Ordination à Jérusalem d’un rabbin gay : vers une Torah LGBT ?

NdlR : suite à cet évènement, pas aussi anodin qu’il y parait, la Torah est donc officiellement amendée… au nom de la Torah LGBT, qui comporte de fait quelques versets de moins que la version originale. L’occasion pour le peuple élu de jouer au jeu des  7 erreurs ? 

Le premier rabbin orthodoxe ouvertement gay ordonné à Jérusalem

Après s’être vu refuser la semikha de la Yeshivat Chovevei Torah après qu’il s’est fiancé à un homme, Daniel Atwood a été nommé rabbin dans la capitale israélienne

Le rabbin Daniel Atwood,reçoit son ordination rabbinique du rabbin Daniel Landes, à Jérusalem, le 26 mai 2019. (Crédit : Sam Sokol/JTA)

Le rabbin Daniel Atwood,reçoit son ordination rabbinique du rabbin Daniel Landes, à Jérusalem, le 26 mai 2019. (Crédit : Sam Sokol/JTA)

JTA — Un élève homosexuel d’une école rabbinique qui s’était vu refuser l’ordination par un séminaire libéral à New York a été accueilli au sein du rabbinat de Jérusalem, rompant ainsi avec un tabou contre l’homosexualité dans la communauté orthodoxe.

Daniel Landes, un éminent rabbin israélo-américain, a remis sa semikha – ordination rabbinique – de Daniel Atwood, devant un groupe d’hommes et de femmes au Théâtre de Jérusalem dimanche soir, au cours d’une cérémonie réunissant quelque 200 convives.

Atwood a été informé au début de l’année qu’il ne recevrait pas son ordination au terme de ses études à la yeshiva Chovevei Torah de New York, après que l’école lui a indiqué qu’il serait nommé rabbin.

« Est-ce que notre Torah et notre système halakhique est si faible et dénué de ressources qu’il ne peut pas être mis au défi par une nouvelle situation ? »

« On m’a dit il y a trois ans que le fait que je délivre une semikha à des femmes créerait le chaos et porterait atteinte à elles et à leurs familles et simplifierait l’apprentissage de la Torah. Mais c’est l’inverse qui s’est produit », a déclaré Landes, qui dirigeait jusqu’à récemment le Pardes Institute of Jewish Studies à Jérusalem, une école mixte sans affiliation, à l’auditoire lors de la cérémonie.

« La véritable question est la suivante : est-ce que notre Torah et notre système halakhique est si faible et dénué de ressources qu’il ne peut pas être mis au défi par une nouvelle situation ? », a-t-il demandé. Citant le verset « La Torah est parfaite, elle restaure l’âme », Landes a clamé qu’une « Torah n’est parfaite que si elle restaure l’âme. C’est ce vers quoi nous devons tendre. »

Atwood, diplômé de 27 ans de la Yeshiva University, bastion du judaïsme modern orthodox, a souri durant toute la cérémonie, et dansé avec Landes et les autres personnes qui ont reçu leur ordination.

« Je suis ravi de recevoir une semikha et je suis très reconnaissant au rabbin Landes et [à son organisation] Yashrut de me prendre sous leur aile », a-t-il dit à la Jewish Telegraphic Agency, ajoutant que sa joie étaient assombrie « par la tristesse de ne pas être entouré des amis et enseignants avec qui j’ai étudié pendant de nombreuses années à YCT ».

Interrogé sur ce qu’il ressentait quant à l’idée de représenter la communauté juive dans l’orthodoxie américaine, Atwood a répondu qu’il ressentait « cette responsabilité avec beaucoup de force », et s’il ne cherche pas à être un symbole, il espérait pouvoir devenir « une présence rabbinique pour les [Juifs] LGBT et tous les Juifs, quelle que soit leur orientation, qui se sentent marginalisés ».

De nombreux jeunes juifs orthodoxes qui auraient précédemment quitté le milieu y restent et « il est inimaginable qu’ils n’aient pas leur place », a-t-il continué. « Ils exigent d’avoir une place, et je pense qu’avoir un guide spirituel est quelque chose d’important ». Il a également minimisé les conflits entre les aspects LGBT et orthodoxe de son identité, affirmant qu’il ne « cherchait pas des étiquettes qui allaient entraver le travail qui doit être fait ».

Le judaïsme orthodoxe est traditionnellement opposé aux mariages homosexuels, même si un mouvement plus inclusif grandit dans les éléments les plus progressistes de la communauté. Cependant, le cas d’Atwood montre bien que même cette tolérance connait des limites.

Si Chovevei Torah a accepté Atwood tout en ayant pleinement connaissance de son orientation sexuelle, le doyen de la yeshiva, le rabbin Dov Linzer, a déclaré au JTA qu’un évènement récent, qu’il n’a pas détaillé, a donné lieu à une réévaluation de la décision de lui accorder l’ordination rabbinique. Il y a six mois, Atwood et son compagnon se sont fiancés sur l’estrade d’un concert à New York.

Yeshivat Chovevei Torah, located at the Hebrew Institute of Riverdale in New York, has ordained 81 rabbis since its establishment by Rabbi Avi Weiss in 2000. (Photo credit: Courtesy Yeshivat Chovevei Torah/JTA)

« Il est venu vers nous à la fin de sa première année et nous étions prêts à lui donner sa semikha jusqu’à ce que certaines circonstances soient amenées à notre connaissance il y a quelques mois », a déclaré Linzer au JTA le mois dernier.

« Parce que c’est une question tellement délicate, il nous a fallu quelques mois pour prendre la décision que nous avons prise. J’essayais de voir s’il y avait un moyen d’aller de l’avant. Je suis arrivé à la conclusion que ce n’était pas possible. » Il a admis que le processus de délivrance d’ordination d’Atwood n’a « pas été bien géré ».

Les mouvements reconstructionnistes et réformés ont commencé à nommer des rabbins gays dans les années 1980, et le mouvement conservateur leur a emboîté le pas en 2006.

Le fiancé d’Atwood, Judah Gavant, a confié au JTA qu’il était très fier de son compagnon et de « toute notre communauté » et que l’ordination d’Atwood faisait partie d’un processus « de progression pour rendre le monde juif plus accessible à ceux qui veulent en faire partie ».

L’an dernier, des dizaines de rabbins orthodoxes israéliens et américains ont co-signé une lettre ouverte en soutien à la communauté LGBT, en réponse à une lettre de 200 autres rabbins orthodoxes israéliens qui qualifiaient les membres de cette communauté de « pervers » et décrivaient une « organisation d’abomination ».

Pour sa part, Landes ne pense pas que l’interdit biblique portant sur les relations homosexuelles s’applique aux personnes pour qui l’homosexualité n’est « pas un acte volontaire », et il pense qu’il y a une place pour les Juifs LGBT dans la communauté.

Le rabbin Nathan Lopes Cardozo, autre éminent rabbin qui est occasionnellement en conflit avec le courant orthodoxe, s’est fait l’écho de Landes. Il a déclaré au JTA que même s’il n’avait pas de source rabbinique pour le justifier, il pense que « l’interdit ne s’applique qu’à ceux qui sont purement hétérosexuels ».

« Je pense que les gens qui veulent vraiment se mettre au service du peuple juif devraient être choyés, et j’ai un rôle à jouer dedans », a dit Landes au JTA. « Et quand ils sont exceptionnels, je veux aider. »

En admettant que les positions de l’orthodoxie à l’égard de l’homosexualité évoluent doucement, il a déclaré qu’on prend désormais conscience « qu’ils ne sont pas des pédophiles, des irresponsables, ou quoi que ce soit, ce sont des gens biens ». Landes a ajouté que le début de sa transformation de la perspective classique orthodoxe, qui considère l’homosexualité comme une grave faute, remonte à quelques décennies, lorsqu’il a expliqué aux membres de sa communauté aux Etats-Unis qu’il avait refusé de participer à une conférence organisée par la Central Conference of American Rabbis après que le groupe affilié au mouvement réformé a adopté une résolution sur l’inclusion LGBT. Un jeune homme de qui il était proche a quitté la pièce, l’air blessé.

« J’ai vu dans ses yeux la trahison [qu’il a ressentie] », a déclaré Landes. « Je ne l’aurais jamais imaginé. Qu’est-ce que j’avais fait de mal ? Je savais que j’avais quelque chose de mal. Alors cela m’a hanté. Est-ce que je l’ai retrouvé ? Oui, je l’ai retrouvé. Il n’a pas voulu me parler. Il n’y a pas de happy end à cette histoire. »

Si le rabbin n’imaginait pas que les Juifs gays souhaitaient rester dans la communauté orthodoxe, et encore moins devenir des érudits juifs, il a désormais un point de vue différent. « Je pense que nous commencerons avec la communauté gay elle-même et s’il y a la possibilité de créer une vraie communauté au niveau religieux, cela conduira à l’acceptation, ou peut-être pendant un temps limité », a-t-il dit. « Des choses se passent quand il y a une ouverture. »

Le rabbin Avi Shafran, porte-parole de l’organisation orthodoxe Agudath Israel, a déclaré au JTA que « si le mot ‘orthodoxe’ signifie encore quelque chose, il n’est mérité ni par l’institution qui a refusé [de donner un ordination] à M. Atwood, ni à l’individu qui la lui a délivrée ».

 

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Le grand-rabbin de Jérusalem contre les drapeaux LGBT qui « gâchent la ville »

La rabbin Aryeh Stern a demandé au maire d’empêcher la présence des drapeaux multicolores mais la municipalité a rejeté cette requête

Aryeh Stern (Crédit : capture d'écran Deuxième chaîne)

Aryeh Stern (Crédit : capture d’écran Deuxième chaîne)

Le grand-rabbin de Jérusalem a envoyé lundi un courrier officier au maire Moshe Lion, lui demandant d’empêcher que des drapeaux LGBT soient accrochés en amont de la parade annuelle dans la ville, parce qu’ils « gâchent la ville ».

« Malheureusement, je dois aborder le sujet douloureux de la ‘parade’ prévue dans les semaines à venir », a écrit le rabbin Aryeh Stern dans une lettre, qui a été communiquée à la presse. « Je sais qu’au niveau légal, le maire n’est pas habilité à interdire la parade, et c’est pourquoi je vous demande de donner au moins l’ordre de ne pas accrocher de drapeaux, qui gâchent la ville. »

Cependant, la municipalité de Jérusalem a déclaré dans un communiqué que les drapeaux pouvaient être installés avant le rassemblement du 6 juin, conformément aux décisions de justice sur la question.

Idan Roll, un député gay du parti Kakhol lavan, a appelé à rejeter « immédiatement » Stern, parce qu’il « n’y a pas de place dans le service public pour une personne avec des points de vue si obscurs et insultants ».

Roll a associé les propos de Stern à une fusillade qui a tué deux personnes dans un centre pour la jeunesse gay de Tel Aviv et le meurtre d’une jeune fille de 16 ans durant la Gay Pride de 2015 à Jérusalem par un extrémiste ultra-orthodoxe homophobe.

« C’est énervant d’entendre qu’à deux semaines des événements, notamment l’année où nous marquons le dixième anniversaire de la tuerie du centre Bar Noar, et le quatrième anniversaire de la mort de Shira Banki, le grand-rabbin de Jérusalem vient avec des propos méprisables et dangereux qui sont une incitation à la haine contre la communauté [LGBT] », a-t-il dit.

Lundi également, les groupes LGBT locaux ont essuyé une défaite symbolique quand une commission municipale a voté contre l’allocation d’un budget annuel pour la Jerusalem Open House for Pride and Tolerance, le principal groupe qui aide la jeunesse LGBT dans la ville et qui se bat pour leurs droits.

Le budget de 500 000 shekels a été rejeté à 6 votes contre 5, principalement en raison des objections émises par les ultra-orthodoxes. Cependant, la décision n’est pas finale et sera prise par le conseil municipal, qui votera mardi.

Ofer Berkovitch, membre laïc du conseil municipal, qui était en lice pour le poste de maire en octobre 2018 face à Lion, a accusé le maire et ses alliés ultra-orthodoxes de « continuer à porter du tort au statu quo de Jérusalem » et a ajouté qu »il s’agissait « d’une décision illégale qui contredit la décision de la Cour suprême ».

La municipalité de Jérusalem a répondu qu’elle agissait « pour préserver le statu quo et le respect de tout un chacun. Le budget de l’Open House sera approuvé par le conseil municipal jeudi, comme chaque année ».

Lundi, la Jerusalem Open House a également fait savoir qu’elle n’acceptait pas de contrôler l’identité des participants à l’entrée de la manifestation.

« La demande de carte d’identité à la parade soulève d’importantes questions de confidentialité, même si les intentions sont bonnes », a déclaré le groupe de défense des droits LGBT dans la capitale, dans un communiqué, au sujet des initiatives mises en oeuvre par les autorités pour garantir que le rassemblement se déroule en toute sécurité, quatre ans après le meurtre d’une participante de 16 ans, Shira Banki, qui a été poignardée par un extrémiste ultra-orthodoxe homophobe.

« Personne ne nous effraiera et personne ne nous empêchera de défiler », a indiqué le communiqué de l’Open House.

La proposition de la police n’a jamais été appliquée à d’autres gay pride ni aucune autre manifestation publique ces dernières années.

Ce vendredi marquera le début du mois des Fiertés en Israël, avec la parade de la ville de Kfar Saba. Une cinquantaine d’autres marches auront lieu dans l’ensemble du pays dans les semaines à venir, principalement dans les écoles et universités.

Le plus grand évènement sera l’annuelle parade de Tel Aviv, qui devrait attirer des centaines de milliers de participants venus du monde entier. Ce rassemblement, généralement perçu comme une fête géante, devrait prendre des tournures de protestations. En effet, les organisateurs souhaitent sensibiliser à la discrimination subie par la communauté LGBT, dont les membres font face à des obstacles juridiques dès qu’il est question de mariage ou de fonder une famille en Israël.

Jacob Magid a contribué à cet article.

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