L’essentiel du discours prononcé le 4 mars 2014 par Roger Cukierman, Président du Crif, pour le 29ème dîner du Crif à Paris a été consacrée à l’antisémitisme et l’antisionisme, son « nouvel habit ». C’est que les chiffres donnés pour 2013 par le SPCJ avec le ministère de l’Intérieur ont de quoi inquiéter, avec 40 % d’actes racistes à caractère antisémite pour une population de 1 % de citoyens juifs en France.
Discours grave de Roger Cukierman, Président du CRIF, pour ce 29ème dîner du Crif le 4 mars à Paris. Avec un thème central : celui de l’antisémitisme « hélas bien présent, aujourd’hui, en France », et de « son nouvel habit » qu’est l’antisionisme. Il citait, en préambule, « avec tristesse,avec inquiétude, avec angoisse » les « ignobles slogans lancés par quelques milliers d’individus parmi les manifestants du dimanche 26 janvier à Paris. Ils hurlaient « la France n’est pas à toi » !
« L’insulte antisémite » dans les rues de Paris, lui faisant « peur pour la France ».Comme, par ailleurs, les insultes racistes proférées récemment contre la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, car, dit-il, : « quand une ministre de la République est ainsi traînée dans la boue j’ai honte pour mon pays », constatant « dans notre pays un climat qui rappelle des périodes douloureuses »…
Faisant état d’un « mal profond », d’un « climat lourd », non seulement en France mais aussi « en Europe et dans le monde » le Président de la République se faisait d’ailleurs l’écho des exemples déplorés par Roger Cukierman : « des Juifs agressés sur la voie publique parce qu’ils portent une kippa, des enfants dans les écoles de la République insultés parce qu’ils sont juifs, des synagogues souillées par des croix gammées ».
Le Président du Crif exhortait François Hollande par ces mots : « Monsieur le Président, mobilisez la France contre ces fléaux du racisme et de l’antisémitisme ! Faites en une cause nationale ! Luttons contre cette corruption des esprits qui est dans l’air du temps ».
« L’antisionisme, nouvel habit de l’antisémitisme » et absurdité du boycott
Or « dans les quartiers difficiles de nos villes et de nos banlieues, les assassins Youssouf Fofana et Mohamed Merah sont souvent considérés comme des héros. Les mensonges déversés sur le peuple juif et sur l’Etat d’Israël ne sont pas anodins ». Et s’il dénonçait la « cohorte d’antisémites, de vichystes et de négationnistes, réfugiés derrière [la] dirigeante » du Front National n « progression spectaculaire dans l’opinion publique », le Président du Crif dénonçait aussi « l’extrême-gauche » où « l’antisionisme est le nouvel habit de l’antisémitisme. Car s’il n’y est pas convenable d’être antisémite, il est élégant de fustiger l’État d’Israël et de s’en prendre parfois à la légitimité même de son existence ». Il dénonçait aussi « la diabolisation qui frappe l’État d’Israël en France », s’interrogeant : « Comment en est-on arrivé à ce que les appels au boycott en France ciblent un seul des 200 pays de l’ONU ? Je peux vous citer 50 pays dont les frontières sont contestées par leurs voisins en Afrique, au Moyen Orient, ou sur l’immense continent asiatique. Qui songe à boycotter ces pays ? Personne. Pardon, si, il y a un pays et un seul que les bonnes consciences souhaitent boycotter : l’unique démocratie de sa région, où vit un pour mille de la population mondiale. Israël est le Juif des nations ».
Roger Cukierman, pour sa part, recadrait un certain nombre de choses en déclarant : « Concernant Israël, des positions extrémistes sont parfois attribuées au CRIF. A tort. Permettez-moi de rappeler nos positions fondamentales : Nous aimons et soutenons l’Etat d’Israël. Nous avons pour objectif que l’Etat d’Israël vive en paix aux côtés d’un Etat de Palestine. Nous sommes opposés à ce que l’Iran dispose de l’arme atomique. Nous souhaitons qu’Israël, où 20 % de la population pratique la langue française, soit enfin admis dans l’Organisation de la Francophonie financée par le contribuable français. Ce serait un geste juste. Quant à Jérusalem, comment expliquer que cette capitale éternelle du peuple juif ne soit toujours pas reconnue comme la capitale de l’Etat d’Israël ? De Gaulle s’était démarqué des autres pays en reconnaissant le premier la Chine. J’ose suggérer que la France de la même manière se démarque du reste du monde et reconnaisse Jérusalem comme la capitale d’Israël. Cela ne nuirait en rien à la paix tant espérée ». Il déplorait par ailleurs le combat mené par certains élus contre circoncision et abattage rituels.
Le « mal profond » de l’antisémitisme au menu du 29ème Dîner du Crif
Hélène Keller-Lind
L’essentiel du discours prononcé le 4 mars 2014 par Roger Cukierman, Président du Crif, pour le 29ème dîner du Crif à Paris a été consacrée à l’antisémitisme et l’antisionisme, son « nouvel habit ». C’est que les chiffres donnés pour 2013 par le SPCJ avec le ministère de l’Intérieur ont de quoi inquiéter, avec 40 % d’actes racistes à caractère antisémite pour une population de 1 % de citoyens juifs en France. Le Président de la République allant dans le sens de ce constat dans son discours, bien que ne mentionnant pas l’antisionisme, proposait une meilleure utilisation des lois, une lutte contre la cybercriminalité, ou que le « niveau de la morale citoyenne soit élevé par l’éducation. Il évoquait l’Ukraine, la paix entre Israël et les Palestiniens, assurant enfin que l’Iran n’aurait « jamais l’arme nucléaire ».
Gravité de la situation
Discours grave de Roger Cukierman, Président du CRIF, pour ce 29ème dîner du Crif le 4 mars à Paris. Avec un thème central : celui de l’antisémitisme « hélas bien présent, aujourd’hui, en France », et de « son nouvel habit » qu’est l’antisionisme. Il citait, en préambule, « avec tristesse,avec inquiétude, avec angoisse » les « ignobles slogans lancés par quelques milliers d’individus parmi les manifestants du dimanche 26 janvier à Paris. Ils hurlaient « la France n’est pas à toi » !
« L’insulte antisémite » dans les rues de Paris, lui faisant « peur pour la France ».Comme, par ailleurs, les insultes racistes proférées récemment contre la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, car, dit-il, : « quand une ministre de la République est ainsi traînée dans la boue j’ai honte pour mon pays », constatant « dans notre pays un climat qui rappelle des périodes douloureuses »…
Faisant état d’un « mal profond », d’un « climat lourd », non seulement en France mais aussi « en Europe et dans le monde » le Président de la République se faisait d’ailleurs l’écho des exemples déplorés par Roger Cukierman : « des Juifs agressés sur la voie publique parce qu’ils portent une kippa, des enfants dans les écoles de la République insultés parce qu’ils sont juifs, des synagogues souillées par des croix gammées ».
L’analyse de Roger Cukierman pour tenter d’expliquer ce qui se joue : « Dans la France de 2014 touchée par le chômage, en quête de repères, inquiète pour l’avenir, la crise économique entraîne une crise morale » était, elle, démentie par le Président de la République pour qui « la crise à bon dos, ce ne sont pas des cohortes de chômeurs qui crient « mort aux Juifs », pas les plus pauvres, pas les damnés de la terre qui s’expriment avec les mots de la haine ».
« Pas de clivages politiques » face à l’antisémitisme
François Hollande, évoquant « des slogans hérités des années 30 », appelait à « un rassemblement sur l’essentiel », « pas de clivages politiques,…pas de place pour la division, la polémique ». « Le gouvernement est d’une intransigeance absolue » à cet égard disait-il, estimant que « les lois existent et doivent être mises en œuvre avec sévérité ». La Garde des Sceaux ayant donné des instructions dans ce sens, dit-il, soulignant que « si la justice condamne, il faut que les sanctions soient appliquées ». Une référence à la non application des décisions de justice concernant celui dont Roger Cukierman venait de dire : « Un ancien humoriste a présenté il y a peu une liste antisioniste en France sponsorisée par Téhéran ! Il est devenu un activiste politique. Il cherche à faire prospérer ses affaires en utilisant la haine des Juifs. Il entend faire rire en exprimant ses regrets que les nazis n’aient pas fini leur travail d’extermination. Et à l’appui de son discours il promeut un salut nazi inversé ».Le Président du Crif saluant la mobilisation du chef de l’État, « la mobilisation républicaine du Gouvernement et, tout particulièrement, celle du Ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, contre ses agissements ».
Faire de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme une cause nationale
Le Président du Crif exhortait François Hollande par ces mots : « Monsieur le Président, mobilisez la France contre ces fléaux du racisme et de l’antisémitisme ! Faites en une cause nationale ! Luttons contre cette corruption des esprits qui est dans l’air du temps ».
Demandant une application ferme des lois, François Hollande annonçait également avoir demandé à son gouvernement de travailler sur des propositions permettant de lutter contre la cybercriminalité, en réponse à Roger Cukierman qui soulignait que la lutte contre la pédophilie se fait en dépit de « l’extra-territorialité des géants de la communication et des réseaux sociaux » et appelant à plus de fermeté de la part du gouvernement.
Au chapitre de l’école le chef de l’État indiquait qu’il faut « élever le niveau de la morale citoyenne par l’éducation, la morale laïque étant enseignée maintenant dans nos écoles ». « Les génocides, la Shoah sont des modules dans les écoles de professeurs ». Ou encore « la Charte de la laïcité est affichée dans tous les mieux d’enseignement, elle doit être au programme des enseignants ». Il saluait et encourageait toute lutte contre la discrimination, citant des actions de l’UEJF et de la LICRA.
« La mécanique infernale se termine toujours dans le drame… »
Car, désormais, « les propagandistes ne se cachent plus », disait François Hollande, évoquant « livres, rue, spectacles, Internet où « rumeurs deviennent tumeurs et la mécanique infernale se termine toujours dans le drame ». Drames évoqués, disait Roger Cukierman, dans « le très émouvant film d’Alexandre Arcady « 24 jours » [qui] nous rappelle, s’il en est besoin, que l’antisémitisme a conduit aux meurtres d’Ilan Halimi et des enfants Sandler Arié 3 ans, Gabriel 6 ans, et de Myriam Monsonego, 8 ans, sans oublier les adultes Jonathan Sandler, et les militaires de Montauban, Imad Ibn Zlaten, Abel Chennouf, et Mohamed Legouad. Je salue les familles ici présentes.
« L’antisionisme, nouvel habit de l’antisémitisme » et absurdité du boycott
Or « dans les quartiers difficiles de nos villes et de nos banlieues, les assassins Youssouf Fofana et Mohamed Merah sont souvent considérés comme des héros. Les mensonges déversés sur le peuple juif et sur l’Etat d’Israël ne sont pas anodins ». Et s’il dénonçait la « cohorte d’antisémites, de vichystes et de négationnistes, réfugiés derrière [la] dirigeante » du Front National n « progression spectaculaire dans l’opinion publique », le Président du Crif dénonçait aussi « l’extrême-gauche » où « l’antisionisme est le nouvel habit de l’antisémitisme. Car s’il n’y est pas convenable d’être antisémite, il est élégant de fustiger l’État d’Israël et de s’en prendre parfois à la légitimité même de son existence ». Il dénonçait aussi « la diabolisation qui frappe l’État d’Israël en France », s’interrogeant : « Comment en est-on arrivé à ce que les appels au boycott en France ciblent un seul des 200 pays de l’ONU ? Je peux vous citer 50 pays dont les frontières sont contestées par leurs voisins en Afrique, au Moyen Orient, ou sur l’immense continent asiatique. Qui songe à boycotter ces pays ? Personne. Pardon, si, il y a un pays et un seul que les bonnes consciences souhaitent boycotter : l’unique démocratie de sa région, où vit un pour mille de la population mondiale. Israël est le Juif des nations ».
Une sécurité renforcée pour l’État d’Israël et la paix
On ne trouvait guère de condamnation de l’antisionisme en tant que tel dans les propos du chef de l’État qui, toutefois, réitérait ses propos tenus à la Knesset lors de son récent voyage en Israël et les Territoires palestiniens, se prononçant pour « deux États pour deux peuples, compatibles avec la paix et la sécurité ». Un règlement n’étant guère possible « que si la sécurité d’Israël est renforcée ». François Hollande, par ailleurs, citait les liens entre la communauté juive et Israël qui ne l’éloigne jamais de [sa] patrie », une « communauté juive pleinement chez elle en France ».
Recadrages de Roger Cukierman
Roger Cukierman, pour sa part, recadrait un certain nombre de choses en déclarant : « Concernant Israël, des positions extrémistes sont parfois attribuées au CRIF. A tort. Permettez-moi de rappeler nos positions fondamentales : Nous aimons et soutenons l’Etat d’Israël. Nous avons pour objectif que l’Etat d’Israël vive en paix aux côtés d’un Etat de Palestine. Nous sommes opposés à ce que l’Iran dispose de l’arme atomique. Nous souhaitons qu’Israël, où 20 % de la population pratique la langue française, soit enfin admis dans l’Organisation de la Francophonie financée par le contribuable français. Ce serait un geste juste. Quant à Jérusalem, comment expliquer que cette capitale éternelle du peuple juif ne soit toujours pas reconnue comme la capitale de l’Etat d’Israël ? De Gaulle s’était démarqué des autres pays en reconnaissant le premier la Chine. J’ose suggérer que la France de la même manière se démarque du reste du monde et reconnaisse Jérusalem comme la capitale d’Israël. Cela ne nuirait en rien à la paix tant espérée ». Il déplorait par ailleurs le combat mené par certains élus contre circoncision et abattage rituels.
Ukraine, Russie et Iran
Commençant son discours en parlant de la situation en Ukraine et de « l’escalade dangereuse de la Russie », le chef de l’État assurait que « la France et l’Europe exercent toute la pression nécessaire pour imposer la voie du dialogue…la seule option raisonnable [étant ] la négociation ». Au cours de conversations réunissant divers interlocuteurs dans le cadre d’une rencontre sur le Liban à Pairs le 5 mars cette situation ukrainienne sera évoquée. Situation qui, dit-il rappelle que « la paix est toujours œuvre difficile ». Le Président Hollande terminait son discours avec un autre dossier de politique étrangère, celui de l’Iran, essentiel « pour la paix en Israël, dans la région et le monde », alors qu’il estime que « le plus dur reste à venir ». Garantissant alors « à Israël et l’ensemble du monde que l’Iran ne disposer jamais, jamais, de l’arme nucléaire ».
Le Père Patrick Desbois dédie son Prix décerné par le Crif « à ceux qui dorment dans les fosses d’Ukraine »
Le Président du Crif déclarait au début de son discours : « J’ai été un enfant caché. Hitler et ses complices ont gazé et brûlé mes grands- parents, mes oncles, mes tantes, mes cousins. Alors, l’antisémitisme je connais … ». Plus tard il citait « le dernier chef d’œuvre de Claude Lanzmann (le dernier des Injustes) [qui ] a aussi le mérite de nous rappeler à quoi peut mener l’antisémitisme ». Et il décernait le Prix du Crif au Père Patrick Desbois qui a mené pendant « dix années une tâche difficile », découvrant « 1.700 sites », soit « un million 300.000 morts », tués au cours de « la Shoah par balles » en Europe de l’Est, une Shoah méconnue. En Ukraine notamment. Très ému, Patrick Desbois, dédiait d’ailleurs ce Prix « à ceux qui dorment dans les fosses d’Ukraine »…
S’exprimant devant quelque huit cents personnes, dont de nombreux ambassadeurs, dont celui d’Israël, élus, ministres, anciens ministres, représentants de cultes, de partis politiques, Présidents d’associations, Roger Cukierman terminait son discours par ces mots : « la haine des Juifs ça suffit !
Je suis Juif. Je ne porte pas seulement l’héritage de mes pères. Je suis responsable du devenir de mes enfants et de mes petits enfants dans ce pays symbole vivant des plus hautes valeurs humaines et morales. Je ne veux pas qu’ils revivent les cauchemars de mon enfance, je ne veux rien laisser passer qui puisse changer la France que j’aime, celle où règne la justice, l’humanisme, le respect de l’autre !
Vive la République, vive la France ! »