Gay Pride 2023 Jérusalem

Des dizaines de milliers d’Israéliens à la marche des fiertés à Jérusalem

Si la « Beasts parade » d’extrémistes de droite a été annulée, quelques individus se sont néanmoins rendus sur les lieux afin de s’opposer à la marche

  • Plusieurs dizaines de milliers d’Israéliens ont participé jeudi à Jérusalem, sous haute surveillance policière, à la marche des fiertés, protestant notamment contre la présence au gouvernement depuis décembre de ministres hostiles aux LGBT+.

Dans une nuée de drapeaux arc-en-ciel et israéliens, quelque 30 000 personnes y ont participé, établissant un record depuis 2016, d’après les organisateurs.

« Face au gouvernement le plus homophobe de l’histoire, nous devons être un rempart pour empêcher la privation de nos droits et lutter pour l’égalité de chacun », a déclaré à l’AFP Yoray Lahav-Hertzano, un député centriste ouvertement homosexuel participant à la marche.

Yehonatan Elitzur, de Mevasseret Zion, a déclaré qu’il participait à l’évènement pour « lutter pour l’égalité et contre la haine », ajoutant que la communauté LGBT souffrait toujours de discrimination et d’intolérance.

« Je ressens cette haine. Je l’ai ressentie au travail, lors de mon service militaire. Et à Jérusalem en particulier, je ressens une intolérance latente », a déclaré Elitzur, qui a grandi dans la capitale.

Il s’est dit « heureux de voir autant de gens qui ne font pas nécessairement partie de la communauté LGBT » participer au défilé pour « lutter pour tout ce qui est décent ».

Elitzur a expliqué qu’il venait « d’un milieu totalement libéral » et qu’il lui était donc « difficile d’accepter des points de vue radicaux, remplis de haine ».

Il estime que la contre-manifestation n’aurait pas dû être autorisée, car « il y a une différence entre la liberté d’expression et le fait de jeter du poison ». Yehonatan Elitzur participant à la Gay Pride de Jérusalem, le 1er juin 2023. (Crédit : Jeremy Sharon/Times of Israel)

Des activistes d’extrême-droite ont finalement annulé la « Beasts parade » (« marche des bêtes ») qui était prévue pour contrer la Gay Pride de Jérusalem.

Un message a été envoyé aux militants par le leader extrémiste Michael Ben Ari, qui a déjà été empêché de se présenter à la Knesset en raison de ses opinions racistes.

Le message disait qu’ils restent « opposés de toute leur âme à la ‘Parade de l’abomination’ à Jérusalem et dans les autres villes d’Israël ».

Cependant, ils ont appelé les militants à s’opposer à la « normalisation » de la Gay Pride par des « protestations et une lutte intellectuelle ».

« Les humilier serait contre-productif, car il n’y aura pas de conversation sur l’essence du problème, mais des insultes », a précisé le texte.

Quelques individus d’extrême-droite se sont néanmoins rendus sur les lieux afin de s’opposer à la manifestation. Dans cette petite contre-manifestation organisée de l’autre côté d’un cordon policier, on pouvait lire « Non à la marche de l’abomination », ont constaté des journalistes de l’AFP.

Lors des précédentes « Beasts parades », les participants avaient défilé dans la ville avec des ânes.

Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a quant à lui déclaré que sa priorité, alors que la Gay Pride de Jérusalem avait débuté, était de veiller à ce qu’il n’y ait pas d’autre affaire « folle » comme le meurtre de Shira Banki en 2015. Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, s’adressant à la presse devant le quartier général de la police, lors de la Gay Pride de Jérusalem, le 1er juin 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

« Il est clair que dans mon rôle de ministre de la Sécurité nationale, je fais et ferai tout pour qu’il n’y ait pas d’autre affaire folle, comme le meurtre de l’adolescente Shira Banki », a déclaré le ministre d’extrême-droite à son arrivée au centre de commandement de la police pour superviser la sécurité de la marche.

Ben Gvir avait réitéré son soutien à la contre-manifestation. « C’est leur droit tant qu’ils n’enfreignent pas la loi et j’ai dit à la police que je ne voulais pas voir de photos d’ultra-orthodoxes ou de religieux qui marchent dans les rues de Jérusalem et qui sont expulsés parce qu’ils sont religieux, parce qu’ils portent une kippa ou parce qu’ils portent des jupes », avait-il déclaré. Shira Banki, 16 ans, poignardée à mort le 30 juillet 2015 pendant la Gay Pride de Jérusalem. (Crédit : Facebook)

Ben Gvir a été raillé par les participants à la Gay Pride de Jérusalem jeudi alors qu’il passait devant la zone de rassemblement. Les participants ont scandé « Honte » et « Dehors les nazis » à l’encontre du ministre d’extrême-droite qui, en 2006, avait participé à la marche haineuse « Beasts parade » contre la communauté LGBT.

« C’est particulièrement important (de participer) cette année car le ministre chargé de notre sécurité, Ben Gvir, est celui qui a manifesté des années contre nous en nous qualifiant d’animaux », a témoigné auprès de l’AFP Oshrit Assaf, 28 ans, venue avec sa compagne.

À Jérusalem, ville sainte pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, les LGBT+ se plaignent d’être mal acceptés par la population.

D’après la police, quelque 2 000 policiers ont été mobilisés et trois personnes, suspectées « de s’être exprimées de façon menaçante vis-à-vis de la marche », ont été arrêtées avant la parade.

La Gay Pride de Jérusalem fait l’objet de mesures de sécurité et de restrictions importantes depuis qu’un extrémiste ultra-orthodoxe, Yishaï Schlissel, a poignardé Shira Banki à mort lors du défilé en 2015. Schlissel a perpétré l’attaque à l’arme blanche de 2015 quelques semaines seulement après avoir été libéré de la prison où il avait purgé une peine de dix ans pour avoir poignardé et blessé des marcheurs lors de la Gay Pride de 2005. Il purge actuellement une peine de prison à perpétuité.

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Les propos d’un élu du Likud sur l’homosexualité provoquent l’indignation

Certains parents font délibérément de leurs enfants des homosexuels en faisant notamment jouer leurs petits garçons avec des poupées, a dit Nissim Vaturi

Le député du Likud Nissim Vaturi participant à une discussion à la Knesset, à Jérusalem, le 21 novembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Le député Nissim Vaturi (Likud) a provoqué un tollé mardi en affirmant que certains parents décidaient délibérément de faire de leurs enfants des homosexuels afin de soutenir les valeurs LGBTQ, notamment en donnant à leurs fils des poupées avec lesquelles ils peuvent jouer.

Vaturi a accordé une interview à la chaîne de la Knesset, dans laquelle il a exprimé son soutien à la récente décision prise par le gouvernement d’accorder au député d’extrême-droite Avi Maoz le pouvoir de superviser les programmes extra-scolaires pour les écoles publiques.

Maoz, seul représentant de la faction Noam à la Knesset, adopte un positionnement résolument anti-LGBTQ, anti-pluraliste et masculiniste, ce qui a suscité de vives inquiétudes et des critiques de la part des politiciens et des organisations qui s’opposent à sa volonté d’exercer un contrôle sur les fournisseurs externes des matériels scolaires qui complètent les programmes des écoles publiques.

Vaturi a déclaré que les enfants ne devaient pas être influencés sur leur orientation sexuelle et il a affirmé que certains parents essayaient délibérément d’encourager leurs enfants à être homosexuels pour des raisons idéologiques.

« Il y a des parents qui encouragent les [valeurs] LGBT, ils donnent une poupée à un garçon parce qu’ils ont l’impression qu’il devrait être gay, mais ce n’est pas juste. Personne ne doit influencer les gens, ni Avi Maoz, ni les laïcs. Il n’est pas nécessaire de promouvoir ce genre de choses, il n’est pas nécessaire de promouvoir les questions LGBT. Laissez vos enfants choisir ce qu’il veulent être, qu’ils soient religieux, laïcs ou LGBT. Une personne doit pouvoir choisir sa propre voie », a déclaré Vaturi.

Ces propos ont suscité l’indignation de Roee Neuman, l’un des chefs de file du mouvement de protestation anti-gouvernemental qui affirme que la coalition actuelle porte atteinte aux valeurs démocratiques d’Israël.

« Je ne sais pas par où commencer pour expliquer les choses à cette ordure d’homophobe qu’est Vaturi », a-t-il écrit sur Twitter. « J’ai grandi dans un environnement où je ne connaissais pas une seule personne gay, je ne jouais pas à la poupée et je suis toujours aussi homosexuel. Personne ne fait de quelqu’un une personne gay ou trans. J’ai grandi avec la peur au ventre qu’on découvre que j’étais gay. » Le chef de Noam, Avi Maoz, s’exprimant lors d’une réunion à la Knesset, à Jérusalem, le 20 mars 2023. (Crédit : Erik Marmor/Flash90)

Dimanche, le cabinet a accordé à Maoz, via un vote, la supervision des programmes externes dans les écoles dans le cadre de son Bureau de l’identité nationale juive.

L’unité serait chargée de superviser Gefen, le groupe de fournisseurs approuvés et financés par le ministère de l’Éducation, qui comprend plus de 20 000 programmes mis à la disposition des administrateurs des écoles publiques. Les fournisseurs de programmes externes font partie intégrante de l’éducation publique et ils proposent un large éventail d’offres allant de l’éducation sexuelle à la préparation d’une bar mitzvah, en passant par l’agriculture.

Outre le « système de transparence pour les parents », qui fournit des informations aux parents sur le contenu des programmes éducatifs, l’identité des vendeurs et les sources de financement des programmes, le Bureau de l’identité nationale juive de Maoz aura trois autres objectifs, selon la décision gouvernementale qui a été formulée en termes vagues.

Le Bureau devra également « renforcer l’identité juive » par le biais de projets de recherche et de subventions, « assister et soutenir les institutions éducatives » en ce qui concerne l’identité nationale juive, et publier des informations sur « l’approfondissement et le renforcement de l’identité nationale juive ».

Plusieurs personnalités politiques et organisations de l’opposition ont exprimé leurs inquiétudes concernant le retour prévu de Maoz dans le domaine de l’éducation, compte-tenu notamment de ses positions publiques claires contre les droits des LGBT, la parité hommes-femmes et les approches pluralistes du Judaïsme.

Les propos de Vaturi ont également été tenus un jour avant la très controversée Gay Pride de Jérusalem.

Le groupe d’extrême-droite Lehava se prépare à des violences potentielles lors de la parade de Jérusalem, et il a affiché de nombreux messages de menace dans un groupe de discussion interne – des messages qui souhaitent la mort des marcheurs pro-LGBTQ, selon un article qui a été publié lundi. Un participant agitant un drapeau arc-en-ciel LGBTQ avec l’étoile de David lors du défilé de la Gay Pride, à Jérusalem, le 3 juin 2021. (Crédit : Emmanuel Dunand/AFP)

Quelque 2 000 policiers – dont certains en civil – devraient être déployés le long de l’itinéraire du défilé et autour de celui-ci, a indiqué la police dans un communiqué lundi. Une contre-manifestation d’extrême-droite aura lieu au même moment.

Un extrémiste ultra-orthodoxe avait assassiné une adolescente, Shira Banki, lors de la Gay Pride de 2015.

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Manifestation contre l’édition en hébreu d’un livre critiquant la « folie transgenre »

Le livre « Irreversible Damage » de l’écrivaine américaine Abigail Shrier affirme que la dysphorie de genre est le résultat d’une pression sociale

Des membres de la communauté LGBT et des sympathisants participant à une manifestation en faveur de la communauté transgenre, à Tel Aviv le 22 juillet 2018. (Crédit : Miriam Alster/Flash90)

Des centaines de manifestants ont protesté dimanche à Ramat Gan contre le lancement de l’édition en hébreu de Irreversible Damage, un livre controversé qui affirme que la dysphorie de genre est le résultat de la pression sociale.

L’auteure américaine Abigail Shrier a assisté à l’événement organisé par la maison d’édition conservatrice Sella Meir, qui a fait salle comble, alors qu’environ 300 manifestants brandissaient des drapeaux arc-en-ciel et des drapeaux israéliens et scandaient des chants à l’extérieur, selon le site d’information Ynet.

Une vidéo de la scène montre des manifestants agitant des drapeaux des fiertés, des drapeaux transgenres et des drapeaux israéliens, tout en battant des tambours et en scandant des slogans LGBTQ.

Un événement précédent avait été annulé à Tel Aviv après que le lieu de réunion a été informé du contenu controversé du livre. Shrier a déclaré sur Twitter que deux des plus grands détaillants israéliens avaient refusé de vendre le livre.

À l’intérieur, un militant a interrompu la présentation de Shrier en criant : « Je ne suis pas une maladie, je suis une personne », avant d’être traîné hors de la salle par la sécurité.

Sella Meir a remercié l’auteure d’avoir mené un dialogue sur son livre qui « analyse un phénomène inquiétant qui touche tous les parents israéliens ».

« Malgré les protestations massives, nous avons eu une participation incroyable ce soir et le dialogue fougueux et rauque qui fait la réputation d’Israël », a déclaré Shrier.

Irreversible Damage »: The Transgender Craze Seducing Our Daughters (Dommages irréversibles : La folie transgenre qui séduit nos filles) a été publié en 2020. Shrier a affirmé que des « filles biologiques » s’identifiaient comme des hommes et cherchaient à suivre une thérapie de genre en raison des pressions sociales.

Elle affirme qu’un tel phénomène était rare jusqu’à récemment et conseille aux parents de « protéger leurs filles » de ce qu’elle a décrit comme une mode.

Le livre a été immédiatement critiqué par les militants LGBTQ et la communauté médicale, qui ont accusé Shrier de diffuser des informations erronées et de mettre en danger les jeunes transgenres en présentant leur identité comme une maladie mentale.

Amy Roseman, une organisatrice de manifestations en Israël qui a subi un processus d’affirmation du genre, a déclaré qu’il était important de manifester contre le livre parce qu’il vise à « convaincre les parents de ne pas accepter leurs enfants transgenres ».

« C’est un livre plein de mensonges. Il tente d’importer des idées de l’étranger, qui sont étrangères au dialogue politique en Israël. C’est quelque chose qui n’a pas sa place ici et qui est plein de haine », a déclaré Roseman à Ynet. « Le livre promeut l’idée que la transidentité est quelque chose qui peut être guéri. Nous parlons beaucoup de la thérapie de conversion. Elle conduit à la dépression, au suicide, à la maladie mentale et à de nombreuses souffrances qui pourraient être évitées si les parents acceptaient leurs enfants ».

Le député travailliste Gilad Kariv a établi un lien entre la protestation contre le livre « transphobe et LGBTQ-phobe » et les manifestations contre la réforme judiciaire controversée du gouvernement, citant la publication par Sella Meir de textes du député du parti HaTzionout HaDatit, Simcha Rothman, l’un des architectes de la législation.

« Cette attaque coûte la vie à des jeunes gens et nous ne pouvons pas rester silencieux », a déclaré Kariv.

Depuis sa parution en 2020, le texte a été traduit en neuf langues. Malgré les pressions, Amazon n’a pas retiré le livre de son site mais a refusé d’en faire la publicité.

Shrier est une journaliste californienne qui a écrit pour le Wall Street Journal, entre autres publications.