les enquêtes sur la corruption et la politique intempestive de toute sa longue carrière

Deuxièmement, sans vouloir insister sur ce point, l’absence d’un budget aussi cohérent est d’autant plus grave pour le bien-être financier à court terme du pays que les dépenses s’accumulent. On ne sait pas très bien comment chaque nouvelle dépense sera financée. Aucune de ces nouvelles dépenses ne s’inscrit dans une politique cohérente visant à encourager une nouvelle croissance de l’économie, qui a été frappée par le virus.

Cela pourrait encore avoir de graves conséquences, a averti le gouverneur de la Banque d’Israël, Amir Yaron, dans une interview accordée cette semaine au journal économique Calcalist.

« Plus nous nous éloignerons d’un processus budgétaire ordonné – comme les dépenses extrabudgétaires – plus les marchés mettront l’accent, voire beaucoup d’accent, sur les processus de gouvernance » pour déterminer si Israël est un bon investissement, a-t-il averti.

En d’autres termes, les marchés qui déterminent les flux d’investissement dans l’économie israélienne examineront la manière dont les décisions sont prises par les politiciens – ceux-là mêmes qui ont provoqué une impasse politique et fiscale depuis maintenant près de deux ans.

« Les marchés financiers ne se comportent pas de manière linéaire », a déclaré M. Yaron. « Si les marchés ont le sentiment que notre conduite budgétaire n’est pas responsable », le changement risque de s’aggraver « soudainement, alors que nous ne l’attendons pas ».

Pas encore de pardon

Netanyahu essaie de regagner les bonnes grâces des électeurs qu’il a blessés.

Il peut encore restaurer ce soutien en rétablissant les perspectives économiques des familles qu’il a ignorées pendant de longs et douloureux mois.

Mais la loyauté politique est une chose amusante. Les électeurs qui ne sont pas concernés ou même divertis par les angoisses émotionnelles qu’il suscite à gauche ne sont pas si blasés quant à leur propre bien-être. En fin de compte, les Israéliens peuvent pardonner beaucoup à leurs politiciens si leurs politiques sont couronnées de succès et si le public est bien servi. Les tergiversations de Netanyahu avec le budget lui ont coûté plus cher politiquement – parce qu’elles ont coûté plus cher aux Israéliens ordinaires en termes réels – que toutes les enquêtes sur la corruption et la politique intempestive de toute sa longue carrière.

Jeudi matin, un sondage a suggéré que la réalité quotidienne n’avait pas changé, du moins pas dans l’immédiat, avec la nouvelle série de dépenses. Le sondage, réalisé par Panels Politics pour le site d’information Maariv, n’a donné au Likud que 28 sièges. Plus important encore, sa coalition de droite, incluant les religieux, n’obtient que 60 sièges, un de moins que la majorité nécessaire à la Knesset. Inutile de préciser que même cette coalition de droite de 60 sièges n’est plus garantie, Yamina (17 sièges dans le sondage) refusant de dire depuis ces dernières semaines si le parti le soutiendrait lors des prochaines élections.

Selon toutes les factions politiques auxquelles il est possible de le demander, l’adoption d’un budget cohérent couvrant les quatre mois restants en 2020 et sur 2021 – comme l’a réclamé le gouverneur de la Banque d’Israël, Yaron, cette semaine – est la seule chose responsable que Netanyahu puisse faire à ce stade.

C’est aussi en train de devenir la seule voie politiquement viable qui lui reste. Il a déjà essayé toutes les autres options.

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Netanyahu accepte l’accord de compromis qui empêchera un nouveau scrutin

Le Premier ministre dit qu’il soutiendra la proposition visant à repousser l’échéance budgétaire de lundi ; pour Kakhol lavan, le Premier ministre va devoir prouver son engagement

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu fait une déclaration à la presse, le 23 août 2020 (Capture d'écran)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu fait une déclaration à la presse, le 23 août 2020 (Capture d’écran)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé dimanche qu’il acceptera une proposition de compromis visant à reporter l’échéance de l’adoption d’un budget par le gouvernement, ce qui permettra probablement d’éviter la menace immédiate de nouvelles élections.

« Par sens de la responsabilité nationale, j’ai pris la décision d’accepter la proposition de compromis qui a été soumise par le député Zvi Hauser », a-t-il déclaré dans une conférence de presse au bureau du Premier ministre de Jérusalem.

Cette déclaration a été faite alors que la commission des Finances de la Knesset devait voter un projet de loi parrainé par Hauser, membre du parti Derech Eretz, déterminant un report de cent jours de la date-limite fixée pour l’adoption du budget et évitant un quatrième scrutin.

Si la Knesset échoue à approuver ce texte d’ici lundi soir, le gouvernement serait automatiquement dissous et un nouveau scrutin national serait organisé.

« Cette proposition permet l’afflux immédiat de fonds qui seront versés aux citoyens et à l’économie et elle empêchera que de nouvelles élections soient nécessaires », a dit Netanyahu.

En réponse, Kakhol lavan a émis un communiqué disant que Netanyahu devrait joindre l’acte à la parole, lui recommandant avec vivacité de « tenir votre promesse, d’éviter de nouvelles élections et de respecter l’accord » – une référence apparente à l’accord de coalition entre les deux parties.

La Douzième chaîne a noté que Kakhol lavan n’était pas entièrement convaincu que Netanyahu ferait en sorte de mettre un terme à la crise. Des responsables du parti ont confié à la chaîne qu’ils n’en seraient sûrs qu’à l’issue du vote final du texte reportant l’approbation du budget – qui devrait avoir lieu lundi avant minuit.

Hauser, pour sa part, a indiqué qu’il était « heureux d’entendre » que Netanyahu avait accepté sa proposition, mais il a souligné que son projet devait encore être inscrit dans la loi.

Tout en disant à la conférence de presse que le moment était venu « de réaliser l’unité, pas d’organiser des élections », Netanyahu a accusé ses partenaires de Kakhol lavan d’agir comme « un gouvernement au sein du gouvernement », répétant une accusation infondée selon laquelle un dossier pénal contre le ministre de la Justice, Avi Nissenkorn, avait été secrètement fermé par le procureur-général Avichai Mandelblit – le procureur général que le chef du gouvernement et ses alliés ont fréquemment raillé suite à l’inculpation du chef du gouvernement dans une série d’affaires de corruption. Et si un tel dossier avait impliqué un politicien de droite, a insisté Netanyahu, nul doute qu’il aurait envahi les médias.

Nissenkorn a écrit en réponse sur Twitter : « Cette campagne d’incitations et de mensonges, lancée au moment choisi, ne me dissuadera pas et je continuerai à protéger l’Etat de droit et la démocratie israélienne ».

Netanyahu a expliqué qu’Israël devait « oeuvrer de concert » à relever les défis et notamment dans la bataille contre la COVID-19 et ses conséquences économiques, que le pays devait déjouer les plans de l’Iran, renforcer la sécurité et conclure de nouveaux accords de normalisation avec les Etats arabes.

« Unissons-nous et travaillons tous ensemble à attendre ces objectifs importants », a-t-il déclaré.

Il a également demandé au parti national-religieux Yamina de rejoindre le gouvernement – une offre qui aurait été ultérieurement rejetée par la formation.

« Netanyahu a précipité Yamina dans l’opposition et il a démantelé le camp  de la droite », auraient expliqué des sources du parti, des propos repris par le site d’information Srugim.

Dans un exemple de relation dysfonctionnelle entre lui et Kakhol lavan, son parti rival de coalition, Netanyahu a indiqué, en réponse à une question, qu’il n’avait pas informé Gantz de sa décision d’accepter la proposition évitant un nouveau scrutin en amont de la conférence de presse.

Il a été aussi demandé à Netanyahu s’il y aurait une nouvelle crise potentielle d’ici trois mois et s’il céderait le poste de Premier ministre à Gantz, au mois de novembre 2021, comme promis dans l’accord. Il a répliqué que les crises étaient évitables si le gouvernement fonctionnait correctement.

Avant la conférence de presse, un communiqué de Kakhol lavan avait appelé Netanyahu à « se ressaisir et à s’intéresser à nouveau à ce qui est bon pour le pays, plutôt qu’à ce qui est bon pour lui. Alors que neuf millions de citoyens recherchent l’unité et qu’ils veulent que les défis sécuritaires et le coronavirus soient pris en charge, le Likud, pour sa part, s’affaire à rechercher des stratagèmes politiques ».

En plus du report de l’approbation du budget, des informations ont laissé entendre que le compromis qui a été proposé permettra aussi aux parties d’approuver des dépenses supplémentaires tout en planchant sur le nouveau budget ; qu’elles conviendront de se concentrer sur la gestion de la pandémie de coronavirus et sur l’épidémie de grippe durant l’hiver ainsi que sur les menaces sécuritaires potentielles sur les frontières nord et sud. Elles formeront également une commission qui sera chargée de réfléchir à la manière dont les hauts-responsables sont nommés à leurs postes.

Aucune désignation à des fonctions de haute responsabilité ne sera effectuée jusqu’à ce que la commission présente ses conclusions mais la Douzième chaîne a fait savoir, dimanche, que le Likud réclamait une exception pour la sélection d’un nouveau chef pour la police. Netanyahu a démenti cette information.

Si le projet de loi de Hauser est voté en commission des Finances du parlement, dimanche soir, il devra alors être approuvé en deuxième et troisième lectures avant d’intégrer l’arsenal législatif israélien.

L’annonce faite par Netanyahu, dimanche soir, a eu lieu après que ses alliés de coalition ultra-orthodoxes, les partis Shas et Yahadout HaTorah, ont expliqué qu’un accord de compromis avait été adopté avec le soutien du Likud et de Kakhol lavan.

Selon des informations parues dans les médias en hébreu, les deux formations ont obtenu l’approbation d’un budget de 400 millions de shekels supplémentaires pour les yeshivot ultra-orthodoxes qui sont en manque grave de financement en l’absence d’un budget.

Cette absence de budget signifie également que le gouvernement travaille conformément au budget de 2019 – avec une dépense se limitant à 50 % du total des fonds mensuels définis pour l’année dernière. Les médias ont noté que la loi sur le report inclurait une clause qui déterminera une augmentation des fonds de 2,5 % pour 2020 par rapport à 2019. Une partie de cet argent sera allouée aux séminaires ultra-orthodoxes.

Peu avant la prise de parole de Netanyahu, la Treizième chaîne avait donné les résultats d’un sondage montrant le Likud chuter de 36 à 31 sièges à la Knesset si de nouvelles élections avaient lieu aujourd’hui.

Après le Likud, arriverait la formation Yesh Atid du leader de l’opposition, Yair Lapid (19 sièges), suivie par le parti national religieux Yamina – autrefois allié de Netanyahu, mais qui n’a pas intégré le gouvernement (18 sièges), faisant une percée notable.

La Liste arabe unie tomberait, pour sa part, de 15 à 13 sièges. Kakhol lavan n’en rassemblerait que 11.

Le parti laïc de droite d’Avigdor Liberman, Yisrael Beytenu, engrangerait huit sièges, tandis que Shas et Yahadout HaTorah en obtiendraient sept chacun et le Meretz de gauche 6.

Les formations Travailliste, Derech Eretz, Gesher et HaBayit HaYehudi ne parviendraient pas à franchir le seuil électoral.

Dans l’ensemble, le sondage avait accordé aux partis de droite et religieux 63 sièges, ce qui est suffisant pour former une majorité en y incluant Yamina.

Selon l’enquête d’opinion, 50 % des personnes interrogées étaient persuadées que « le facteur principal » influençant les décisions politiques de Netanyahu était « son avenir judiciaire » et seulement 18 % estimaient que sa motivation concernait « les intérêts de l’Etat ».

S’il y avait des élections aujourd’hui, avait encore révélé le sondage, 59 % en attribueraient la responsabilité à Netanyahu et 20 % à Gantz.

Au coeur de la crise, l’adoption d’un budget par le gouvernement. Le leader de Kakhol lavan, Benny Gantz, insiste sur l’adoption d’un budget courant sur 2020 et 2021 – comme le stipule l’accord conclu entre les deux partenaires de coalition – tandis que le Premier ministre Benjamin Netanyahu répète, pour sa part, que seul un budget couvrant le reste de l’année 2020 doit être approuvé, citant l’incertitude entraînée par la pandémie de coronavirus.

Kakhol lavan accuse Netanyahu de tenter de contrevenir à l’accord de coalition de manière délibérée avec sa demande soudaine portant sur un budget d’un an pour se laisser la possibilité, à l’avenir, de dissoudre le gouvernement – ce qui lui éviterait d’honorer l’accord de partage du pouvoir souscrit avec Gantz, auquel il devra abandonner, sous les dispositions prévues, le poste de Premier ministre au mois de novembre 2021.

Netanyahu réclamerait un plus grand pouvoir sur les nominations des hauts-responsables, notamment dans le secteur de la justice, en contradiction avant les accords qui avaient été conclus précédemment. En réponse à une question, dimanche soir, il a dit qu’il n’avait pas l’intention de chercher à nommer un nouveau commissaire de police et un nouveau procureur d’Etat.

Le ministre des Affaires étrangères, Gabi Ashkenazi, qui appartient aux rangs de Kakhol lavan, a estimé samedi que Netanyahu cherchait à ce que de nouvelles élections soient organisées pour « des raisons personnelles et judiciaires » liées à son procès, laissant entendre qu’il espérait qu’une nouvelle Knesset pourrait lui apporter une majorité de députés désireux de soutenir une législation susceptibles de déjouer les procédures lancées à son encontre dans trois dossiers pour corruption.

D’éminents économistes ont estimé qu’un budget englobant à la fois 2020 et 2021 était le plus raisonnable dans la mesure où il y avait peu d’intérêt à voter un budget 2020 à quelques mois seulement de la fin de l’année. Netanyahu dit ne pas être d’accord, citant le contexte d’incertitudes lié à la crise du coronavirus.

Le président Reuven Rivlin a discuté, ces derniers jours, avec les partenaires de coalition dans le but d’empêcher de nouvelles élections, a indiqué jeudi un communiqué de la résidence du président.

 

 

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