À l’OCI, les pays musulmans condamnent l’Iran :
Les crispations durant le sommet des pays musulmans témoignent des divergences autour de la question syrienne sur fond de tensions entre chiites et sunnites.
Le sommet de l’Organisation de la coopération islamique s’est clôturé, ce vendredi à Istanbul, sur fond de tension entre l’Iran chiite et l’Arabie saoudite sunnite. Dans leur déclaration finale, les dirigeants de plus de 50 pays musulmans ont accusé Téhéran de soutenir le terrorisme et d’interférer dans les affaires intérieures des États musulmans de la région, dont la Syrie et le Yémen.
Le texte en 218 points a «déploré l’ingérence de l’Iran dans les affaires intérieures des États de la région et des autres États membres, y compris au Bahreïn, au Yémen, en Syrie, et en Somalie, et a dénoncé son soutien continu au terrorisme». Il a également condamné «les agressions contre les missions diplomatiques du Royaume d’Arabie Saoudite à Téhéran et Machhad en Iran» et «a rejeté les déclarations incendiaires de l’Iran consécutives à l’exécution des jugements prononcés contre les auteurs de crimes terroristes au Royaume d’Arabie Saoudite, considérant ces déclarations comme une ingérence flagrante dans les affaires intérieures du Royaume d’Arabie Saoudite».
La Syrie au cœur des crispations
L’Arabie saoudite sunnite et l’Iran chiite – respectivement représentées à Istanbul par le roi Salmane et le président Rohani- ont suspendu leurs relations diplomatique en janvier dernier après une attaque contre l’ambassade saoudienne à Téhéran par des Iraniens qui protestaient contre l’exécution d’un opposant chiite saoudien.
Les deux pays étaient déjà en froid sur la question syrienne – Téhéran soutenant le président Assad et Riyad appuyant la rébellion – et sur la question du Yémen – où ils se font la guerre par acteurs interposés -. La mort, en septembre 2015, de plus de 400 Iraniens lors d’une bousculade survenue à la Mecque, a également pesé dans la détérioration de leurs relations, Téhéran accusant Riyad d’avoir mal protégé ses pèlerins.
Éviter les messages de division
Anticipant l’offensive du Royaume saoudien, dont l’ombre pèse sur la déclaration, Hassan Rohani a esquivé, ce vendredi, la séance de clôture du sommet de l’OCI. Dans son allocution de la veille, le président iranien avait exhorté les représentants du sommet d’éviter d’envoyer des messages de division. «Aucun message qui alimenterait la division de la communauté islamique ne devrait émerger de cette conférence», avait-il déclaré. Voulant profiter de son status d’hôte pour redorer son blason, terni par ses récentes postures politiques, Recep Tayyip Erdogan – qui a, par ailleurs reçu en grande pompe le roi saoudien – avait, pour sa part, appelé à l’unité des musulmans. «Le défi principal que nous devons surmonter, c’est le confessionnalisme. Ma religion n’est pas le sunnisme ou le chiisme. C’est l’islam», avait-il précisé. Or, c’est tout le contraire qui s’est produit.
Les échos qui émanent du périmètre ultra-sécurisé où se déroulait le sommet vont tous dans le même sens: Riyad a pesé de tout son poids dans la tonalité de la déclaration, contraignant les participants à se ranger derrière l’Arabie saoudite sunnite. De quoi pousser certains observateurs à s’étonner de la «politique de deux poids deux mesures de l’Organisation de la Coopération islamique». «L’OCI (dit que) l’Iran et le Hezbollah interfèrent dans les affaires de la Syrie. Quid de la Turquie, de l’Arabie saoudite et du Qatar?», remarque le journaliste turc Husnu Mahalli sur son compte twitter. «L’OIC a condamné les Iraniens pour leur ingérence au Yémen. Mais aucun mot sur l’Arabie saoudite qui bombarde le Yémen depuis des mois», estime, pour sa part, Erdal Güven, le rédacteur en chef de Diken.