En disant simplement qu’il l’aime et qu’il est à ses côtés, Trump réussit à convaincre Israël, toujours critiqué. Lui et Netanyahu sont totalement en désaccord sur la bonne foi des Palestiniens, sur la question de la paix.
Il n’a pas relocalisé l’ambassade de Tel Aviv à Jérusalem. Mais le président a inconditionnellement fait l’éloge de l’état juif, et a écrit une nouvelle page de l’histoire en se rendant au mur Occidental.
Ces quelques secondes résument plutôt bien la visite effectuée par Trump en Israël – ses expressions de solidarité instinctive avec l’état juif, sa promesse de le protéger et le plaisir avec lequel le pays l’a accueilli – après huit années de ce que les Israéliens avaient ressenti comme étant un soutien quelque peu conditionnel, emprunt de sourdes mises en garde de la part du président Barack Obama. « Je vous fais cette promesse : Mon administration sera toujours aux côtés d’Israël », a-t-il promis.
Il y a des différences claires sur la question palestinienne entre le président américain et le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Elles se sont affichées lors des discours prononcés par les deux hommes au musée d’Israël. Netanyahu a noté que si l’attentat terroriste de Manchester, lundi soir, avait été commis par un kamikaze palestinien et que ses victimes avaient été israéliennes, alors Mahmoud Abbas, loin de le condamner comme il l’a fait aux côtés de Trump à Bethléem dans la matinée de lundi, aurait versé des paiements à la famille du terroriste.
Comme l’a dit Netanyahu : »Si le terroriste avait été Palestinien et que les victimes avaient été des enfants israéliens, la famille du kamikaze aurait reçu un salaire de la part de l’Autorité palestinienne. C’est la loi palestinienne. Cette loi doit être changée ». Trump, contrastant absolument avec ce positionnement, a quant à lui affirmé avec conviction qu’Abbas et les Palestiniens « sont prêts pour la paix. » Faisant un nouvel écart avec le texte préparé, il a tenté de contrer le scepticisme affiché par les Israéliens : « Je sais que vous l’avez déjà entendu. Je vous le dis. C’est ce que je fais. Ils sont prêts à faire la paix ».
Netanyahu veut croire qu’Israël pourra faire la paix avec le monde arabe et qu’un grand nombre des dirigeants arabes avec lesquels Trump s’est entretenu à Ryad pourront, ultérieurement, harceler les Palestiniens pour qu’ils acceptent les termes d’un accord qu’Israël pourrait accepter en toute sécurité. Trump, lui, a de toute évidence été persuadé que le processus devait avancer d’une autre façon. Sur la base de ses conversations à Ryad, il a indiqué : « Je pense aussi fermement que si Israël et les Palestiniens peuvent faire la paix, alors commencera un processus de paix à travers tout le Moyen-Orient ».
Il y a aussi une certaine déception sur la droite de l’échiquier politique israélien dans la mesure où Trump devra encore honorer sa promesse de campagne de relocaliser l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem. La déception aussi qu’il se soit livré à une série de déclarations critiquant les entreprises d’implantation. Qu’il n’ait pas encore bougé pour tenter de mettre un terme à un accord iranien sur le nucléaire mal fichu.
Il y a certaines inquiétudes sur l’ampleur des contrats d’armement et autres accords qu’il a conclus en Arabie saoudite et sur l’emprise des Saoudiens à Washington, après un investissement de leur part de 380 milliards. Il y aurait aussi du désarroi chez les responsables du renseignement sur la fuite d’information apparente dont Trump se serait rendu coupable auprès des Russes, et sur la question globale de ses liens avec la Russie, allié d’un si grand nombre d’ennemis d’Israël. Et il y a énormément d’Israéliens – dont certainement Netanyahu – qui auraient espéré qu’il adopte une ligne bien plus dure en rencontrant Abbas sur la question des salaires payés par la hiérarchie de l’AP aux terroristes en particulier, et sur l’encouragement aux hostilités anti-israéliennes parmi les Palestiniens en général.
Mais alors que la visite s’est achevée, le sentiment global en Israël est celui d’un contentement considérable après le séjour effectué par un président manifestement solidaire et d’une famille qui adore Israël (et dont certains sont Juifs).
Cela a également été intéressant de constater à quel point Netanyahu s’est senti à l’aise en compagnie de Trump – contrastant fortement avec les rencontres pleines de tension qui caractérisaient ses entretiens avec Obama. (Cela a également été intéressant de voir Melania Trump applaudir les critiques émises par Netanyahu sur la politique des paiements aux terroristes de l’AP.)
Il n’a pas relocalisé l’ambassade, mais le discours qu’il a prononcé au musée d’Israël a été très certainement l’allocution la plus évocatrice jamais faite par un président américain en termes de reconnaissance de la légitimité israélienne dans sa capitale – le discours long, ému, a été considéré comme venant réfuter toutes les résolutions ridicules qui ont été adoptées par le Conseil de Sécurité de l’ONU et par l’UNESCO, qui niaient l’histoire juive de la ville : « Jérusalem est une ville sainte. Sa beauté, sa splendeur et son patrimoine n’ont aucun équivalent dans le monde », a déclaré Trump, ajoutant immédiatement que « les liens du peuple juif avec cette terre sainte sont anciens et éternels. Ils remontent à des milliers d’années, notamment jusqu’au règne du Roi David, dont l’étoile vole fièrement dorénavant sur le drapeau blanc et bleu d’Israël ».
Et ces paroles, bien sûr, ont trouvé un écho particulier après une visite qui aura ouvert une nouvelle page de l’histoire – celle du premier président américain en exercice au mur Occidental, où il s’est tenu immobile, dans un état de contemplation silencieuse, sa famille à proximité, une kippa noire respectueusement posée sur sa tête.
Les Israéliens ne savent pas plus que les Américains comment se jouera sa présidence. Ils ne peuvent avoir de certitude concernant ce qu’il dira ou ce qu’il fera – ou quel effet aura sur son mandat ce qu’il a déjà dit ou sur ce qu’il a déjà fait.
Mais il est venu à Jérusalem. Il a dit à Israël qu’il l’adorait. Il a fait preuve d’empathie face aux défis que l’état juif doit affronter. Il a salué Israël, ce pays qui est parvenu à prospérer alors qu’il se trouve sous des attaques constantes. Il n’a pas mâché ses mots pour condamner le terrorisme islamique ou pour promettre de le combattre. Il a juré de se tenir aux côtés d’Israël contre l’Iran et de s’assurer que Téhéran n’obtiendra jamais l’arme nucléaire. Et encore une fois, il s’est tenu avec respect dans le lieu de prière le plus saint du judaïsme – une photo qui, heureusement, a su éclipser le selfie réalisé par Oren Hazan à l’aéroport et restera l’image qui définira son séjour.
Y aura-t-il des frictions et des querelles à l’avenir ? Qui peut le savoir ? Mais une affection mutuelle ? Pour le moment, très certainement. Dans le sillage enthousiaste de sa visite, alors que Trump décollait pour le Vatican mardi après-midi, de nombreux Israéliens ont très probablement pensé que oui, on vous aime bien, nous aussi.