Donald Trump convoque Dieu à la table des négociations : l’ancien magnat de l’immobilier ne voit pas le conflit israélo-palestinien comme une simple dispute de terrain. Contrairement à ses prédécesseurs, il se concentre sur sa dimension religieuse
Les revendications concurrentes des Israéliens et des Palestiniens pour le même territoire ont souvent été décrites avec des termes empruntés à l’immobilier. La Terre d’Israël, ou la « Palestine historique », est une propriété qui doit être divisée, et dès que nous pourrons comprendre comment le faire justement, le conflit prendra fin.
Les dirigeants de Jérusalem et de Ramallah ont adopté ce narratif depuis longtemps, et même si le Premier ministre Benjamin Netanyahu a introduit ces dernières années le concept de nationalité ou d’appartenance à un peuple dans l’équation, en demandant que les Palestiniens reconnaissent Israël en tant qu’Etat juif, les deux parties ont été extrêmement prudentes dans leurs tentatives de voir le conflit vieux d’un siècle sous un prisme religieux.
Il est donc quelque peu ironique que Donald Trump, ancien magnat de l’immobilier, soit celui qui semble s’éloigner de cette position, que le conflit porte simplement sur des revendications concurrentes sur un même terrain. Au lieu de cela, il a semblé impatient d’effectuer un changement de paradigme : plutôt que d’approcher Israël/Palestine comme une propriété qu’un bon négociateur doit convaincre de diviser, il approche le sujet, au moins initialement, comme un conflit du bien contre le mal qui peut être facilement résolu si les bonnes personnes de toutes les religions s’unissent contre ceux qui abusent de la foi pour leurs mauvaises fins : « C’est une bataille entre les criminels barbares qui cherchent à oblitérer toute vie humaine, et les personnes décentes de toutes les religions qui cherchent à la protéger », a dit Trump dimanche en Arabie saoudite. « C’est une bataille entre le bien et le mal. »
Devant les dirigeants politiques des pays arabes et musulmans, Trump a cité « Dieu » neuf fois. Le thème de son discours était l’union nécessaire pour combattre le terrorisme, mais il était parsemé d’un message spirituel : « les dirigeants religieux doivent dire ceci haut et fort : le barbarisme ne vous apportera pas la gloire, le culte du mal ne vous apportera pas la dignité, a-t-il prévenu. Si vous choisissez la voie du terrorisme, votre vie sera vide, votre vie sera brève, et votre âme sera condamnée. » Pendant « de nombreux siècles », chrétiens, musulmans et juifs ont vécu « côte à côte » au Moyen Orient, a poursuivi Trump. « Nous devons pratiquer la tolérance et le respect les uns pour les autres une fois encore, et faire de cette région un endroit où chaque homme et chaque femme, peu importe sa religion ou son ethnie, peut jouir d’une vie de dignité et d’espoir. »
Trump a décrit l’Arabie saoudite, première étape de son premier voyage présidentiel à l’étranger, comme « la nation qui sert de gardien aux deux lieux les plus saints de la foi islamique. » Après Ryad, il ira à Jérusalem, Bethléem et au Vatican, trois lieux saints supplémentaires des religions monothéistes. « Si ces trois religions peuvent se rejoindre dans la coopération, a-t-il déclaré, alors la paix dans ce monde est possible, y compris la paix entre Israéliens et Palestiniens. »
La Maison Blanche a bien précisé que la visite controversée de Trump lundi au mur Occidental, où il sera le premier président américain à se rendre, devait être vue comme un geste visant à promouvoir la tolérance interreligieuse, et pas comme une déclaration politique. Le fait que Trump priera sur le site sans aucun accompagnement israélien officiel est un signe qu’il ne veut pas que le message religieux de sa visite soit masqué par des rumeurs sur une possible reconnaissance américaine de la souveraineté israélienne sur le mur Occidental.
H.R. McMaster, conseiller américain à la sécurité nationale, a souligné vendredi que l’un des objectifs centraux de la visite de Trump au Moyen Orient était « de diffuser un message d’unité aux amis de l’Amérique et aux fidèles de trois des plus grandes religions du monde. » Le président veut « unir les peuples de toutes les religions autour d’une vision commune de la paix, du progrès, et de la prospérité » et délivrer « un message de tolérance et d’espoir à des milliards de personnes, notamment aux millions d’Américains qui appartiennent à ces religions. »
Il semble que l’importance accordée au symbolisme religieux soit plus qu’un simple truc pour fournir de bonnes photographies ou des petites phrases agréables.
Le rabbin David Rosen, conseiller interreligieux du grand rabbinat d’Israël, avait jugé l’initiative de Greenblatt « historique », puisqu’elle marquait la première fois de l’histoire récente qu’un responsable de l’administration américaine engagé dans les efforts de paix demandait à rencontrer des dirigeants religieux : « De ce point de vue, c’est très historique, parce que l’impression donnée par les initiatives de paix des administrations précédentes était que la religion n’a pas été considérée comme un facteur important pour tenter de résoudre le conflit », avait dit Rosen au Times of Israël peu après la fin de la rencontre. « Jason Greenblatt a donné précisément le message contraire. »
Cette importance accordée à la dimension religieuse du conflit israélo-palestinien n’est pas passée inaperçue à Jérusalem : « Les Américains veulent souligner que ce qu’ils cherchent est une harmonie entre les grandes religions, toutes les trois religions peuvent être unies autour de l’idée de paix », a déclaré le général de division (de réserve) Yaakov Amidror, ancien conseiller à la sécurité nationale de Netanyahu. Les architectes des accords d’Oslo entre Israël et les Palestiniens ont totalement ignoré les aspects religieux du conflit, a-t-il dit. « C’était une grosse erreur. »
Parler du dialogue interreligieux et de la tolérance n’apportera pas la paix demain, a souligné Amidror. « Mais nous devons commencer quelque part », et comprendre qu’il y a un élément religieux à la dynamique israélo-palestinienne et qu’un premier pas est bienvenu.
Promouvoir la tolérance religieuse n’est évidemment pas le seul élément de la stratégie de Trump pour le Moyen Orient. Pendant ses rencontres avec les dirigeants israéliens et palestiniens cette semaine, il va aussi parler affaires, et cherchera quelles propositions politiques concrètes peut apporter chaque partie à la table des négociations pour promouvoir un climat incitant à la paix. Ses prédécesseurs ont fait exactement cela, et ont spectaculairement échoué. Il n’est absolument pas garanti, et c’est un euphémisme, que les tentatives de Trump de conclure ce qu’il appelle « l’accord ultime » connaissent plus de succès. Mais au moins, une approche qui associe la pression politique sur les deux parties avec un effort pour créer une bonne volonté parmi les groupes religieux est quelque chose de nouveau.
Le président américain Donald Trump a également fait référence aux Juifs. La guerre contre le terrorisme jihadiste est « une bataille entre des criminels barbares qui cherchent à oblitérer toute vie humaine, et des personnes décentes de toutes les religions qui cherchent à se protéger », a-t-il dit. Contraste saisissant avec sa rhétorique de campagne, au cours de laquelle il avait affirmé que « l’islam nous déteste », le magnat de l’immobilier a longuement insisté sur le fait que ce combat n’est pas « une bataille entre religions ». « C’est une bataille entre le bien et le mal », a ajouté celui qui a été accusé d’alimenter l’islamophobie et qui, au début de sa campagne, avait proposé de fermer purement et simplement l’accès aux Etats-Unis aux musulmans.
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Trump : la paix religieuse permet la paix entre Israël et les Palestiniens
Le président américain a appelé le monde islamique à s’unir contre l’extrémisme et la “persécution des Juifs” et à isoler l’Iran
« Si les trois religions abrahamiques peuvent s’unir, alors la paix dans ce monde est possible, y compris la paix entre Israéliens et Palestiniens. »
Dans un discours très attendu prononcé à Ryad devant les représentants de 54 pays musulmans, Trump s’en est violemment pris à l’Iran accusé de « soutenir le terrorisme », pour le grand plaisir des monarchies sunnites du Golfe dont l’Arabie saoudite, qui redoutent l’influence de leur grand rival chiite.
Selon des extraits du discours publiés par la Maison Blanche, il a ajouté que lutter contre le terrorisme « signifie affronter honnêtement la crise de l’extrémisme islamique et des groupes terroristes islamistes qu’elle inspire. Et cela signifie faire face ensemble au meurtre de musulmans innocents, à l’oppression des femmes, à la persécution des Juifs, et à l’assassinat des chrétiens. »
Trump a notamment déclaré que « le vrai bilan de l’Etat islamique, d’Al-Qaïda, du Hezbollah, du Hamas et de tant d’autres ne doit pas seulement être comptabilisé en nombre de morts. Il doit aussi être compté par le nombre de générations de rêves évanouis. »
Après le discours de Trump, le Hamas, groupe terroriste palestinien qui règne sur la bande de Gaza et a juré de détruire Israël, a déclaré que le qualifier de « terroriste » démontrait un « parti-pris » envers Israël.
Se disant porteur d’un message « d’amitié, d’espoir et d’amour » du peuple américain, il a souligné la symbolique de son déplacement, son premier en tant que président, « au cœur du monde musulman ».
Contraste saisissant avec sa rhétorique de campagne, au cours de laquelle il avait affirmé que « l’islam nous déteste », le magnat de l’immobilier a longuement insisté sur le fait que ce combat n’est pas « une bataille entre religions ».
« C’est une bataille entre le bien et le mal », a ajouté celui qui a été accusé d’alimenter l’islamophobie et qui, au début de sa campagne, avait proposé de fermer purement et simplement l’accès aux Etats-Unis aux musulmans.
Il a appelé les dirigeants musulmans à « faire face à la crise de l’extrémisme islamiste », expression sensiblement différente de celle de « terrorisme islamique radical » qu’il avait largement utilisée jusqu’ici mais qui avait provoqué des grincements de dents dans le monde musulman.
« Les leaders religieux doivent le dire avec une très grande clarté […]. Si vous choisissez la voie du terrorisme, votre vie sera vide, votre vie sera brève », a-t-il martelé.
Exhortant les dirigeants musulmans à n’offrir aucun « refuge » aux terroristes, à les « chasser » de leurs communautés et de leurs lieux de culte, il a dit : « C’est un choix que l’Amérique ne peut faire pour vous ».
Le président a ajouté que de « nombreux universitaires arabes et islamiques ont affirmé à raison que protéger l’égalité renforce les sociétés arabes et musulmanes. Pendant des siècles, le Moyen Orient a accueilli des chrétiens, des Juifs », et d’autres minorités. Trump a appelé à un « retour » au Moyen Orient.
Soulignant que peu de nations avaient été épargnées par le terrorisme, il a évoqué « les atrocités » du 11 septembre, mais aussi toutes les victimes en Europe, en Afrique ou Asie. Mais il aussi appelé à ne jamais oublier que « 95 % » des victimes sont des musulmans.
Comme c’est le cas depuis son arrivée au pouvoir, Donald Trump s’est gardé de toute critique sur la question des droits de l’Homme, devant un parterre de dirigeants dont nombre d’entre eux sont régulièrement montrés du doigt par les organisations internationales.
Revendiquant un contraste marqué avec son prédécesseur démocrate Barack Obama sur ce thème, Trump assure qu’il préfère agir dans la discrétion, gage, selon lui, d’une plus grande efficacité.
« Nous ne sommes pas ici pour donner des leçons, nous ne sommes pas ici pour dire aux autres comment vivre », a-t-il affirmé.
Mais Trump, qui a annoncé dimanche une conférence de presse d’ici deux semaines pour expliquer sa stratégie de lutte contre l’EI, a aussi lancé un appel clair aux pays de la région à prendre leur pleine part dans le combat contre le terrorisme.
« L’Amérique est prête à être à vos côtés […] mais les pays du Proche Orient ne peuvent attendre que la puissance américaine écrase l’ennemi pour eux […]. Ils doivent décider de l’avenir qu’ils veulent pour eux-mêmes, leurs pays, leurs enfants. »
Sur l’Iran, pays avec lequel les Etats-Unis sont en brouille depuis plusieurs décennies, Trump a dénoncé un pays « responsable de tant d’instabilité dans la région ».
« En attendant que le régime iranien montre sa volonté d’être un partenaire dans la paix, toutes les nations […] doivent travailler ensemble pour l’isoler », a-t-il dit, en accusant le régime iranien d’attiser « les feux du conflit confessionnel et du terrorisme ».
Quelques minutes avant lui, le roi Salmane d’Arabie saoudite, royaume sunnite, s’était livré à une attaque en règle contre l’Iran qu’il a qualifié de « fer de lance du terrorisme mondial ».
Le président américain a multiplié dimanche les rencontres avec des dirigeants de la région, dont ceux des monarchies du Golfe et son homologue égyptien Abdel Fattah el-Sissi.
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Al-Jubeir : Trump peut négocier un accord de paix israélo-palestinien, et nous l’aiderons
Parlant au nom du monarque saoudien, le ministre des Affaires étrangères a salué la “vision” et la “détermination” du président américain
Jubeir a parlé de « l’optimisme du royaume [sur la possibilité] que le président Trump, avec une approche et une détermination nouvelles, puisse mettre fin à ce long conflit. Il a certainement une vision, et nous pensons qu’il a la force et la détermination. Et le royaume d’Arabie saoudite est prêt à travailler avec les Etats-Unis pour apporter la paix entre les Israéliens et les Palestiniens, et les Israéliens et les Arabes. »
Jubeir a indiqué que l’Arabie saoudite soulignait « l’importance de travailler à la paix entre les Israéliens et les Palestiniens. »
La visite du président américain en Arabie saoudite samedi présentait un « tournant dans la relation entre les Etats-Unis et le monde islamique », a déclaré Jubeir, saluant plusieurs accords commerciaux et militaires signés dans la journée, notamment un accord à 110 milliards de dollars de ventes d’équipements et de services militaires américains aux Saoudiens, et des accords concernant le secteur privé.