La théocratie en marche en ISRAËL ?

Les projets de loi sur la religion et l’État approuvés en lecture préliminaire

Les projets de loi visant à interdire l’introduction du hametz dans les hôpitaux pendant Pessah et à étendre les pouvoirs des tribunaux rabbiniques continuent de progresser

Deux projets de loi controversés sur la religion et l’État ont été approuvés en lecture préliminaire à la Knesset mercredi, l’un interdisant d’apporter des produits contenant du levain – ou hametz – dans les hôpitaux publics pendant la fête de Pessah et l’autre élargissant les pouvoirs des tribunaux rabbiniques.

Ces deux projets de loi parrainés par le gouvernement Netanyahu ont rencontré une vive résistance, y compris de la part de certains groupes religieux, qui les considèrent comme susceptibles de dresser les Israéliens contre le judaïsme.

La législation proposée par le député Moshe Gafni (Yahadout HaTorah) exigerait que les hôpitaux publics interdisent les aliments contenant du levain, connus sous le nom de hametz, pendant Pessah. Elle a été adoptée par 60 voix contre 49.

Le bureau de la procureure générale s’oppose au projet de loi, estimant que dans sa forme actuelle, la législation allait trop loin et serait difficile à défendre devant les tribunaux.

Pendant des années, les hôpitaux et d’autres institutions publiques ont interdit le hametz pendant la semaine de la fête de Pessah – au cours de laquelle les Juifs s’abstiennent traditionnellement de manger des produits contenant du levain– et certains ont même demandé aux agents de sécurité de fouiller les sacs des visiteurs à la recherche d’aliments interdits à l’entrée des bâtiments. Mais en 2020, la Haute Cour de justice a déclaré que de telles interdictions dans les hôpitaux étaient illégales, et l’année dernière, la cour a rendu une décision similaire concernant les bases militaires. Les produits contenant du levain seront toujours autorisés dans les établissements médicaux qui ne se présentent pas comme casher, comme ceux qui fournissent des services aux segments non-juifs de la population.

Dans un avis, deux conseillers juridiques du bureau de la Procureure générale ont averti que le projet de loi « tel qu’il est rédigé aujourd’hui soulève des difficultés juridiques importantes », car il n’interdirait pas seulement les aliments contenant du levain, mais tous les aliments, à l’exception des produits frais et des aliments emballés portant la mention « Casher Le Pessah », ce qui porterait atteinte aux droits des patients et de leurs proches – et, parce qu’il obligerait les agents de sécurité des hôpitaux à faire quelque chose pour lequel ils n’ont pas été engagés, et porterait également atteinte à leurs droits.

Les conseillers juridiques recommandent un examen plus approfondi « pour trouver des solutions alternatives qui permettraient d’atteindre les objectifs sous-jacents du projet de loi sans que l’État n’empiète inutilement sur les droits [civils] ».

Le député de l’opposition Matan Kahana, ancien ministre des Affaires religieuses, a raillé le projet de loi, affirmant qu’il aura presque certainement l’effet inverse, avec des personnes apportant intentionnellement des produits contenant du levain pour défier la loi.

Le second projet de loi approuvé par la Knesset mercredi, également proposé par Gafni entre autres, vise à étendre les pouvoirs des tribunaux rabbiniques d’État, en leur donnant l’autorisation de statuer de nouveau sur des affaires civiles dans la mesure où les deux parties acceptent de porter le conflit devant un tribunal religieux. Il a été adopté par 58 voix contre 43.

Une explication du projet de loi note que la Cour suprême a « reconnu le besoin de nombreux groupes parmi le public juif en Israël de régler les différends exclusivement dans des tribunaux qui statuent selon la loi de la Torah ».

Elle précise que ce besoin relève du principe de « pluralisme judiciaire » en vertu duquel l’État doit fournir aux populations présentant des caractéristiques uniques les moyens de régler leurs différends « par une méthode juridique alternative acceptable pour leurs communautés ». Un homme se tenant devant le tribunal rabbinique de Jérusalem. (Crédit : Miriam Alster/Flash 90)

Jusqu’en 2006, les tribunaux rabbiniques d’État pouvaient statuer sur des litiges fonciers – entre travailleurs et employés, entre entreprises ou entre propriétaires et locataires, par exemple – mais la Haute Cour a estimé que les juges rabbiniques n’avaient pas l’autorité légale pour le faire et ils ont été dépouillés de ce pouvoir.

Actuellement, les juges rabbiniques sont limités à la supervision des procédures de mariage et de divorce pour tous les Israéliens juifs, ainsi qu’à certaines questions relatives aux conversions, et occasionnellement aux testaments et aux héritages.

Les tribunaux rabbiniques privés peuvent encore entendre des affaires civiles dans le cas où les deux parties acceptent de porter le conflit devant un tribunal religieux.

Le projet de loi soutenu par le parti Shas, mais officiellement présenté par Gafni, rétablirait le pouvoir des tribunaux rabbiniques publics de statuer sur les affaires civiles, à condition que les deux parties soient d’accord.

La proposition bénéficie d’un plus grand soutien que la loi sur le hametz, y compris de la part de l’opposition, mais elle fait l’objet de critiques importantes de la part des groupes de défense et organisations de pluralisme religieux qui mettent en garde contre le fait que les parties – en particulier les femmes dites « enchaînées » (ou agoudot) – pourraient subir des pressions sociales de la part de leurs communautés pour que des juges rabbiniques statuent sur une affaire, même si elles pensent qu’un tribunal civil sera plus équilibré.

Gafni a lié les deux projets de loi à la volonté du gouvernement de remanier radicalement le système judiciaire, affirmant que la législation est une autre mesure visant à combattre l’intervention de la Haute Cour dans la vie israélienne.

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Les projets de loi sur la religion et l’État progressent malgré les objections

Les projets de loi visant à interdire l’introduction du hametz dans les hôpitaux pendant Pessah et à étendre les pouvoirs des tribunaux rabbiniques sont passés en commission

Deux projets de loi très controversés sur la religion et l’État ont été approuvés par la commission des Lois dimanche, l’un interdisant d’apporter des produits levés – ou hametz – dans les hôpitaux publics pendant la fête de Pessah et l’autre élargissant les pouvoirs des tribunaux rabbiniques.

Ces deux projets de loi parrainés par le gouvernement Netanyahu ont rencontré une vive résistance, y compris de la part de certains groupes religieux, qui les considèrent comme susceptibles de dresser les Israéliens contre le judaïsme.

Le projet de loi interdisant l’introduction du hametz pendant Pessah a également été rejeté par le Bureau de la Procureure générale, qui a estimé que, dans sa forme actuelle, la législation allait trop loin et serait difficile à défendre devant les tribunaux.

Une fois approuvés par la commission, les deux projets de loi seront soumis à la Knesset, où ils seront probablement adoptés, même s’ils pourraient encore subir de légères modifications.

Pendant des années, les hôpitaux et d’autres institutions publiques ont interdit le hametz pendant la semaine de la fête de Pessah – au cours de laquelle les Juifs s’abstiennent traditionnellement de manger des produits levés – et certains ont même demandé aux agents de sécurité de fouiller les sacs des visiteurs à la recherche d’aliments interdits à l’entrée des bâtiments. Mais en 2020, la Haute Cour de justice a déclaré que de telles interdictions dans les hôpitaux étaient illégales, et l’année dernière, la cour a rendu une décision similaire concernant les bases militaires.

La législation approuvée par la commission dimanche – proposée par les députés Moshe Gafni, Yaakov Asher et Yitzhak Pindrus du parti ultra-orthodoxe ashkénaze Yahadout HaTorah – permettrait non seulement aux hôpitaux publics d’interdire le hametz mais les obligerait à le faire.

« Pendant la période de Pessah, aucun hametz ou autre aliment – autre que ceux qui sont conformes aux directives établies par le Grand Rabbinat d’Israël – ne sera autorisé ou détenu dans un établissement médical », stipule le projet de loi.

Dans un avis, deux conseillers juridiques du Bureau de la Procureure générale ont averti que le projet de loi « tel qu’il est rédigé aujourd’hui soulève des difficultés juridiques importantes », car il n’interdirait pas seulement les aliments levés, mais tous les aliments, à l’exception des produits frais et des aliments emballés portant la mention « Casher Le Pessah », ce qui porterait atteinte aux droits des patients et de leurs proches – et, parce qu’il obligerait les agents de sécurité des hôpitaux à faire quelque chose pour lequel ils n’ont pas été engagés, et porterait également atteinte à leurs droits.

Les conseillers juridiques recommandent un examen plus approfondi « pour trouver des solutions alternatives qui permettraient d’atteindre les objectifs sous-jacents du projet de loi sans que l’État n’empiète inutilement sur les droits [civils] ». Moshe Gafni, député du parti Yahadout HaTorah, à la Knesset, à Jérusalem, le 18 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Par exemple, ils ont suggéré de limiter la loi pour qu’elle ne s’applique qu’aux produits levés comme le pain par opposition à tous les aliments, ou de laisser la législation plus ambiguë pour permettre aux hôpitaux et au Grand Rabbinat de déterminer comment procéder au cas par cas.

Neemanei Torah VeAvodah, un groupe orthodoxe libéral, a décrié le projet de loi, ainsi que la décision de le soumettre au vote pendant une période particulièrement tendue où il existe de profondes divisions au sein de la population au sujet de la réforme du système judiciaire proposée par le nouveau gouvernement.

« La décision de soumettre spécifiquement la loi sur le hametz à la commission des Lois maintenant, au lieu d’atténuer les tensions, ne contribuera pas à la prochaine fête de Pessah mais au contraire augmentera les conflits », a écrit le groupe.

« Il existe un certain nombre de solutions qui ne nécessitent pas de fouiller dans les sacs personnels des gens, comme cela a été fait dans différents hôpitaux par le passé. Les lois de ce type qui imposent la religion et s’immiscent dans la vie personnelle des gens ne rapprochent jamais les gens du judaïsme et sont en fin de compte un boomerang qui affaiblira le caractère juif de l’État », a-t-il ajouté.

Le député de l’opposition Matan Kahana, ancien ministre des Affaires religieuses, a raillé le projet de loi, affirmant qu’il aura presque certainement l’effet inverse, avec des personnes apportant intentionnellement des produits levés pour défier la loi.

« Si vous voulez vous assurer que les gens apporteront du hametz dans les hôpitaux, veuillez accepter la demande de Gafni », a écrit Kahana dans un tweet lorsque le projet de loi a été présenté pour la première fois.

Le second projet de loi approuvé par la commission étendrait les pouvoirs des tribunaux rabbiniques d’État, en leur donnant l’autorisation de statuer de nouveau sur des affaires civiles.

Jusqu’en 2006, les tribunaux rabbiniques d’État pouvaient entendre des litiges fonciers – entre travailleurs et employés, entre entreprises ou entre propriétaires et locataires, par exemple – mais la Haute Cour a estimé que les juges rabbiniques n’avaient pas l’autorité légale pour le faire et ils ont été dépouillés de ce pouvoir. Actuellement, les juges rabbiniques sont limités à la supervision des procédures de mariage et de divorce pour tous les Israéliens juifs, ainsi qu’à certaines questions relatives aux conversions, et occasionnellement aux testaments et aux héritages. Les tribunaux rabbiniques privés peuvent encore entendre des affaires civiles dans la mesure où les deux parties acceptent de porter le conflit devant un tribunal religieux.

Le projet de loi soutenu par le Shas mais officiellement présenté par Gafni rétablirait le pouvoir des tribunaux rabbiniques publics de statuer sur les affaires civiles, à condition que les deux parties soient d’accord.

La proposition bénéficie d’un plus grand soutien que la loi sur le hametz, y compris de la part de l’opposition, mais fait l’objet de critiques importantes de la part des groupes et organisations de pluralisme religieux qui représentent les femmes dites « enchaînées » – ou agoudot –, dont les maris refusent de leur accorder un divorce religieux, également appelé guet, et qui se retrouvent ainsi dans l’incapacité de se remarier ou de poursuivre leur vie.

Dans une lettre commune, neuf groupes de défense des droits religieux – ITIM, Mavoi Satum, Center for Women’s Justice, le Mouvement Massorti, Neemanei Torah VeAvodah, Chupot, Kolech, le Center for Women in Jewish Law de l’Institut Schechter, et le Rackman Center for the Advancement of the Status of Women de l’Université Bar Ilan – se sont fermement prononcés contre le projet de loi, avertissant que les tribunaux rabbiniques étaient anti-démocratiques et qu’il n’existait aucun moyen de s’assurer que les deux parties auront réellement accepté que des juges rabbiniques statuent sur une affaire.

« On craint que, dans de nombreux cas, les parties les plus faibles soient contraintes d’accepter l’arbitrage, en particulier les femmes », ont-ils écrit.

Dans leur lettre, adressée à la commission des Lois, les organisations notent qu’à l’heure actuelle, seuls des hommes peuvent exercer la fonction de juge rabbinique et qu’ils ne sont pas attachés aux concepts modernes de justice et d’équité.

« Veuillez rappeler que la halakha [loi juive orthodoxe] telle qu’elle est mise en œuvre par les tribunaux rabbiniques d’État aujourd’hui est discriminatoire et problématique pour les femmes et d’autres minorités », ont-elles écrit.

Cela est particulièrement vrai dans le cas du divorce, où un mari doit accepter de donner un divorce religieux, afin que sa femme puisse se remarier, alors qu’un homme peut obtenir une dispense spéciale pour se remarier même si sa femme refuse d’accepter le divorce religieux.

À la lumière de cette disparité de pouvoir, les hommes peuvent utiliser la menace de refuser un divorce religieux pour extorquer de meilleures conditions de divorce, comme le fait de ne pas avoir à payer de pension alimentaire ou compensatoire ou de forcer les femmes à renoncer à leurs droits de partage des biens. Cela est beaucoup plus difficile à faire dans les tribunaux civils que dans les tribunaux religieux.

« Nous pouvons dire de façon presque certaine que l’élargissement des pouvoirs des tribunaux rabbiniques mettra une autre arme puissante entre les mains des maris, qui auront le soutien des tribunaux rabbiniques pour exiger que leur cas soit arbitré selon la halakha comme une condition raisonnable et même souhaitable du divorce », ont écrit les organisations.