IRAN / ARABIE SAOUDITE : la tension au plus haut

L’ambassade saoudienne incendiée à Téhéran Mohammadreza Nadimi/AP/SIPAL'ambassade saoudienne incendiée à Téhéran Mohammadreza Nadimi/AP/SIPA

La tension au plus haut entre l’Iran et l’Arabie Saoudite

Pascal Riché

Après l’exécution d’un dignitaire chiite par le royaume wahhabite, l’ambassade saoudienne à Téhéran a été incendiée. En réponse, l’Arabie saoudite a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Iran.

Déjà extrêmement tendues, les relations entre les deux principales puissances au Moyen Orient, l’Iran et l’Arabie tournent désormais au conflit ouvert. Samedi soir, des manifestants iraniens ont mis à sac et incendié à coup de cocktails Molotov l’ambassade saoudienne à Téhéran. L’Arabie saoudite a répliqué en annonçant la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Iran.

 

#Que s’est-il passé ?

Des manifestants ont pénétré dans l’ambassade saoudienne à Téhéran, brisé des fenêtres et des meubles. Ils protestaient contre l’exécution, annoncée plus tôt dans la journée, par Riyad, d’un éminent responsable religieux chiite, le Cheikh Nimr Baqir al-Nimr, qui se battait depuis longtemps contre le traitement de la minorité chiite dans le royaume. Considéré par les Saoudiens comme un terroriste, Le Cheikh al-Nimr a été exécuté avec 46 autres personnes : des combattant d’Al Qaeda pour la plupart, mais aussi quelques militants chiites accusés de violences contre la police lors de manifestations.

L’exécution du Cheikh al-Nimr a soulevé la colère de l’ensemble du monde chiite, que ce soit au Liban, au Yémen, en Irak au Barheïn ou en Iran. Téhéran a qualifiée la politique saoudienne d’irresponsable et annoncé que ceux qui la soutenaient en  subiraient les « conséquences ».  « Le gouvernement Saoudien devra payer pour la poursuite de cette politique », a ajouté le porte-parole du ministère iranien des affaires étrangères, Hossein Jaberi-Ansari. L’ayatollah (conservateur) Ahmad Khatami a dénoncé le « fonctionnement criminel » de la famille Al-Saoud, et le « régime infâme » qu’elle dirige : Je ne doute pas que ce sang pur tachera la maison Al-Saoud et qu’ils seront balayés des pages de l’histoire. »

A la suite de ces déclarations, Riyad avait d’abord convoqué samedi l’ambassadeur d’Iran pour protester. Mais dimanche matin, l’escalade s’est poursuivie, l’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de l’Iran, promettant une « vengeance divine » : Sans aucun doute, le sang de ce martyr versé injustement portera ses fruits et la main divine le vengera des dirigeants saoudiens. Ce savant opprimé n’a ni encouragé les gens à prendre les armes ni comploté de manière secrète, il a seulement porté ouvertement des critiques. Dieu ne pardonnera pas le sang versé de cet innocent. »

Ultime réponse de l’Arabie saoudite ce dimanche soir, avec l’annonce par le royaume de la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Iran.

#Qui était le cheikh al-Nimr ?

Une affiche montrant le Cheikh al-NimrAgé de 56 ans, c’est un prêcheur célèbre dans le monde chiite, notamment pour le rôle qu’il a joué à partir de 2011, au moment des révolutions arabes, à Qatif , dans l’est, un port stratégique. Il a participé à plusieurs manifestations contre le régime saoudien et multiplié les prêches contestataires.

L’Arabie saoudite, qui a craint une sécession de l’est du royaume, une région que le Cheikh Al-Nimr proposait alors de fusionner avec Bahreïn, pays à majorité chiite mais dirigé par des sunnites, a considéré le prédicateur comme une menace. Lorsque fin juin 2012 Nimr s’est réjoui de la mort du ministre de l’intérieur, le prince Nayef ben Abdulaziz, héritier du trône (« Que les vers le mangent ! »), c’en était trop : il a été arrêté le 8 juillet et il a été condamné deux ans plus tard à la décapitation par un tribunal antiterroriste. Son neveu, Ali al-Nimr, arrêté lui aussi alors qu’il était mineur, a également été condamné à mort, ce qui a soulevé une indignation internationale. Le jeune homme ne fait pas partie des personnes exécutées cette semaine.

Les Saoudiens, avant l’incendie, avaient indiqué qu’ils tiendraient les Iraniens responsables de toute attaque éventuelle contre leurs bâtiments diplomatiques ou consulaires.  Les responsables iraniens, de leur côté, présentent ce mouvement de foule vers l’ambassade comme une réaction spontanée. Quarante personnes ont été arrêtées et une enquête a été ouverte pour comprendre les circonstances de l’incident, a indiqué dimanche matin Abbas Jafari Dolatabadi, le procureur de Téhéran. A noter qu’un autre bâtiment saoudien a été attaqué samedi, celui qui abrite le consulat de Mashhad.

#Pourquoi les relations sont-elles si tendues entre Iran et Arabie Saoudite ?

L’Arabie Saoudite, dirigée par une monarchie sunnite et l’Iran chiite sont les deux puissances rivales de la région. Toutes deux sont dirigés par des islamistes, toutes deux sont productrices de pétrole, toutes deux ont des prétentions sur la région. L’Arabie Saoudite craint l’Iran, qui rêve ouvertement de destabiliser la famille al-Saoud. Le pays compte 2 millions de chiites (sur une population de 18 millions de personnes), principalement dans l’est du pays.

L’accord interimaire trouvé fin 2013 entre les Etats-Unis et l’Iran sur le nucléaire a exacerbé cette rivalité, l’Arabie Saoudite s’estimant trahi par l’allié américain. En exécutant le dignitaire Nimr al-Nimr, Riyad cherche à afficher sa détermination face aux Iraniens. Les deux pays s’opposent notamment en Syrie et au Yemen.

  • En Syrie, l’Iran soutient Bachar el Assad et le Hezbollah, tandis que l’Arabie Saoudite participe à la coalition internationale menée par les Etats-Unis et dénonce la présence d’Iraniens « sur des terres arabe ».
  • Au Yemen, « l’arrière cour de l’Arabie Saoudite », Riyad bombarde depuis mars les rebelles chiites Houthis que soutient Téhéran. Fin avril, Mohammad Ali Jafari, commandant de la Garde révolutionnaire iranienne a pronostiqué « l’effondrement de la maison Saoud (…) dans le sillage de l’Etat sioniste ».

L’Arabie Saoudite est l’allié historique des occidentaux. L’exécution du Cheikh Nimr al-Nimr a été condamnée dans des termes extrêmement modérés par ces derniers. Dans un communiqué, le département d’Etat du américain connsidère que Riyad « prend le risque d’exacerber les tensions communautaires alors qu’il serait actuellement urgent de les réduire ».

Certains diplomates sont allés plus loin : dans un tweet vite supprimé, l’ambassadeur de France à Washington, Gérard Araud, a expliqué maladroitement l’incendie de l’ambassade saoudienne à Téhéran :  « l’Iran était obligé de réagir. Brûler une ambassade est spectaculaire, mais ce n’est pas la guerre ».

La mort du cheikh El-Nimr fait vaciller le régime des Saoud

La monarchie saoudienne est aujourd’hui une dictature anachronique : elle est propriétaire du pays comme jadis le roi des Belges, Léopold II, était propriétaire en nom personnel du Congo. Bien sûr, ce régime se sait menacé et se maintient par la terreur. Cependant l’exécution du cheikh chiite El-Nimr aura probablement l’effet inverse. D’ores et déjà, l’Iran se tient prêt à soutenir une révolte chiite dans cet État wahhabite.

 

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Opposant à la pétro-dictature saoudienne, le cheikh Nimr Baqr al-Nimr a été exécuté le 2 janvier 2016 pour « sédition, appel au renversement de l’État, désobéissance à l’imam du royaume et à son gouverneur ».

Le drame de La Mecque, la guerre au Yémen qui se prolonge, des réserves de devises qui fondent : les soucis s’accumulent pour le roi Salman d’Arabie saoudite, au point que son autorité devient sans cesse plus contestée. Mais outre cette guerre ouverte pour le pouvoir, le Royaume vient de franchir un pas qui aura de graves conséquences tant sur le plan intérieur que sur le plan régional.

Le roi Salman vient en effet de faire exécuter 47 opposants en punition de prétendus crimes terroristes : or le seul crime de nombre de ces suppliciés était d’être chiites dans un royaume wahhabite et de s’opposer à sa politique d’oppression contre cette population depuis de longues années, dont les pressions économiques.

Cheikh El-Nimr était un religieux de renom qui professait dans plusieurs universités et dénonçait la corruption qui touche le régime saoudien à tous les niveaux du pouvoir. Il prônait la création d’une opposition constructive et « réfléchie » qui puisse s’exprimer librement sur les difficultés et les défauts du régime, et cependant, malgré ses critiques sans concessions, il n’a à aucun moment appelé au renversement de ce pouvoir.

Le cheikh El-Nimr dénonçait l’oppression et la confiscation des moyens et des richesses du pays par un clan, que ses membres dilapident pour satisfaire leurs plaisirs et engager des projets inconsidérés mettant en péril la vie entre les différentes communautés. Il reprochait au régime son désintérêt total sinon son attitude, selon lui inacceptable, vis-à-vis d’Ahl El Beit (les descendants du prophète Mahomet), au point de détruire leurs tombes.

Les autorités saoudiennes avaient procédé à son arrestation à plusieurs reprises en croyant le faire plier, mais sans succès. C’est à l’occasion des manifestations d’Al-Qatif (à l’Est du pays), dans la foulée ce qui a été appelé le « printemps arabe » que le cheikh Al-Nimr a été mis aux arrêts, puis qu’un dossier a été monté pour lui signifier des accusations pour actes terroristes !

Cette arrestation paraît d’autant plus saugrenue qu’elle a été commise alors que l’Arabie saoudite menait une campagne politique et militaire tendant à déstabiliser la République arabe syrienne au prétexte qu’elle manquait de démocratie…

C’est un communiqué du ministère de l’Intérieur saoudien qui a révélé cette exécution sommaire, « rappelant la décision de la Cour suprême rendue le 15 octobre dernier qui avance comme raisons principales la sédition, l’appel au renversement de l’État, et la désobéissance à l’imam du royaume et à son gouverneur ».

La Cour saoudienne avait alors taxé cheikh El-Nimr de « mal qui ne peut être déraciné qu’en le tuant ». Dès le prononcé de cet arrêt, des déclarations dénonçant les conditions dans lesquelles cette décision a été rendue ont été faites, et avertissaient le régime saoudien des conséquences de l’exécution du cheikh.

Le royaume n’a jamais toléré la critique

Déjà au début des années 80, un ingénieur de l’industrie du pétrole, Khaled Al-Nuzha, avait réclamé une juste répartition des richesses, ce qui lui valut de mourir sous la torture. Abderrahman Al-Mounif, romancier, décrivait les ravages que du pétrole dans la politique et les sociétés arabes. Il disait que cette richesse archaïque n’allait pas durer, que les villes allaient finir par s’effondrer comme des châteaux de cartes ou des « villes de sel ».

Le blogueur Raif Badaoui, fondateur du site Free Saoudi Liberals, a été condamné pour cybercrime de blasphème à 10 ans de prison, 1 000 coups de fouet, et 266 000 dollars d’amende.

Quant au fonctionnement du royaume, le nouveau roi a chamboulé l’ordre de succession en propulsant notamment son fils Mohammed ben Salmane au poste de vice-prince héritier, malgré son jeune âge et son peu d’expérience.

Un texte a récemment circulé, écrit par quelqu’un qui se présente comme un prince et petit-fils du roi Abdelaziz, fondateur du royaume. Le document suggère au roi Salmane d’abdiquer, « et il semble que l’auteur de cet appel ait reçu des soutiens parmi ses pairs. Il dit tout haut ce que des Saoudiens ordinaires ne peuvent que penser tout bas s’ils ne veulent pas finir en prison et se faire flageller », indique The Guardian [1]

L’article pointe l’absence presque totale d’instances de médiation politique et de société civile : « Même une association caritative aura besoin d’attendre des années pour être enregistrée. Il aura fallu dix-sept ans à une association qui s’occupe du diabète pour se faire enregistrer. Il suffit que des médecins ou des comptables souhaitent se réunir pour que le régime devienne nerveux ».

Pour l’auteur de l’article, le spécialiste du Proche-Orient Brian Whitaker, l’aspect autocratique du régime constitue un problème fondamental. Nul besoin d’en référer à quiconque pour prendre une décision, et il peut arriver au roi Salmane de faire des choix inconsidérés, « ce qui risque d’avoir de lourdes conséquences pour l’avenir du pays ». Et de souligner que, pour les Saoudiens, dépenser sans compter est devenu la solution à tous les problèmes.

« Même si les Saoudiens ont les poches encore bien remplies, cela ne pourra pas durer éternellement. Le drame de La Mecque a été un révélateur : des sommes considérables ont été dépensées pour des constructions de prestige, et pour rendre le pèlerinage, en théorie, plus sûr !… »

Des guerres absurdes au Yémen et à Bahreïn

Le nouveau roi Salmane, arrivé sur le trône en janvier dernier, a fait fi de la prudence qui caractérisait les dirigeants saoudiens , puisqu’ils préféraient œuvrer jusqu’alors en sous-marin, ou évitaient l’affrontement direct avec ce qu’ils considéraient comme leurs ennemis. Ils ont toujours cru pouvoir tout acheter, la guerre comme la paix ! Actuellement le roi dépense sans compter les réserves du royaume, en plus de lancer le pays dans une guerre impossible à gagner au Yémen.

Depuis le 26 mars, une coalition militaire menée par l’Arabie saoudite bombarde le Yémen [2]. Elle prétend agir à la demande du président Abd Rabbo Mansour Hadi, chassé du pays par une rébellion et réfugié à Riyad. Le prétexte en est que les rebelles houthistes, cibles des bombardements, seraient soutenus par l’Iran, rival de l’Arabie saoudite dans la région. Les frappes ont jusqu’ici échoué à les repousser significativement.

Les violences dans le pays, puis les bombardements aériens, ont fait au moins 767 morts et 2 900 blessés depuis le 19 mars, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui fait savoir que le bilan réel est plus élevé. Au moins 405 civils ont été tués par les frappes, selon l’Organisation des Nations unies (ONU), et plus de 120 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays, qui s’ajoutent à 300 000 autres déplacés qui avaient fui avant même l’intensification des combats. Le pays manque de vivres, de médicaments pour les malades chroniques, de carburant.

Le président Mansour Hadi a quitté le pays en mars, après avoir été chassé de la capitale, Sanaa, puis du grand port d’Aden, dans le sud. Les milices houthistes avaient pris le contrôle de la capitale dès le mois de septembre. Elles sont alliées à l’ancien président Ali Abdallah Saleh, qui a dirigé le pays jusqu’en 2012 et a quitté le pouvoir après un accord conclu, sous l’égide des Saoudiens encore, dans la foulée du « printemps arabe ».

En effet, les rebelles ont conquis l’essentiel du pays en se présentant à juste titre comme « le mouvement des déshérités ». Ils ont mené une révolution.

Les ingérences étrangères n’ont jamais cessé. L’Arabie saoudite mène de longue date une politique d’affaiblissement de son voisin. Le seul bénéficiaire de cette ingérence a été le développement d’Al-Qaida dans la péninsule arabique (AQPA), sise au Yémen, qui s’est imposée comme la principale branche du groupe djihadiste [3]

Les Saoudiens mènent cette guerre destructrice des humains et des infrastructures dans un pays déjà exsangue. Malgré les moyens mis en œuvre rien n’avance sur le terrain. Bien au contraire leurs troupes subissent au quotidien des revers et sont même attaquées en territoire saoudien. Les Saoudiens doivent faire appel à des mercenaires pour faire face à la résistance yéménite. L’échec paraît total et ne bénéficie plus d’aucun soutien.

Rappelons que cette attaque saoudienne devait être le rassemblement des pays sunnites de la région avec la participation du Pakistan et de la Turquie, mais à l’arrivée, cette coalition s’est réduite à une peau de chagrin et n’est composée que de quelques pays du Golfe dont les forces s’épuisent au fur et à mesure [4].

Son intervention directe au Bahreïn n’a pas eu plus de succès, puisque la révolte de l’opposition majoritaire ne faiblit pas malgré la machine oppressive mise en place par l’Arabie saoudite et ses alliés [5].

La guerre en Syrie

Depuis plus de quatre ans la guerre s’est installée en Syrie, nul n’ignore qu’elle n’aurait jamais eu lieu sans la participation active de l’Arabie saoudite qui n’a pas lésiné sur les moyens. Tous les moyens ont été mis à disposition de ceux qui étaient prêts à se battre contre le président Bachar El-Assad.

Les armes sont achetées en quantité et qualité insoupçonnables et livrées indifféremment à travers les frontières entre la Syrie et la Jordanie, la Turquie et au début de la guerre, le Liban. Les médias financés par les Saoudiens ont été mis à contribution, sans oublier les mercenaires financés à coût de millions de dollars et sans compter [6]

Dernièrement, constatant que les choses ne vont pas dans la direction qu’il avait envisagée, notamment depuis l’intervention de tous les alliés de la Syrie sur le terrain, le Hezbollah, l’Iran et enfin la Russie, le royaume saoudien cherche à faire capoter les solutions politiques en se considérant comme l’organisateur de l’opposition censée participer aux négociations avec le gouvernement syrien.

Dernièrement, une cinquantaine de religieux saoudiens ont appelé les pays arabes et musulmans à soutenir les acteurs du « jihad » en Syrie contre le pouvoir de Bachar al-Assad et ses alliés russe et iranien.

Le communiqué mis en ligne lundi 5 octobre 2015 par l’Union internationale des oulémas musulmans ne prête pas à équivoque. « Nous appelons l’Oumma (la nation musulmane) à refuser l’intervention russe en Syrie en apportant un soutien moral, politique et militaire à la révolution du peuple syrien » [7].

L’appel est signé par plus de 50 religieux saoudiens dont des figures du mouvement islamiste. Ces oulémas, qui ne sont pas affiliés aux autorités saoudiennes, comparent l’intervention russe à l’entrée de l’armée soviétique en 1979 en Afghanistan qu’ils qualifient d’« invasion »

L’appel lancé à partir de Doha au Qatar fait écho à la position saoudienne. Ryad a déjà dénoncé le déclenchement, le 30 septembre 2015, de l’intervention de l’aviation russe en Syrie en soutien au régime de Bachar al-Assad. L’appel à la « guerre sainte » lancé par les religieux saoudiens rejoint aussi celui du clergé officiel saoudien qui a déjà qualifié la guerre civile en Syrie de jihad.

Les oulémas islamistes se gardent bien de contredire ouvertement la ligne du royaume wahhabite. Ils n’appellent pas nommément les Saoudiens à combattre aux côtés de « leurs frères syriens » mais demandent un soutien militaire à l’opposition face à l’intervention russe qualifiée de « croisade chrétienne orthodoxe en terre d’islam ».

Le jour même, une quarantaine de groupes dits rebelles syriens dont l’Armée syrienne libre (ASL), soutenue par les Occidentaux, ont appelé à la formation d’une alliance régionale pour lutter contre « l’occupation russo-iranienne de la Syrie ».

Il s’agit du dernier soubresaut de la stratégie saoudienne.

À ces échecs il faut ajouter la bousculade mortelle de La Mecque, au cours de laquelle plus de 1 800 personnes sont mortes, le bilan initial de 717 morts n’a cessé d’être revu à la hausse [8]

Au cours de cette bousculade, des dignitaires iraniens ont été tués : là aussi, les autorités saoudiennes ont refusé de communiquer sur cette tragédie, alors que des bruits circulaient sur l’origine organisée de cette affaire devenue une affaire entre États [9]. Le sens de la retenue dont on fait preuve les dirigeants iraniens ne devrait néanmoins pas s’interpréter comme un signe de faiblesse.

La République islamique d’Iran s’est habituée à ne pas mélanger les dossiers et les contentieux. Ses avertissements ne devaient pas être pris à la légère par les Saoudiens. C’est ainsi que les Iranien ont refusé, lors des négociations sur leur leur industrie nucléaire, de traiter de la Syrie ou leur position à l’égard d’Israël.

Pour ses fidèles, le cheikh El-Nimr a le statut de martyr, car il appartient à un courant de pensée et de croyance qui prend le martyr de l’imam Hussein comme l’exemple de lutte du Bien contre le Mal ; son exécution ne fera que rappeler que les comptes du royaume saoudien avec les Iraniens ne sont pas encore soldés.

Le Liban face à la crise d

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