Qui est israélite ? La question divise encore et toujours Israël…

David, immigrant de l'ex-URSS (en pull bleu) témoigne devant la commission de l'Alyah de la Knesset. Depuis la gauche, sont également présent le rabbin de Giyur KaHalacha Seth Farber, Eli Cohen, directeur, et l'avocat Elad Caplan. A Jérusalem, le 8 mars 2016. (Crédit : Michael Shapochnic, Giyur KaHalacha)Ruth la Moabite n’aurait pas été convertie aujourd’hui’

Des élus appellent le gouvernement à reconnaître les conversions indépendantes

Une réunion de commission tendue discute de la “bombe à retardement” des 350 000 immigrants de l’ex-URSS qui ne peuvent pas se convertir au judaïsme via les autorités religieuses de l’Etat

Né en Moldavie, David a immigré en Israël avec sa famille quand il était enfant en 1987, quand ils se sont qualifiés pour la citoyenneté par la Loi du Retour. Mais pas en tant que juifs. « Là-bas, nous étions juifs, » a déclaré mardi David à la Knesset, faisant référence au pays de sa naissance. Sous bien des aspects, sa famille recouvre la géographie des juifs d’Europe de l’Est : il est né en Moldavie, ses parents en Roumanie, et ses grands-parents, dont deux étaient juifs, en Russie.

A la réunion de la commission sur l’alyah, l’intégration et la diaspora, David a raconté que ce n’est qu’adolescent qu’il a commencé à se poser la question de son identité vis-à-vis du judaïsme et de l’Etat juif. « J’ai commencé à comprendre lentement que je n’étais pas juif, à demander lentement pourquoi nous étions venus ici, en Israël ? Sommes-nous juifs ? Pourquoi n’avons-nous pas les fêtes à la maison ? Tout le monde ne pose pas ces questions – et les parents n’ont pas toujours les réponses, » a dit David. ‘Ma mère n’allume pas de bougies à Shabbat, mais ma fille le fera. Je n’ai pas fait ma bar-mitzvah, mais mon fils la fera’

David a passé une année à Yemin Orde, un village de jeunes pré-militaires qui aide les jeunes immigrants à s’intégrer dans la société israélienne, où il a appris à placer son statut halachique dans une perspective historique juive. Quand il a rejoint l’armée l’année suivante, dons l’unité d’élite Duvdevan, il est également entré dans Netiv, son programme de conversion, dont l’état d’esprit est « ma mère n’allume pas de bougies à Shabbat, mais ma fille le fera. Je n’ai pas fait ma bar-mitzvah, mais mon fils la fera ».

David a déclaré que le programme Netiv était très inclusif, et que le message qui lui a été donné était : « Vous êtes juifs, mais devez corrigez quelque chose. Nous sommes dans le même bateau. » Après quatre ans d’étude, pendant lesquelles il a dit à sa mère qu’il ne pouvait plus manger sa cuisine, a étudié, et a effectué une mission post-armée obligatoire dans une yeshiva, il a été rejeté pendant ce qui devait être sa présentation finale devant un tribunal rabbinique. A cause du stress de l’occasion, David dit qu’il a mal répondu à quelques questions sur la halakha, la loi religieuse juive. « Ils m’ont regardé comme si j’étais la dernière personne vivante qui devrait être juive, » a déclaré David. Il lui a été dit qu’il réussirait « sûrement » la prochaine fois. David a dit que la majorité de sa classe Netiv n’a pas réussi, même après trois ou quatre présentations.

Actuellement, seuls 30 à 40 % de ceux qui commencent un programme de conversion des autorités de l’Etat restent jusqu’à la conversion. Seulement 50 % qui restent passent le premier entretien avec le tribunal rabbinique, « et c’est à cause de l’approche des tribunaux rabbiniques, » a déclaré le professeur Binyamin Ish Shalom, militant de la conversion de longue date.

Avec 350 000 immigrants non juifs de l’ex Union des républiques socialistes soviétique (URSS) en Israël et 100 000 enfants de la seconde génération non juifs, la réunion de la commission de la Knesset a discuté mardi de cette « bombe à retardement » : l’incapacité systématique des autorités religieuses établies à mener ses cohortes jusqu’à la conversion, et la privation de droits de milliers de citoyens israéliens qui en résulte.

Largement pointée d’un doigt acrimonieux, la commission tendue de mardi à la Knesset réunissait des politiciens poussant pour une solution pour les citoyens israéliens de culture juive, et des rabbins disant que l’autorité de conversion actuelle est la meilleure solution – ou le plus grand obstacle. ‘Je connais des gens qui ont quitté le pays après leur échec au tribunal rabbinique’

Après le rejet du tribunal rabbinique, a dit David, il s’est senti « distancié » du judaïsme, émotionnellement et spirituellement. « Je connais des gens qui ont quitté le pays après leur échec au tribunal rabbinique », a-t-il déclaré. David a finalement réussi une conversion halakhique au judaïsme – bien qu’il ne soit toujours pas considéré comme juif par l’état civil d’Israël, ni par ses autorités religieuses.

Avec des demandes de plus en plus inflexibles des autorités de l’Etat, les dernières années ont vu l’avancée de tribunaux de conversions indépendants non reconnus mais halakhiques, comme le controversé tribunal ultra-orthodoxe de Bnei Brak du rabbin Nissim Kurelitz, et le nouveau venu orthodoxe moderne dans le quartier, le réseau de tribunaux de Giyur Kahalacha.

Etabli il y a six mois par des sommités du monde religieux national sioniste d’Israël, Giyur Kahalacha se voit lui-même comme une réponse halakhique aux immigrants – particulièrement ceux qui ont des ancêtres juifs – qui n’ont pas réussi à compléter les programmes de conversion draconiens de l’Etat.

Bien que ses convertis doivent admettre que le programme n’est actuellement pas reconnu par l’Etat d’Israël pour l’application du statut juif, ni par le grand rabbinat pour les évènements du cycle de la vie, Giyur Kahalacha a déjà converti 150 des 600 personnes qui se sont approchées de l’organisation jusqu’à présent.

A la réunion de la Knesset, les représentants de Giyur Kahalacha ont projeté que l’organisation serait bientôt le plus grand tribunal de conversion du monde. (Les autorités religieuses de l’Etat convertissent chaque année 3 600 personnes.) Le nombre de ceux qui joignent Giyur Kahalacha montre la frustration de convertis potentiels vis-à-vis des autorités religieuses, a déclaré Eli Cohen, ancien pilote de l’armée de l’air israélienne et homme d’affaires high-tech qui travaille à présent avec le mouvement.

Le rabbin de Giyur KaHalacha Seth Farber (à gauche), Eli Cohen, directeur, et David, converti, à la réunion de la commission sur l'Alyah à la Knesset, le 8 mars 2016. (Crédit : Michael Shapochnic, Giyur KaHalacha)

Les raisons pour que ce sujet soit pressant à la Knesset, a dit Cohen, est que pour les immigrants de l’ex-URSS avec un héritage juif, au-delà des autorités religieuses, c’est la reconnaissance par l’Etat de leur judéité qui est de la plus haute importance pour leur identité en tant que citoyen israélien. Il est clair, cependant, qu’il y a déjà des inquiétudes parmi les députés et les rabbins que ces nouveaux convertis présentent des faits sur le terrain qui causeront bientôt un cataclysme.

Le chef de l’opposition, Isaac Herzog (Union sioniste) a déclaré que « nous en arrivons au point où nous disons que dans cette situation, il devrait y avoir un système de conversion parallèle parce que le système actuel ne répond pas aux besoins. »

Mais le dirigeant de l’autorité de conversion, le rabbin Yitzhak Peretz, a déclaré mardi que son institution ne reconnaissait pas les convertis de Giyur Kahalacha et qu’avec 2 000 convertis de l’ex-URSS par an, elle ne prévoyait pas de besoin. « Si quelqu’un a un problème avec la Knesset, devrait-il faire une nouvelle Knesset ? Bientôt, il y aura un Etat dans lequel chacun fera sa propre synagogue, chacun suivra sa propre casheroute, » a déclaré Peretz.

Il y a aujourd’hui 15 tribunaux de conversion indépendants dans le pays, a dit Peretz. S’ils devaient tous être reconnus, « alors ce ne serait pas une personne, ce serait 100 personnes… Ce serait le chaos, » a déclaré Peretz.

Le député Moti Yogev, du parti HaBayit HaYehudi, a fait écho aux inquiétudes de Peretz, mais a déclaré que bien que le grand rabbinat devait être l’unique autorité religieuse, particulièrement dans les cas de conversion et de divorce, « il doit y avoir un effort d’indulgence, avec foi et responsabilité, pour maintenir le peuple juif uni. »‘

Avec une histoire familiale riche et des électeurs avec des historiques similaires pour la soutenir, la députée de l’Union sioniste, Ksenia Svetlova, a rejeté la notion selon laquelle l’autorité de conversion de l’Etat est une force pour la cohésion au sein du peuple juif. « Le rabbinat s’est transformé en seigneur du peuple, au lieu de le servir, » a déclaré Svetlova. Elle a dit que beaucoup d’immigrants de l’ex-URSS avaient vécu toute leur vie en pensant qu’ils étaient juifs. « Ils ont souffert d’antisémitisme en tant que juifs, » a-t-elle dit, et souffert de bien d’autres manières en tant que juifs, « et ici, oups ! [Les fonctionnaires leur demandent] ‘Qui êtes-vous, goyim ?’ Nous devons cesser cette torture, » a-t-elle déclaré. Svetlova a dit que la situation est tellement ridicule que même le prototype biblique de la conversion juive n’aurait pas lieu aujourd’hui dans les stricts tribunaux rabbiniques.

« Ruth la Moabite n’aurait pas été convertie aujourd’hui. Elle n’aurait pas été acceptée dans le peuple juif, a dit Svetlova. Les gens veulent être juifs – alors laissez-les ! »

Former Shas MK Haim Amsalem, now running at the head of his own party, Am Shalem, in the Knesset in 2010. (photo credit: Miriam Alster/FLASH90)

Après avoir essayé de réformer le système depuis l’intérieur à la fois de l’autorité rabbinique et de la Knesset, le rabbin Haim Amsalem, ancien député Shas, a déclaré qu’il ne voyait aucun espoir de répondre aux besoins présentés par des centaines de milliers de citoyens israéliens avec un héritage juif. De plus, a-t-il déclaré, en écartant des convertis potentiels du judaïsme via le refus de reconnaître les tribunaux de conversion indépendants, l’établissement étatique « soutient l’assimilation ».

« Qui sont ceux qui frappent à nos portes ? Quatre-vingt-dix-sept pourcent sont ceux qui ont des racines juives, qui ont lié leur destin au peuple juif. Nous les rejetons, » a-t-il déclaré. Citant d’autres sources rabbiniques, Amsalem a déclaré qu’il était pire de rejeter celui qui veut devenir juif que de convertir quelqu’un « par erreur ».

« Nous devons donner la reconnaissance du gouvernement aux tribunaux indépendants et aux convertis, » a dit Amsalem.

Avraham Negosa, député Likud et président de la commission d'immigration, d'intégration et des affaires de la diaspora de la Knesset. (Crédit : bureau de presse du gouvernemen)

Le directeur de la commission, le député Likud Avraham Nagosa, un immigrant éthiopien, n’est pas non plus étranger à la lutte politique et émotionnelle impliquée dans la conversion. En concluant la discussion, Nagosa a appelé l’autorité de la conversion à commencer à discuter avec Giyur Kahalacha. Plus important, il a appelé le ministère de l’Intérieur à reconnaître ces convertis halakhiques comme juifs.

Jusque-là, David, comme les autres convertis Giyur Kahalacha, comprend que son identité juive s’arrête à un moment. « Je ne suis enregistré comme juif nulle part en Israël, même si j’ai passé une conversion halakhique, » a-t-il dit.

Et donc, avant son futur mariage, David sait aussi que le seul moyen pour lui d’avoir un mariage halakhique est de quitter l’Etat juif – ou d’être marié illégalement par un rabbin de Giyur Kahalacha.

 

5 Chinoises immigrent en Israël et prévoient de se convertir

Des membres de la communauté de Kaifeng, qui aurait été fondée par des marchands juifs au 8e ou 9e siècle, entreprennent de devenir officiellement juives

De gauche à droite : Li Yuan, Yue Ting, Li Jing, Li Chengjin et Gao Yichen devant le mur Occidental, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 29 février 2016. (Crédit : Laura Ben-David/autorisation de Shavei Israel)

De gauche à droite : Li Yuan, Yue Ting, Li Jing, Li Chengjin et Gao Yichen devant le mur Occidental, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 29 février 2016. (Crédit : Laura Ben-David/autorisation de Shavei Israel)

Les femmes, Gao Yichen, Yue Ting, Li Jing, Li Yuan, et Li Chengjin, qui ont étudié l’hébreu et le judaïsme dans leur Kaifeng natale, sont arrivées lundi et sont allées directement au mur Occidental.

Les femmes vont continuer leurs études juives au Midreshet Nishmat de Jérusalem – le centre Jeanie Schottenstein pour les études supérieures de Torah pour les femmes, avec le soutien de l’association Shavei Israël, qui couvrira aussi leurs frais courants et les soutiendra pendant qu’elles se préparent pour leurs conversions. A la fin du processus de conversion, elles recevront la nationalité israélienne.

« Faire partie du peuple juif est un honneur, à cause de l’héritage et de la sagesse, » a déclaré Li Jing, qui a expliqué que pendant une précédente visite en Israël elle avait placé une prière dans une crevasse du mur Occidental demandant à retourner et à vivre en Israël.

« Maintenant, mes prières ont été exaucées, » a-t-elle déclaré.

Selon Shavei Israël, c’est la première fois en sept ans que des membres de la communauté de Kaifeng peuvent immigrer en Israël.

« Les descendants juifs de Kaifeng sont un lien vivant entre la Chine et le peuple juif, » a déclaré Michael Freund, président de Shavei Israël, qui cherche à renforcer les liens avec les descendants de juifs dans les communautés du monde entier.

« Après des siècles d’assimilation, un nombre croissant de juifs de Kaifeng a commencé ces dernières années à chercher à retourner à leurs racines et à embrasser leur identité juive. »

Le fondateur et président de Shavei, Michael Freund (deuxième depuis la gauche), accueille cinq femmes de Kaifeng, en Chine, après leur arrivée à l'aéroport Ben Gurion, le 29 février 2016. (Crédit : Laura Ben-David/autorisation de Shavei Israel)

En octobre 2009, sept hommes de la communauté étaient venus vivre en Israël. Au total, Shavei Israël a fait venir 19 membres de la communauté juive de Kaifeng en Israël, a déclaré l’organisation dans un communiqué.

La communauté juive de Kaifeng aurait été fondée par des marchands juifs perses ou irakiens au 8e ou au 9e siècle.

A son apogée, pendant la dynastie Ming (1368 – 1644), la communauté juive de Kaifeng comptait 5 000 personnes. Aujourd’hui, après des siècles d’assimilation et de mariages mixtes, la communauté revendique 500 à 1 000 membres qui continuent à observer les coutumes juives.

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