Refonte judiciaire : Plus de 200 000 personnes manifestent dans tout le pays
Premier week-end de rassemblement à Jérusalem, Tel Aviv, Haifa, et Beer Sheva entre autres, depuis que la coalition a adopté la première mesure de son paquet de réformes radicales
Rien qu’à Tel Aviv, quelque 174 000 Israéliens se sont rassemblés samedi soir au carrefour Kaplan, point névralgique des protestations anti-refonte, selon la Treizième chaîne. Le site d’information Ynet a estimé le nombre de manifestants à environ 160 000.
Des dizaines de milliers d’Israéliens ont manifesté dans des dizaines d’autres villes du pays.
Le groupe populaire de hip-hop/funk israélien Hadag Nahash a donné un concert pour les milliers d’Israéliens réunis devant la résidence présidentielle, à Jérusalem.
« Nous baissons la tête en soutien à tous ceux qui manifestent dans le pays », a déclaré à la foule le chanteur Shaanan Streett.
« Nous serons toujours avec vous », a dit Streett aux manifestants, dénonçant le gouvernement pour avoir déchiré la nation et rejetant les affirmations de la coalition selon lesquelles la loi du »caractère raisonnable » – adoptée lundi et entrée en vigueur mercredi – était mineure.
« Nous aimons toujours ce pays et nous essayons de résoudre tous les problèmes », a déclaré à l’AFP le réalisateur Itay Amram, qui affirme se mobiliser contre ce qu’il considère comme la « révolution constitutionnelle » du gouvernement.
« Nous refusons de servir une dictature », pouvait-on lire sur une pancarte brandie par un manifestant à Tel-Aviv.
« J’ai très peur de ce qui se passe actuellement en Israël et je suis très inquiète pour l’avenir de ma fille », a déclaré de son côté Lotem Pinchover, une universitaire de 40 ans.
De Haïfa, dans le nord du pays, à Eilat, sur la mer Rouge, les organisateurs des manifestations ont prévu des rassemblements dans tout le pays.
Lundi, le Premier ministre Benjamin Netanyahu et ses alliés de la coalition, associant des partis d’extrême droite et juifs ultra-orthodoxes, ont fait adopter par le Parlement une clause de ce projet limitant la possibilité pour la Cour suprême d’invalider une décision du gouvernement.
Cette réforme, qui vise à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats, divise le pays et a déclenché l’un des plus grands mouvements de protestation de l’histoire d’Israël.
Les opposants à cette loi affirment qu’elle affaiblira la capacité de la Cour à protéger les droits civils et qu’elle entravera considérablement sa capacité à protéger les hauts fonctionnaires qui occupent des postes (très) sensibles, tels que le procureur général, le chef de la police israélienne et le procureur de l’État, contre les licenciements pour des motifs inappropriés, politisant ainsi ces rôles.
La coalition affirme de son côté que l’interdiction du recours à la doctrine est nécessaire pour mettre fin à ce qu’elle appelle l’ingérence judiciaire dans la politique d’un gouvernement élu par des juges non-élus. Ils estiment que la Cour y a eu recours trop fréquemment, subvertissant ainsi la volonté de l’électorat et sapant le principe de la règle de la majorité démocratique.
**********************************************************************************************************************
Sondage : 28 % des Israéliens prêts à quitter le pays suite à la réforme judiciaire
Selon le sondage de la Treizième chaine, plus de la moitié des personnes interrogées disent craindre une guerre civile et des problèmes de sécurité en raison des divisions politiques
Des manifestants anti-refonte affrontant la police lors d’une manifestation contre la réforme du système judiciaire, à proximité de la Knesset, à Jérusalem, le 24 juillet 2023. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Une enquête réalisée mardi suite au vote de la première loi du programme de réforme judiciaire a révélé que près d’un tiers des Israéliens envisageaient de quitter le pays.
Selon le sondage de la Treizième chaine, 28 % des personnes interrogées envisagent de quitter Israël, 64 % non et 8 % sont indécises.
L’enquête fait suite à l’adoption de la loi par la coalition, lundi, en dépit des manifestations répétées, de l’opposition véhémente de personnalités du secteur de la justice, de la sécurité ou de l’économie et des milliers de réservistes menaçant de ne plus effectuer leurs périodes de réserve.
Plus de la moitié des personnes interrogées – 54 % exactement – disent craindre que la réforme nuise à la sécurité d’Israël et 56 % redoutent une guerre civile.
Ils sont 33 % à croire que le Premier ministre Benjamin Netanyahu est prêt à négocier des compromis sur les autres lois du paquet judiciaire – 84 % chez les électeurs du Likud, le parti du Premier ministre – et 55 % que les principales figures de l’opposition, Yair Lapid et Benny Gantz, devraient reprendre les négociations.
Les sondages d’opinion en Israël ne sont pas toujours très fiables, mais ils pèsent malgré tout sur les décisions de la classe politique et des électeurs. Le chef de HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, s’adressant aux médias, le 24 juillet 2023. (Capture d’écran vidéo)
Le sondage de la Treizième chaine s’est également penché sur la popularité des partis politiques dans l’éventualité d’élections nationales, pour l’heure absentes de l’ordre du jour.
Si des élections avaient lieu aujourd’hui, le parti Kakhol lavan de Benny Gantz remporterait 30 des 120 sièges de la Knesset, soit plus que tous les autres partis et notamment que le Likud, en deuxième position avec 25 sièges.
Parmi les partis de la coalition, les ultra-orthodoxes de Shas obtiendraient 10 sièges, YaHadout HaTorah, 7, et les partis d’extrême droite Otzma Yehudit et HaTzionout HaDatit, 5 sièges chacun.
Le parti Yesh Atid du chef de l’opposition Lapid arriverait en troisième position, avec 17 sièges, Yisrael Beytenu d’Avigdor Liberman en décrocherait 6, le parti arabe Hadash-Taal, 5, les islamistes de Raam, 6 et le parti de gauche Meretz, 4. Avoda et le parti arabe Balad de centre-gauche ne recueilleraient pas assez de voix pour siéger à la Knesset.
Les partis de l’actuelle coalition remporteraient 52 sièges, loin de la majorité et de leur effectif actuel de 64, et les partis de l’actuelle opposition, 63 sièges, sans Hadash-Taal, qui n’est pas aligné sur le reste de l’opposition. Les partis de l’actuelle opposition disposeraient donc d’une majorité suffisante pour former une coalition. Le ministre de la Défense Yoav Gallant (à gauche) et le ministre de la Justice Yariv Levin (à droite) se disputent face au Premier ministre Benjamin Netanyahu à la Knesset le 24 juillet 2023, avant le vote de la loi sur le caractère raisonnable. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
C’est l’institut Camille Fuchs qui a réalisé le sondage pour la Treizième chaine, sur la base de 711 personnes interrogées avec une marge d’erreur de 3,7 %.
Un autre sondage, effectué mardi par la Douzième chaine, a également conclu à un affaiblissement de l’actuel gouvernement Netanyahu si des élections avaient lieu aujourd’hui, avec un total de 53 sièges.
Les partis d’opposition, sans Hadash-Taal, obtiendraient 62 sièges.
Pour un tiers des personnes interrogées par la Douzième chaine, la réforme judiciaire doit être stoppée, auxquels s’ajoutent 29 % pour lesquels la réforme peut se poursuivre à condition de trouver un accord avec l’opposition. Pour 22 % des personnes interrogées, la réforme doit se poursuivre comme prévu, le reste n’ayant pas d’opinions arrêtées sur la question.
******************************************************************************************************************************
Israël : Plus de 50% des citoyens craignent une guerre civile (sondage).
Israël, plus de 50% des citoyens craignent une guerre civile (sondage) Publié le 26.7.2023 Plus de la moitié des Israéliens (56%) redoutent une guerre civile au milieu de la crise sociale et politique après l’annulation de la clause de raisonnabilité de la réforme judiciaire, selon un sondage de Channel 13, cité par les médias israéliens. Seuls 39% des répondants ont déclaré ne pas être préoccupés par une guerre civile, tandis que 9% ont déclaré qu’ils n’étaient pas sûrs. Les électeurs du Likoud ont déclaré qu’ils étaient moins préoccupés par une guerre civile, avec seulement 37% exprimant de telles préoccupations, tandis que 56% ont déclaré qu’ils n’étaient pas préoccupés. Israël : “Israël en crise”, le régime sioniste sur la voie de l’effondrement selon Hassan Nasrallah. Une majorité d’Israéliens (55%) sont intéressés par un retour aux pourparlers sur la réforme judiciaire entre la coalition et l’opposition, tandis que seulement 26% pensent que les pourparlers ne devraient pas être renouvelés. L’entité sioniste est actuellement divisée sur la question du projet controversé de réforme judiciaire du gouvernement de Netanyahu. En début de semaine, environ 10 000 réservistes de différentes unités de l’armée israélienne ont menacé de suspendre leur service volontaire si le projet de loi si la réforme judiciaire, au moins en partie, était adoptée à la Knesset. En outre, 1 142 réservistes de l’armée de l’air ont, eux aussi, déclaré leur intention de suspendre leur service volontaire. Rappelons qu’au lendemain du vote au Parlement israélien d’une disposition qui limite sérieusement les pouvoirs de la Cour suprême, les principaux quotidiens israéliens, à l’image de Haaretz, Israel Hayom et Yediot Aharonot, ont publié en couverture une page noire. |
*******************************************************************************************************************
Raisonnabilité : La Knesset adopte la première étape de la refonte judiciaire
Les 64 députés de la coalition ont voté « pour » la loi sur le « caractère raisonnable » lors du vote final après 30 heures de discussion en plénum ; toute l’opposition a quitté la salle
Les députés de la coalition autour du ministre de la Justice Yariv Levin pour prendre un selfie de célébration dans le plénum de la Knesset, après l’adoption de la première loi de refonte judiciaire de la coalition, le 24 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Après 29 semaines de manifestations et d’opposition publique de masse qui ont ébranlé le pays et divisé ses citoyens, la Knesset a donné son approbation finale lundi à une loi qui empêche les tribunaux de réexaminer le « caractère raisonnable » des décisions gouvernementales et ministérielles, le premier projet de loi majeur de la refonte judiciaire du gouvernement à être adopté.
Le projet de loi a été adopté en troisième et dernière lecture par 64 voix pour et 0 contre, l’ensemble des 56 membres de l’opposition ayant boycotté le vote en signe de protestation.
Le vote a conclu 30 heures de débats continus en plénière, qui ont débuté dimanche matin. Au cours de ce laps de temps, des centaines de milliers de manifestants sont descendus dans les rues, pour ou contre la limitation des contrôles judiciaires sur le pouvoir politique. De plus, le président américain Joe Biden a envoyé son cinquième message en un peu plus d’une semaine, appelant le gouvernement à ne pas précipiter les changements constitutionnels.
À la Knesset, les tentatives de dernière minute pour amender le projet de loi ou pour parvenir à un accord plus large avec l’opposition ont échoué, après le rejet de deux propositions de compromis présentées dimanche par un dirigeant syndical et par le président Isaac Herzog.
Immédiatement après le vote, le ministre de la Justice, Yariv Levin, a salué la loi comme « la première étape d’un processus historique visant à corriger le système judiciaire ». Les dirigeants de la coalition se sont publiquement engagés à poursuivre le processus, la prochaine étape étant un projet de loi visant à remanier le groupe chargé de sélectionner les nouveaux juges, attendu lors de la session d’hiver de la Knesset.
Le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a promis de déposer rapidement un recours auprès de la Haute Cour de justice contre la loi fraîchement adoptée. L’ONG Mouvement pour un gouvernement de qualité en Israël en a déjà déposé un. Le chef de l’opposition Yaïr Lapid s’adressant au plénum avant la deuxième lecture du projet de loi sur le « caractère raisonnable », à la Knesset, le 24 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
« Il s’agit d’une rupture totale des règles du jeu », a déclaré Lapid, quelques minutes après l’adoption de la loi. « Le gouvernement et la coalition peuvent choisir la direction que prend l’État, mais ils ne peuvent pas décider du caractère de l’État. »
La session plénière a été tendue et chaotique avant le vote décisif, avec des débordements ponctuant le discours de Lapid, dans lequel il a affirmé qu’Israël se dirigeait vers la destruction, et celui de Levin, dans lequel il a rejeté l’examen du critère de la « raisonnabilité » de la Cour comme étant entièrement dépendant d’une « vision du monde » subjective.
Présentant la position du gouvernement sur le projet de loi avant les deuxième et troisième lectures, Levin a fait valoir que le « caractère raisonnable » est un concept juridique nébuleux qui relève de l’opinion personnelle.
« Le caractère raisonnable est une vision du monde. Ce n’est pas le droit des contrats, ce n’est pas le droit de la preuve, ce n’est pas une question juridique », a déclaré le ministre de la Justice à propos de l’examen de la notion juridique du « caractère raisonnable », utilisé comme l’un des principaux outils de contrôle des nominations et des actions des gouvernements en période électorale, et de manière générale.
« Vous [les juges] voulez décider de ce qui est raisonnable et de ce qui ne l’est pas, à la place des personnes choisies par la nation ? Ça c’est raisonnable ? », a demandé Levin.
« Je voudrais dire plus que cela : qui a dit que ce qui est raisonnable aux yeux des juges serait même la chose logique à faire ? Qui a décidé que ses positions personnelles étaient meilleures que celles des ministres ? » Le ministre de la Justice Yariv Levin s’adresse à la Knesset le 24 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Un amendement à la Loi fondamentale : Le pouvoir judiciaire pour empêcher les tribunaux d’évaluer le « caractère raisonnable » des décisions administratives prises par le cabinet ou ses ministres, notamment les nominations et le choix de ne pas exercer des pouvoirs acquis.
Les partisans de cette loi affirment qu’il s’agit d’une correction nécessaire contre les abus de pouvoir judiciaire, tandis que les critiques affirment que le critère du « caractère raisonnable » est un frein important – et dans certaines situations, même le principal – contre l’utilisation inappropriée du pouvoir public.
Maintenant qu’elle a été adoptée, la coalition dispose d’une plus grande couverture juridique si elle choisit de poursuivre trois objectifs politiques que ses membres ont soutenus et qui auraient autrement été bloqués par l’examen du « caractère raisonnable » : licencier le procureur général ou d’autres gardiens de l’État de droit ; ne pas convoquer la commission de sélection des juges tant que sa composition n’a pas été modifiée ; et réintégrer le chef du parti le Shas, Aryeh Deri, démis de ses fonctions par la Cour, au sein du cabinet. Toutefois, les tribunaux disposent d’autres outils pour examiner et éventuellement annuler ces mesures.
Avant le vote, Lapid a déclaré au plénum que plusieurs membres de la coalition étaient opposés au projet de loi de la « raisonnabilité » et les a exhortés à arrêter le processus législatif au moment où les derniers votes du plénum allaient avoir lieu.
« Au cours des dernières semaines, j’ai parlé des centaines d’heures avec des membres de la coalition. Ne vous inquiétez pas, je ne citerai pas de noms, mais vous savez qui vous êtes et vous connaissez la vérité. Vous savez qu’il se passe quelque chose de terrible ici », a déclaré Lapid. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre de la Justice Yariv Levin, à la Knesset, le 24 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le chef du parti HaMahane HaMamlahti, Benny Gantz, s’est fait l’écho de Lapid et a également affirmé devant le plénum de la Knesset « qu’il y a une majorité dans cet auditorium, et je le sais pertinemment, qui ne veut pas de ce résultat ».
Lapid a dénoncé la législation comme une « prise de contrôle hostile de la majorité israélienne par une minorité extrémiste, et aussi une prise de contrôle hostile du parti [Likud] ».
« Vous savez que ce qui se passe ici est un désastre qui peut être évité. Une tragédie que nous devons arrêter », a-t-il déclaré.
« Vous pouvez l’arrêter. Ce n’est peut-être pas ce que vous aviez prévu. Ce n’est peut-être pas ce pour quoi vous êtes venu en politique, mais si vous ne l’arrêtez pas maintenant, vous vous réveillerez les nuits de ces trente prochaines années et vous vous demanderez pourquoi vous n’avez pas agi alors que vous saviez que c’était la bonne chose à faire », a ajouté Lapid.
Peu avant le vote, Lapid a annoncé, lors d’une interview télévisée, que les négociations étaient terminées, déclarant que la coalition voulait « démolir l’État, démolir la démocratie, démolir la sécurité d’Israël, l’unité du peuple d’Israël et nos relations internationales ».
Par conséquent, a-t-il conclu, « il est impossible de continuer à travailler avec eux – parce que c’est le gouvernement le plus irresponsable qu’il y ait jamais eu ici ». La police évacuant des manifestants anti-refonte judiciaire qui bloquent une route près de la Knesset, à Jérusalem, le 24 juillet 2023. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Gantz a affirmé que la loi, si elle était adoptée, porterait atteinte aux fondements démocratiques, à l’économie et à la sécurité d’Israël.
« Je suis très préoccupé par la situation en matière de sécurité et par ce que nous montrons à nos ennemis », a déclaré l’ancien ministre de la Défense et chef militaire.
Dimanche, Gantz a reçu un briefing spécial du chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi, sur l’état de préparation de l’armée, compte tenu du grand nombre de réservistes qui ont déclaré qu’ils ne participeraient pas au service volontaire pour protester contre la réforme du système judiciaire.
On s’attend à ce que les manifestations s’intensifient à Jérusalem et dans le pays après le vote de lundi. Les partisans de la refonte ont déjà annoncé qu’un rassemblement se tiendrait lundi soir devant la Knesset.
**********************************************************************************************************************
Pour la coalition, les anti-refonte de l’armée de l’air mènent un coup d’État
Smotrich : Israël ne peut se passer de ses pilotes mais ne peut pas non plus être dirigé par une « junte militaire » ; Ben Gvir : les projets de loi seront adoptés
Une cérémonie de remise des diplômes pour les pilotes qui ont terminé le cours de vol de l’armée de l’air israélienne, à la base aérienne de Hatzerim dans le désert du Néguev, le 26 décembre 2018. (Crédit : Aharon Krohn/Flash90)
Les principaux députés de la coalition se sont emportés vendredi après que plus de 1 100 membres de l’armée de l’air israélienne ont annoncé qu’ils interrompaient leur service volontaire pour protester contre les efforts du gouvernement visant à remanier radicalement le système judiciaire, affirmant que leur protestation équivalait à une tentative de coup d’État militaire.
Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a rédigé une lettre ouverte aux manifestants de l’armée de l’air, qui comptent plus de 400 pilotes, dans laquelle il les exhorte à revenir sur leur « erreur » qui risque de nuire gravement au pays, tandis que d’autres députés d’extrême-droite ont employé un langage bien plus combatif à l’encontre des pilotes.
Ils ont affirmé que le gouvernement ne se laisserait pas prendre en otage par ces derniers et qu’il procéderait à l’adoption du premier projet de loi de la refonte la semaine prochaine, avant de poursuivre avec le reste du paquet controversé visant à réduire de manière significative le pouvoir du système judiciaire dans les mois qui suivent.
La lettre de protestation envoyée plus tôt dans la journée de vendredi par 1 142 réservistes en service actif – sans précédent par son ampleur et par la place centrale qu’occupent les signataires au sein de Tsahal – est la dernière en date à avoir provoqué une onde de choc au sein de Tsahal, qui s’efforçait déjà d’endiguer un flot croissant de réservistes abandonnant leur service volontaire pour protester contre la réforme, ce qui a conduit les responsables de la Défense à avertir que ce phénomène croissant pourrait affecter l’état de préparation de l’armée nationale.
Dans leur lettre (en hébreu) adressée aux membres de la Knesset, le chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzi Halevi, et le chef de l’armée de l’air israélienne, le général de division Tomer Bar, les réservistes ont appelé le gouvernement à « parvenir à de larges accords » en ce qui concerne la réforme du système judiciaire, et à « renforcer la confiance de toutes les parties de la société dans le système judiciaire, et à préserver son indépendance (…). Une législation qui permet au gouvernement d’agir de manière extrêmement déraisonnable nuira à la sécurité de l’État d’Israël, entraînera une perte de confiance et une violation de [notre] consentement à continuer de risquer [notre] vie, et nous conduira, avec une profonde tristesse et sans avoir le choix, à suspendre [notre] service de réserviste volontaire ».
« Un pays qui se soumet aux menaces des généraux sera en fait un pays dirigé par une junte militaire », a déclaré Smotrich dans sa lettre de réponse.
C’est la deuxième fois que le ministre d’extrême-droite s’adresse ainsi aux pilotes de l’armée de l’air israélienne. En mars, il avait rédigé une autre lettre dans laquelle il s’excusait d’avoir appelé à « anéantir » la ville palestinienne de Huwara – une remarque qui avait conduit de nombreux pilotes à intensifier leurs protestations contre la refonte judiciaire du gouvernement, décrivant les propos de Smotrich comme un ordre opérationnel potentiel qu’ils seraient contraints d’exécuter s’il n’existait pas de tribunal indépendant capable d’interférer. Le ministre des Finances Bezalel Smotrich dirigeant une réunion de sa faction d’extrême-droite Hatizonout HaDatit, le 10 juillet 2023. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Dans sa lettre de vendredi, Smotrich a commencé par souligner qu’il « aimait » l’armée de l’air, y compris ceux qui avaient décidé de se joindre à la dernière manifestation.
« Je suis convaincu que, comme moi, la majorité absolue du peuple israélien aime, chérit et apprécie les décennies lors desquelles vous avez investi la majeure partie de votre temps et de votre talent dans la sécurité d’Israël. Nous vous sommes redevables et nous ne pouvons ni ne voulons nous passer de vous », a écrit Smotrich.
« Mais nous avons besoin de vous, tout comme nous avons besoin des mécaniciens de l’armée, des soldats de l’infanterie et du Corps Blindé Mécanisé, tout comme nous avons besoin des travailleurs de la technologie, des enseignants, des agriculteurs et des résidents d’implantations, des habitants des villes et des campagnes, des religieux, des laïcs et des ultra-orthodoxes », a poursuivi le ministre des Finances.
Il a clairement indiqué qu’il s’opposait aux récentes attaques menées contre les pilotes protestataires par les partisans de la réforme du système judiciaire. « Cela dit, je pense que vous commettez une grave erreur et que vous devez revoir votre chemin. »
Le ministre d’extrême-droite de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a été sans surprise beaucoup plus direct. « Le but de la lettre des refuzniks est de prendre le gouvernement israélien en otage et de lui imposer la position politique d’une minorité qui pense que le pays lui appartient, alors qu’ils piétinent l’armée du peuple et violent la volonté du peuple qui a donné au gouvernement le mandat de réformer le système judiciaire », a-t-il déclaré dans un communiqué.
« Nous ne céderons pas à cette dangereuse tentative de créer le chaos, afin que l’armée, qui dans un pays démocratique est subordonnée au gouvernement, soit celle qui fasse plier le gouvernement », a-t-il déclaré.
« Avec l’aide de Dieu, nous adopterons l’amendement demandé du système judiciaire, en commençant par le projet de loi sur le ‘caractère raisonnable’, mais ce n’est qu’un début ! » Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, s’exprimant lors d’une conférence de presse, à la Knesset, le 5 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le député Almog Cohen, du parti Otzma Yehudit de Ben Gvir, s’est montré insultant dans sa réponse, qualifiant les pilotes de « méprisables refuzniks » qui « renforcent l’ennemi ».
« Il n’y aura pas de reddition », a affirmé Cohen. « Nous ouvrirons le cours des pilotes et l’unité 8200 aux garçons de la périphérie… comme cela aurait dû être le cas depuis longtemps. Nous ne cédons pas au protectionnisme. »
Les membres du gouvernement accusent depuis longtemps les hauts gradés de l’armée de l’air et l’unité de renseignement d’élite 8200 d’être injustement dominés par la classe supérieure ashkénaze, tout en étant fermés aux personnes d’origine séfarade.
Le ministre de l’Économie, Nir Barkat, du parti du Premier ministre Benjamin Netanyahu, le Likud, a affirmé que « ceux qui choisissent de refuser de servir et sont prêts à négliger la sécurité de l’État d’Israël ne méritent pas de porter l’uniforme de l’armée israélienne ».
« Des générations de Juifs ont rêvé d’établir un État indépendant pour le peuple juif, avec une force de défense qui empêcherait une nouvelle Shoah. En tant qu’officier des parachutistes qui a été blessé au combat, qui a perdu des camarades dans mes bras et qui a perdu des membres de sa famille dans la Shoah, je dis que ceux qui refusent de servir abandonnent la sécurité de l’État du peuple juif contre nos ennemis ! »
« Aucun débat politique ne peut justifier un acte aussi immoral. Il est permis de protester, il est permis d’être en désaccord politique, mais la sécurité d’Israël ne doit pas être négligée. » Le député Almog Cohen assistant à une réunion de la commission des Finances à la Knesset, à Jérusalem, le 10 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
« La véritable démocratie ne consiste pas à se rendre à un certain nombre de soldats qui n’acceptent pas un mouvement politique. Si nous nous inclinons maintenant, les élections démocratiques n’auront eu aucun sens et nous serons confrontés à cette menace encore et encore. Dans une démocratie, la voix du médecin et du pilote est égale à celle de l’ouvrier du supermarché et de l’usine. Lundi, la loi [sur le caractère raisonnable] sera adoptée », a estimé le président de la coalition, Ofir Katz.
La plupart des Israéliens qui effectuent leur service militaire national obligatoire sont tenus de participer au service annuel de réserve, mais ceux qui ont servi dans des unités spéciales – dont les pilotes – doivent se porter volontaires pour continuer à exercer les mêmes fonctions lorsqu’ils sont dans la réserve, un engagement qu’ils prennent généralement de leur propre chef. En raison de la nature de leurs fonctions, les troupes des forces spéciales et les pilotes de réserve se présentent plus fréquemment aux entraînements et aux missions.
Ces derniers mois, de nombreux réservistes ont fait savoir qu’ils ne seraient pas en mesure de servir dans un Israël non-démocratique, ce que certains estiment que le pays deviendra si les projets de réforme du gouvernement se concrétisent.
Le porte-parole de l’armée, le contre-amiral Daniel Hagari, a répondu à la lettre des réservistes en déclarant que l’armée israélienne examinait la situation des signataires et qu’elle « étudierait les significations en conséquence ».
« La sécurité des citoyens de l’État d’Israël repose sur les membres des forces permanentes et de réserve, qui sont les meilleurs de notre peuple et dont nous apprécions pleinement la contribution », a déclaré Hagari dans un communiqué.
Jeudi, le général de division Bar a déclaré que l’armée de l’air continuait à fonctionner comme d’habitude malgré les appels des réservistes à ne pas se présenter pour le service volontaire en signe de protestation contre le remaniement, mais il a ajouté que le discours actuel cause d’importants dommages qui prendront « des années à être réparés ». Le Premier ministre Benjamin Netanyahu prononce un discours depuis le Bureau du Premier ministre, à Jérusalem, le 20 juillet 2023. (Crédit : Amos Ben Gershom/GPO)
Dans un discours à la nation prononcé jeudi soir, Netanyahu a déclaré que la véritable menace pour la démocratie israélienne n’était pas la reforme prévue par son gouvernement – qui supprimera les freins et contrepoids à la Knesset et placera la plupart des nominations judiciaires sous contrôle politique – mais le refus de se présenter au service volontaire, comme beaucoup l’ont menacé si le projet de loi sur le « caractère raisonnable » était adopté.
« Dans une démocratie éclairée, les militaires sont subordonnés à l’armée, ils ne sont pas subordonnés au gouvernement. Lorsque des éléments militaires tentent de dicter la politique du gouvernement par des menaces, c’est illégitime dans une démocratie. Et s’ils y parviennent, c’est la fin de la démocratie », a-t-il jugé.
« Aucun gouvernement responsable, aucun État responsable ne peut accepter cela, et chaque citoyen doit s’y opposer avec force », a ajouté Netanyahu. « Dans une démocratie digne de ce nom, ce n’est pas la main qui tient l’arme qui détermine ce qui se passe, mais la main qui dépose le bulletin de vote dans l’urne. »
****************************************************************************************************************************
10 000 réservistes supplémentaires annoncent la fin de leur service volontaire
Quelque 500 réservistes actifs du Directorat des Renseignements, qui demandent « l’arrêt immédiat des agissements dictatoriaux », annoncent la fin de leur service volontaire
Des membres du groupe de protestation des réservistes « Frères d’armes » tenant une conférence de presse, à Herzliya, le 22 juillet 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)
Quelque 10 000 réservistes de Tsahal vont suspendre leur service de réserve volontaire pour protester contre les plans du gouvernement visant à réformer le système judiciaire, a annoncé samedi soir un important groupe de protestation.
Lors d’une conférence de presse à Herzliya, les dirigeants du groupe Frères d’armes ont annoncé cette décision, la dernière en date à avoir provoqué une onde de choc au sein de Tsahal, qui s’efforce d’endiguer un flot croissant de réservistes qui abandonnent leur service volontaire pour protester contre la refonte, alors que les responsables de la Défense avertissent que le phénomène pourrait affecter l’état de préparation du pays.
« Nous avons tout essayé, c’est là que nous nous arrêtons. Nous nous sommes engagés à servir le royaume et non le roi. Nous sommes déterminés, nous sommes des combattants, nous aimons ce pays et nous ne l’abandonnerons pas », a déclaré Eyal Nave, l’un des dirigeants de Frères d’armes.
Il a précisé que le groupe représente environ 10 000 réservistes de dizaines d’unités différentes qui mettraient fin à leur service volontaire si le gouvernement continuait à faire avancer la législation largement controversée.
Le capitaine (réserviste) Nevo Erez, ancien commandant du commando naval d’élite Shayetet 13 et ancien haut responsable de l’agence de renseignement du Mossad, a déclaré lors de la conférence qu’il ne serait pas en mesure de servir dans ce qu’il a qualifié de « dictature ».
« C’est vous et vous seul qui êtes responsable de ce qui se passe ici. Nous avions confiance dans le gouvernement, mais le gouvernement nous a brisés. Je ne me porterai pas volontaire pour servir dans un État dictatorial », a-t-il déclaré en s’adressant directement au Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Plus tôt dans la journée de samedi, près de 500 réservistes actifs du Directorat des Renseignements militaires ont publié une lettre annonçant qu’ils suspendaient eux aussi leur service volontaire en signe de protestation contre le remaniement.
Dans leur lettre, les réservistes des services de renseignements militaires ont appelé le gouvernement à « cesser immédiatement les mesures dictatoriales qui violent le contrat entre le gouvernement d’Israël et ses citoyens ». Illustration : Une soldate du Directorat des Renseignements militaires de Tsahal travaillant sur un ordinateur. (Crédit : Armée israélienne)
« Bien que nous ayons appelé à de nombreuses reprises à des négociations et à des accords généraux sur les questions en jeu, malheureusement, non seulement les négociations à la résidence présidentielle ne se sont pas bien déroulées, mais le gouvernement continue à faire avancer son coup d’État avec encore plus de force », peut-on lire dans la lettre.
Les réservistes ont déclaré qu’ils informaient leurs commandants « avec une grande tristesse, que nous suspendons notre volontariat pour le service de réserve jusqu’à nouvel ordre ».
La lettre, adressée au chef du Directorat des Renseignements militaires, le général de division Aharon Haliva, est signée par 904 réservistes, dont 487 qui servent régulièrement.
Vendredi, plus d’un millier de réservistes de l’armée de l’air israélienne ont publié une lettre annonçant qu’ils suspendaient leur service de réserve volontaire pour protester contre la réforme judiciaire. Samedi soir, le nombre de signataires de la lettre s’élevait à 1 192, dont plus de 400 pilotes. Les pilotes de l’armée de l’air israélienne se dirigeant vers leur avion lors de l’exercice international « Blue Flag » sur la base aérienne d’Ovda dans le sud d’Israël, le 24 octobre 2021. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)
Les manifestations contre la réforme judiciaire affectent l’armée depuis maintenant des mois et les menaces s’intensifient alors que le gouvernement propose un projet de loi interdisant aux juges d’utiliser la notion juridique dit du « caractère raisonnable » pour les décisions gouvernementales et ministérielles, dans le cadre du plan controversé de la coalition visant à remanier le système judiciaire.
Les menaces ont simultanément renforcé la pression sur le gouvernement pour qu’il mette fin à la législation controversée, tout en renforçant la détermination de la coalition, les membres du gouvernement de Netanyahu affirmant qu’ils ne peuvent en aucun cas capituler devant ce qu’ils considèrent comme étant un chantage de la part de membres de l’armée, ce qui, selon eux, pourrait créer un dangereux précédent.
Plus tôt dans la journée de samedi, des dizaines d’anciens hauts responsables des services de sécurité – y compris d’anciens chefs de Tsahal, de l’agence de renseignement du Mossad et de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet – ont envoyé une lettre à Netanyahu lui demandant d’interrompre la législation sur la refonte du système judiciaire afin de permettre la reprise des négociations, tout en exprimant leur soutien aux réservistes qui ont menacé de cesser de se porter volontaires en signe de protestation.
Entre-temps, les responsables de la Défense et les politiciens des deux bords ont averti que les refus massifs pourraient rendre Israël plus vulnérable aux menaces extérieures, car l’état de préparation de l’armée, en particulier de l’armée de l’air, s’en trouverait affecté.
Les réservistes, en particulier les membres de l’armée de l’air, sont un élément clé des activités de routine de l’armée. Les responsables de la Défense ont déclaré que les pilotes pourraient nuire à leurs compétences en interrompant leurs fréquents exercices d’entraînement, et qu’il faudrait beaucoup de temps pour rétablir leurs capacités de vol. Les réservistes israéliens signant une déclaration de refus du service pour protester contre le plan de refonte du système judiciaire israélien du gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Tel Aviv, le 19 juillet 2023. (Crédit : AP Photo/Ohad Zwigenberg)
Lors du désengagement israélien de la Bande de Gaza en 2005, l’armée avait anticipé une importante vague d’insubordination de la part des membres de l’armée permanente, bien que peu d’entre eux aient finalement refusé d’exécuter les ordres d’évacuation.
L’armée a déclaré qu’elle prendrait des mesures disciplinaires à l’encontre des soldats en service actif qui refuseraient de se présenter au travail lorsqu’ils en recevraient l’ordre, voire qu’elle les licencierait, mais elle a souligné qu’aucune mesure ne serait prise à l’encontre des réservistes qui menaceraient simplement de ne pas se présenter au travail.
Les mesures prises à l’encontre des réservistes qui ne se présentent pas à leur poste ne sont pas claires. Tsahal a déclaré qu’elle traiterait chaque cas individuellement, y compris la suspension, le licenciement ou les peines de prison.
Tal Schneider a contribué à cet article.
Emanuel Fabian a contribué à cet article.
******************************************************************************************************************
Halevi : L’armée a été entraînée dans le débat politique, la cohésion mise à mal
Par ailleurs, des vétérans de plusieurs unités d’élite ont averti dimanche que les tensions liées à la refonte judiciaire se sont déjà propagées des réservistes aux sous-officiers
- Le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi, s’exprimant lors de la cérémonie de Yom HaZikaron au mur Occidental, le 24 avril 2023. (Crédit : Capture d’écran YouTube)
Dans une missive adressée à ses troupes, le chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzi Halevi, affirme que l’unité au sein de l’armée israélienne a été mise à mal par les appels des réservistes à mettre fin à leur service volontaire pour protester contre les projets controversés du gouvernement visant à réformer en profondeur le système judiciaire.
« Nous avons agi pour tenir [Tsahal] à l’écart du débat, mais en raison de son intensité dans la société israélienne, nous y avons été entraînés, et la cohésion [de l’armée] en a souffert », a déclaré le chef d’état-major, Halevi. « Il est de notre devoir d’empêcher ces failles de se répandre. »
Halevi déclare qu’il ne discutera pas du débat sur la refonte, mais que le rôle de Tsahal est de « protéger le pays, notamment de permettre un débat dans des conditions sûres ».
Il poursuit en disant que les « failles » dans l’unité de l’armée « sont dangereuses ».
« Une troupe au sol peut penser à tort qu’un pilote de l’armée de l’air ne l’aidera pas à cause du débat ; et un pilote peut penser à tort qu’il n’a pas besoin de se préparer et de rester prêt au combat, alors qu’en réalité, on pourrait avoir besoin de lui bientôt », précise Halevi.
« Même s’il y a un débat, la cohésion est de la plus haute importance », souligne-t-il.
Halevi affirme que servir dans l’armée israélienne est « une obligation qui constitue un grand privilège » pour les forces permanentes et les forces de réserve.
« Aucun des membres du service n’a le droit de dire qu’il ne servira plus. Ils n’ont pas le droit de ne pas se présenter au service ou de refuser un ordre », déclare-t-il.
Halevi affirme que Tsahal « est forte grâce à son peuple ». « Nous n’avons pas d’autre nation et nous n’avons pas d’autre armée. »
Il juge qu’il n’est pas trop tard pour réparer les dommages causés à l’unité de Tsahal. « Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons maintenir le rôle de Tsahal dans la défense du pays et la garantie de son existence. »
Par ailleurs, des vétérans de plusieurs unités d’élite ont averti dimanche que les tensions liées à la refonte judiciaire se sont déjà propagées des réservistes aux sous-officiers servant dans l’armée, troublant leurs rangs.
« Ces dernières semaines et ces derniers jours, nos unités nous ont fait part d’un désir croissant et concret parmi (au moins) des dizaines de sous-officiers actifs de mettre fin à leur contrat (ou du moins de ne pas le prolonger) », ont-ils indiqué dans une déclaration citée par les médias israéliens.
« Les chiffres augmentent chaque jour. La décision de ces sous-officiers de rester ou de continuer à servir est basée sur le volontariat. »
Les réservistes à l’origine de la lettre appartiennent à des unités de haut niveau du renseignement militaire, telles que la Division des opérations spéciales et l’unité 8200, l’unité de commando naval Shayetet 13 et le Corps Médical, entre autres.
« La situation est bien plus grave que ce que décrivent les chefs militaires », affirment-ils.
« Une telle scission dramatique ne peut rester derrière des portes closes. » Des membres du groupe de protestation des réservistes « Frères d’armes » tenant une conférence de presse, à Herzliya, le 22 juillet 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)
Même l’ex-chef du Mossad, Yossi Cohen, un proche de Netanyahu, a demandé ce dimanche au gouvernement de mettre fin au mouvement de réforme judiciaire et reprendre les négociations, déplorant que le processus législatif menaçait très concrètement la sécurité du pays.
Enfin, quelque 10 000 réservistes de Tsahal ont annoncé qu’ils allaient suspendre leur service de réserve volontaire pour protester contre les plans du gouvernement visant à réformer le système judiciaire, a annoncé samedi soir un important groupe de protestation.
Lors d’une conférence de presse à Herzliya, les dirigeants du groupe Frères d’armes ont en effet annoncé cette décision, la dernière en date à avoir provoqué une onde de choc au sein de Tsahal.
« Nous avons tout essayé, c’est là que nous nous arrêtons. Nous nous sommes engagés à servir le royaume et non le roi. Nous sommes déterminés, nous sommes des combattants, nous aimons ce pays et nous ne l’abandonnerons pas », a déclaré Eyal Nave, l’un des dirigeants de Frères d’armes.
Des dizaines d’anciens hauts responsables de la sécurité – y compris d’anciens chefs de Tsahal, de l’agence de renseignement du Mossad et de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet – ont envoyé de leur côté samedi une lettre au Premier ministre lui demandant d’interrompre la législation sur la refonte du système judiciaire afin de permettre la reprise des négociations, tout en exprimant leur soutien aux réservistes qui ont menacé de cesser de se porter volontaires en signe de protestation.
*****************************************************************************************************************
« Les incitations à l’insubordination et l’insubordination elle-même sont contraires à la démocratie et à la loi », a dit Netanyahu.
« C’est vrai dans n’importe quelle démocratie mais dans notre démocratie, les incitations à l’insubordination et l’insubordination elle-même mettent directement en péril la sécurité de tous les citoyens israéliens », a-t-il continué. « Elles contribuent à éroder la dissuasion contre nos ennemis… et elles sapent la discipline au sein de Tsahal ».
« Il ne peut pas y avoir un groupe qui, au sein de l’armée, menace le gouvernement élu en disant que si le gouvernement ne fait pas ce qu’il désire, alors il prendra en otage la sécurité israélienne », a-t-il ajouté. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, au centre, arrive à une rencontre du cabinet à son bureau de Jérusalem, le 17 juillet 2023. (Crédit : AP Photo/Ohad Zwigenberg, Pool)
Netanyahu a estimé qu’aucun gouvernement « ne peut accepter une telle exigence et c’est une destruction de la démocratie ».
« Le gouvernement n’acceptera pas l’insubordination et il prendra des mesures », a-t-il affirmé.
Il a aussi reconnu que les protestataires s’inquiétaient « pour l’avenir du pays » mais il a insisté sur le fait qu’Israël « est et a toujours été une démocratie », rejetant les critiques qui déclarent que le plan de refonte du système de la justice israélien portera atteinte à la nature libérale du pays et sapera l’équilibre des pouvoirs.
Ripostant au Premier ministre, le groupe de protestation Frères d’armes a juré de continuer à s’opposer au projet de refonte qui viendrait bouleverser le système judiciaire israélien, recommandant vivement au ministre de la Défense, Yoav Gallant, de stopper son avancée.
« Le Premier ministre commence à intérioriser l’ampleur de la situation, une situation dans laquelle des milliers de réservistes ne le laisseront pas transformer l’État juif en dictature et ne le laisseront pas éliminer l’armée du peuple », a indiqué le communiqué.
Faisant appel à Gallant, les soldats des réserves ont appelé le ministre de la Défense à « stopper la destruction du Troisième Temple », faisant référence à l’État moderne d’Israël.
« Nous avons juré de servir le royaume, nous n’avons pas juré de servir le roi », ont-ils poursuivi.
Les propos tenus par Netanyahu sont arrivés dans le sillage d’une réunion présumée entre Gallant, le chef d’état-major de l’armée israélienne, Herzi Halevi, et d’autres hauts-responsables militaires qui auraient évoqué les conséquences possibles du refus des réservistes de servir – en particulier en ce qui concerne les pilotes.
Selon des informations qui ont fuité et qui ont été reprises par les médias israéliens, Gallant et Halevi réfléchiraient à parler à Netanyahu dans les prochains jours pour lui faire part de leurs préoccupations face à l’impact potentiellement négatif de ce refus sur les opérations militaires.
De nombreux réservistes – qui font partie intégrante des activités de routine de Tsahal, notamment au sein des meilleures unités – avertissent depuis plusieurs mois qu’ils n’accepteront pas de se mettre au service d’un Israël qui deviendrait « non-démocratique », selon eux, si le plan de refonte du système judiciaire gouvernemental devait être mené à bien.
Les appels au refus de servir, dans le cadre du devoir de réserve, s’étaient déjà multipliés au début de l’année lorsque le projet de refonte radical du système de la justice avait été annoncé et lorsqu’il avait commencé à avancer devant le Parlement. Condamnés à la fois par les personnalités politiques de premier plan de la coalition et de l’opposition, ces appels ont néanmoins continué à croître. Les réservistes manifestent contre le plan de refonte du système judiciaire gouvernemental aux abords de l’habitation du ministre de la Défense Yoav Gallant au Moshav Amikam, le 8 juillet 2023. (Crédit : Shir Torem/Flash90)
Cette menace du refus de servir s’est encore renforcée, ces dernières semaines, lorsque le gouvernement a recommencé à faire avancer des législations entrant dans le cadre du plan. Le projet avait été mis largement en pause, au mois de mars dernier, suite aux pressions exercées sur Gallant par les réservistes.
Gallant avait averti, à la fin du mois de mars, que la fracture entraînée par le plan de refonte judiciaire dans le pays entraînait des divisions au sein de l’armée, des clivages qui représentaient une menace tangible pour la sécurité du pays. En réponse à cette mise en garde publique, Netanyahu avait ordonné le limogeage de son ministre de la Défense – une initiative qui avait entraîné un mouvement de protestation intense. Face à l’ampleur de l’indignation nationale, Netanyahu avait décidé de suspendre le plan de refonte du système judiciaire pendant trois mois et il avait réintégré Gallant.